Chacun de nos comportements est sous-tendu par une fonction cognitive : parler est sous-tendu par la fonction langage ; l'acte de lecture, de traduction, d'écriture sous dictée, de répéter ou de communiquer est sous-tendu par la fonction de décodage et d'encodage. Nos actions sont sous-tendues par des processus complexes de prise de décision et de planification motrice... Depuis le XVIIe siècle et même avant, le cerveau a été reconnu comme étant le centre de l'intellect du fait que toutes nos cognitions sont commandées par le cerveau. Les biologistes soulignent à ce titre que chacun de nos comportements reflète une fonction du cerveau (je me situerai dans la thèse selon laquelle un comportement reflète une multitude de fonctions du cerveau : perception, mémoire, action, émotion... ). La pensée, la conscience peut-être sont des aspects de l'activité cérébrale, comme le sont les actions d'apprendre, de sourire ou de souffrir. Inversement, les troubles des processus cognitifs (perceptifs, praxiques, gnosiques, linguistiques, neuropsychologiques, moteurs... ) caractérisent les maladies psychiatriques et neurologiques et résultent de lésions ou de dysfonctionnements cérébraux. Quelles règles lient l'anatomie et la physiologie du cerveau aux fonctions perceptives, mnésiques et motrices ? Comment nos perceptions du monde influencent nos émotions et nos prises de décision et comment, inversement, nos émotions affectent nos fonctions cognitives ? Cette frontière, peut-être ultime de la connaissance de l'homme par lui-même, est l'un des enjeux majeurs des neurosciences. Les neurosciences viennent de connaître des avancées spectaculaires, que la complexité du cerveau et les méandres de son organisation hiérarchique rendaient inconcevables. L'évolution des neurosciences a bénéficié de l'apport de nombreuses disciplines nouvelles associant toutes les sciences du vivant (biologie moléculaire, biochimie, électrophysiologie, anatomie... ) à celles de l'ingénierie (physique, mathématiques, informatique) et aux sciences humaines (linguistique, psychologie cognitive, philosophie...). Les progrès spectaculaires de la biologie moléculaire ont donné une image plus complète des éléments constitutifs des cellules nerveuses (neurones). Grâce à la révolution de l'imagerie, les chercheurs disposent d'outils permettant de visualiser l'activité globale du cerveau, en relation avec des fonctions cognitives complexes. La neurophysiologie, quant à elle, permet d'étudier la relation entre activité neuronale en relation avec le comportement. Les avancées de l'imagerie cérébrale, conjuguées avec des études neuropsychologiques et électrophysiologiques, permettront d'observer, en temps réel, le système nerveux en action. Associées aux neurosciences cognitives, les techniques d'imagerie permettent, de plus en plus, d'identifier les parties du cerveau utilisées pour divers aspects du raisonnement. Il reste encore à relier les différents niveaux entre eux, pour mieux comprendre comment le fonctionnement, au niveau du neurone, se traduit en activité d'ensembles neuronaux et en activité globale au niveau cérébral. Ces progrès mettent à notre disposition une base de référence essentielle pour l'analyse génétique des maladies humaines comme les maladies neuro-développementales (autisme), la maladie d'Alzheimer, la dysarthrie de Parkinson, la sclérose en plaques, les épilepsies, certaines affections psychiatriques et d'envisager la mise en œuvre de thérapeutiques novatrices. Les syndromes neuropsychologiques acquis (aphasies, amnésies, agraphies, alexies, apraxies...) en sont également et de plus en plus, aujourd'hui, bénéficiaires. Malgré l'importance des découvertes effectuées à ce jour, les neurosciences en sont encore à leurs débuts. Concernant la formation de base qui conduit aux recherches en neurosciences puis à leur enseignement, la question est encore plus complexe et nécessite des efforts particuliers. En Algérie, et concernant le champ des sciences humaines, la post-graduation d'orthophonie (1987-2009) qui se prolongera (2010) par le mastère de neurosciences cognitives (projet conçu comme devant s'inscrire dans un réseau euro-méditerranéen de neurosciences, le GDRI) fut et est la clé permettant l'installation des jalons, base de la naissance, aujourd'hui, des neurosciences cognitives. L'objectif de ce congrès, qui fait suite au colloque international de Beni Abbès (mars 2003), puis aux travaux de l'atelier réservé aux neurosciences lors du IVO colloque international du laboratoire Slancom (juin 2006), réside dans un regroupement des capacités de recherche menées en Algérie par les médecins, les biologistes, les linguistes, les traductologues, les neuropsychologues, les orthophonistes et les psychologues (et, en perspective, les tenants de bien d'autres sciences) ayant pour objet le cerveau et son fonctionnement, le tout, dans un contexte de discussions avec des chercheurs internationaux. Concernant le bagage à acquérir pour accéder à la recherche neuroscientifique, l'expérience menée depuis 30 ans en Algérie, qui consiste en la création de la licence, de la post-graduation et du doctorat d'orthophonie dans leur prolongement en sciences du langage et en neuropsycholinguique, sera exposée dans ses résultats actuels, en vue d'ouvrir un débat autour de la formation académique de base, nécessaire à la recherche et à l'enseignement neuroscientifiques. Nous souhaitons que ce congrès soit l'occasion de réunir toutes les forces algériennes en neurosciences, afin d'organiser les collaborations nationales et internationales en s'insérant dans des réseaux. La concertation à l'échelle nationale est donc un élément capital dans la mise en œuvre d'une politique scientifique orientée vers les pays du pourtour méditerranéen. Cela permettra l'intégration des laboratoires de recherche algériens spécialisés en neurosciences, au sein du projet de réseau euro-méditerranéen de neurosciences, initié par le GDRI franco-marocain de neurosciences, coordonné par Driss Boussaoud, directeur de l'Institut de neurosciences cognitives de la Méditerranée (CNRS, Marseille) et Omar Battas, professeur à la faculté de médecine de Casablanca. Les chercheurs des laboratoires de biologie, de psychologie et de médecine à l'échelle nationale, qui s'inscrivent dans les neurosciences, sont donc vivement invités à participer massivement à ce congrès qui réunira les membres du laboratoire organisateur (Slancom, université d'Alger) et des invités étrangers, membres d'organismes internationaux, comme IBRO, l'AMN et autres sociétés de pays méditerranéens (France, Maroc, Espagne, Italie...) afin de débattre des avancées dans ce domaine qui fait, aujourd'hui, la modernité des savoirs. L'Association algérienne de neurosciences pourrait en être la consécration. Contact : [email protected] Laboratoire sciences du langage neurosiences cognitives communication (Slancom), université d'Alger et Société algérienne d'orhophonie (SAOR)