Revenez vers 18h et vous ne verrez plus rien sur les étals », nous indique Réda, l'un des vendeurs de dindes. « D'abord, vous les journalistes, vous ne savez que critiquer. Vous ignorez complètement nos conditions de travail et notre situation sociale. Ils étaient nombreux les journalistes qui sont venus nous interroger et sont repartis avec la promesse de transmettre nos messages aux autorités pour régler nos problèmes. Alors, je vous demande à vous aussi, s'il vous plaît, je veux que vous écrivez que nous n'avons jamais menacé les citoyens qui viennent ici pour acheter la dinde comme cela vient d'être écrit dans un journal arabophone », enchaîne-t-il.Magtaâ Kheira, c'est d'abord une route qui relie la capitale vers le reste des wilayas du centre et l'ouest du pays. Ce tronçon routier était meurtrier. Les hordes criminelles ont fait fuir les habitants au début des années 1990. Cette zone limitrophe entre les wilayas de Tipaza et d'Alger s'est transformée en un coupe-gorge, où plusieurs assassinats ont été commis, aujourd'hui, elle est empruntée par des centaines de véhicules. Les vendeurs de légumes s'installent aux abords de la route. La wilaya de Tipaza a construit un abattoir, afin de réunir les jeunes vendeurs de dindes qui occupaient anarchiquement cette route, très fréquentée par les automobilistes. L'investissement aura coûté un peu de 11 millions de dinars. Néanmoins, selon nos interlocuteurs, des travaux restent à faire pour la réalisation de la toiture, et des aménagements qui n'ont pas encore vu le jour. « Nous voulons que cet abattoir soit pris en charge, car, grâce à notre travail actuel, nous avons pu fonder nos foyers et sommes pères de famille. Cet outil de travail est sacré pour nous et nous voulons le protéger et le préserver. Nous sollicitons le wali de Tipaza pour qu'il continue sa mission, car le maire de Douaouda nous avait dit que cet abattoir ne le concerne pas », concluent-ils. A l'extérieur de l'abattoir, un parking payant a été aménagé pour permettre aux citoyens de s'arrêter en toute sécurité. Il n'en demeure pas moins que des doutes planent sur la gestion de cet abattoir, selon nos interlocuteurs. Pourtant, c'est un bien communal. Plus loin encore, non loin du barrage de la Gendarmerie nationale, c'est un autre décor lamentable, marqué d'une incroyable anarchie qui s'offre aux yeux des passants. Il se situe dans le territoire de la wilaya d'Alger. Des individus égorgent des moutons et commencent à dépecer les bêtes sous le regard de la foule, pour immédiatement vendre la viande. A quelques mètres, d'autres hommes égorgent à leur tour des dindes et les déplument pour les exposer au bord de la route. Les automobilistes ne s'empêchent pas d'acheter, faisant fi des règles d'hygiène. A quelques mètres de cette boucherie à ciel ouvert, des bambins s'installent à l'ombre pour vendre les galettes de pain, des herbes, des figues. Les plumes couvrent le sol gorgé et pollué du sang des bêtes. Les sachets en plastique accentuent la pollution. Cela dénote du nombre élevé de dindes abattues sans aucun contrôle. Le laisser-aller dans ce territoire de la wilaya d'Alger a transformé cet environnement en une décharge publique.