Jamais peut-être pétrole et finances n'ont été aussi mêlés à la fois à la récession mondiale qui semble s'installer doucement mais sûrement. D'une part, les grandes économies et les grands pays émergents tentent de se concerter sur le meilleur moyen de sortir de la crise du système financier mondial tout en garantissant leurs intérêts. D'autre part, des pays membres de l'OPEP essayent de faire bonne contenance contre les pressions des pays industriels afin de maintenir le niveau des prix du pétrole à des seuils acceptables. Pour tenter d'enrayer la pire crise financière depuis la grande dépression de 1929, les chefs d'Etat des pays industrialisés et des grandes économies émergentes, regroupés sous l'organisation du G20, se réunissent aujourd'hui à Washington avec pour principal objectif de redéfinir le mode de fonctionnement du système financier international et en accroître la réglementation. Dans un discours prononcé hier, le président américain George W. Bush a expliqué que les 20 participants vont tenter de « répondre à la crise actuelle et jeter les bases de réforme pour empêcher qu'une telle crise ne se reproduise à l'avenir ». Pour ce faire, le sommet est appelé à fonder les bases d'un processus qui permettra une réforme du fonctionnement et de l'organisation des marchés financiers. La crise qui menace le monde d'une grave récession a révélé des « trous noirs » dans la finance internationale et des défaillances dans tout le système bancaire. La feuille de route qui sera définie lors du sommet tentera, à cet effet, de fixer les principes d'une nouvelle organisation de la sphère financière afin de rendre la réglementation plus efficace et d'éviter que se forment de nouvelles bulles spéculatives. Selon les analystes, les fonds spéculatifs, les entités hors bilan ou les banques d'affaires américaines échappent à la régulation des banques centrales. Ils sont ainsi un facteur d'instabilité, en ce sens qu'ils accordent des crédits et créent de la monnaie, prérogative traditionnelle des pouvoirs publics. Le sommet du G20 examinera aussi la problématique des paradis fiscaux qui abritent plus de 400 banques et environ 2 millions de sociétés écran, gérant quelque 10 000 milliards de dollars d'actifs financiers. Ni régulés ni transparents, ils peuvent entraîner dans leur chute l'ensemble du système financier mondial, affirment les experts. Cependant, les grands axes du plan d'action que la réunion du G20 veut adopter ne fait pas consensus. Les pays de l'Union européenne veulent imposer leur stratégie sur la réforme du système financier international, tout en mettant les Etats-Unis devant leurs responsabilités dans cette crise financière historique. Ils désirent ainsi obtenir qu'« aucun segment de marché, aucun territoire, aucune institution financière n'échappent à l'avenir à une régulation proportionnée ou, au moins, à la surveillance » ou encore « mettre en place des codes de conduite pour éviter la prise de risque excessive dans l'industrie financière, y compris dans les systèmes de rémunération ». Les leaders européens ont aussi l'intention de « confier au FMI la responsabilité de recommander les mesures nécessaires pour restaurer la confiance et la stabilité ». En revanche, l'Administration Bush est totalement opposée à l'instauration d'une autorité régulatrice mondiale. Le président Bush a également rejeté tout « interventionnisme exagéré des Etats », refusant aussi que les Etats-Unis assument l'entière responsabilité de la crise. En tout état de cause, les observateurs reconnaissent que la réunion du G20 ne sera qu'un coup d'envoi et ne débouchera pas sur un Bretton Woods II, du nom des accords ayant donné naissance en 1944 à l'architecture financière actuelle. « Ces entretiens vont être difficiles », a estimé la chancelière allemande Angela Merkel, dans une déclaration à la presse. Mais elle a souligné l'urgence d'agir, alors que l'Allemagne, première économie européenne, vient d'entrer en récession et qu'elle devrait être suivie par le reste des pays riches en 2009. Pour le ministre brésilien des Finances, Guido Mantega, les leaders du G20 ont une tâche délicate à accomplir. « Nous devons changer les pneus alors que la voiture continue à rouler », a-t-il indiqué. Qu'est-ce que le G20 ? Le G20 concentre 85% de la richesse de la planète et les deux tiers de sa population. Créé en 1999, il rassemble chaque année les ministres des Finances et gouverneurs des Banques centrales des pays du G8 (Allemagne, France, Etats-Unis, Japon, Canada, Italie, Royaume-Uni et Russie), ainsi que ceux de l'Argentine, du Brésil, du Mexique, de la Chine, de l'Inde, de l'Australie, de l'Indonésie, de l'Arabie Saoudite, de l'Afrique du Sud, de la Corée du Sud, de la Turquie et de l'Union européenne. A titre exceptionnel, l'Espagne sera représentée au sommet. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale sont également représentés. Sa création est à mettre sur le compte du G7, dans une période de crises financières successives en Asie, en Russie et en Amérique latine, qui les a incités à approfondir le dialogue économique entre les principales puissances mondiales afin de tenter de les résoudre ou de les éviter. Au G20, les dirigeants discutent également des questions budgétaires et monétaires, de croissance, de commerce et d'énergie.