Alors que le colonel Amirouche l'avait désigné à la tête d'une colonne de soldats de la Wilaya III devant assurer la sécurité du congrès de la Soummam, la commission de recours (Wilaya VI) chargée d'assainir les listes des moujahidine et chouhada ne trouva pas mieux à Djelfa, 44 ans plus tard, que de l'en exclure lui et beaucoup d'autres ! « S'il avait survécu à la guerre de libération, il aurait certainement embrassé une brillante carrière militaire comme haut gradé », pense aujourd'hui l'un de ses compagnons d'armes, Abdelaziz Ouali. Bayzid Jakal, de son nom de guerre Makhlouf El Djelfaoui, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est né en 1920 dans la tribu des Ouled Reggad d'origine naïlie. A son retour de la guerre d'Indochine en 1956, alors que les combats pour l'indépendance de l'Algérie faisaient déjà rage dans la petite Kabylie et ailleurs, il décide, avec l'aide d'un compagnon de régiment répondant au sobriquet « moustache l'Houcine », de s'emparer d'un véhicule lourd de marque Renault chargé d'armes et de munitions et à bord duquel ils se sont rendus au maquis de la région de Amizour le 19 janvier 1956. Sa première bataille livrée aux côtés de ses compatriotes fut la célèbre bataille d'Amacine dans l'ouest de oued Soummam, sous le commandement du lieutenant Arezki Baïri, connu sous le surnom de Arezki Lourassi. Le moudjahid A. Ouali, vivant à ce jour, rappelle que Makhlouf El Djelfaoui a eu droit à de solennels hommages de la part du colonel Amirouche qui l'a reçu dans le mont de l'Akfadou, consécutivement à son acte de désertion de l'armée française.Militaire de métier pour avoir acquis de nombreuses techniques par les armes aux avant-postes contre les Viets aussi, Bayzid Jakal se voit confier par le colonel Amirouche la responsabilité de diriger un groupe activant dans l'oued Soummam et d'entraîner d'autres parmi lesquels de jeunes recrues qui seront plus tard promues aux grades d'officiers supérieurs dans les rangs de l'ANP. Dans un témoignage notarié passionnant signé de la main du moudjahid A. Ouali, Makhlouf El Djelfaoui mena son groupe à de retentissantes victoires sur l'ennemi dans cette région qui abritera ensuite le congrès de la Soummam dont ce héros assurera la sécurité des 22 et celle de cet événement historique.Il participera ensuite à une autre bataille non moins mémorable dite « la bataille de l'espoir et du fusil », hélas son ultime bataille qui fut une réponse instantanée au bombardement de la Wilaya III. Il est mort en 1957 au champ d'honneur, dans le lieudit Assama, à 10 km de la ville de Béjaïa. Alors qu'aujourd'hui une place et une école y portent son nom et qu'il a pour épitaphe une citation digne de ses hauts faits d'armes dans la ville de Béjaïa, ce héros reste encore méconnu dans sa propre région ! Pis encore, sa femme habite à ce jour un logement à Djelfa qu'elle loue auprès d'un privé et son unique fils a un emploi subalterne dans une société nationale ! Il ne dut sa « réhabilitation » en 2001 qu'au témoignage de moujahidine de la Wilaya III, dont A. Ouali qui a, de surcroît, fait publier un long article sur ses exploits dans la revue de l'ONM intitulée 1er Novembre.