Lorsque l'Etat utilise le crime comme moyen de faire justice, alors il est beaucoup à craindre pour la justice. Cela pourrait être la conclusion à apposer aux travaux de la journée parlementaire du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), organisée hier dans l'enceinte de l'Assemblée populaire nationale, pour appeler à l'abolition de la peine capitale. En Algérie, la peine de mort est toujours de mise. C'est une sanction prononcée à longueur d'année par les tribunaux qui, pourtant, infligent une sentence similaire à cet acte dénoncé. Saisissant l'occasion de la célébration du 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, le groupe parlementaire du RCD a organisé cette journée d'étude pour à la fois réclamer l'abolition de la peine de mort, mais aussi offrir un espace de débat sur une sentence qui est en contradiction avec le principe du droit à la vie. En invitant parlementaires, défenseurs des droits de l'homme et autres membres de la société civile à débattre de la nécessité d'abolir la peine de mort, ce parti a rendu publique une proposition de loi relative à l'abolition de la peine capitale. Cette dernière propose que « la peine de mort soit remplacée par la sanction de réclusion criminelle à perpétuité ». Initiateur de cette proposition de loi, le député du RCD Ali Brahimi n'hésite pas à qualifier la peine capitale de « permis d'anéantir un être humain au nom de la loi ». « Inscrite dans une démarche parlementaire par excellence, notre initiative de loi est, en premier lieu, un appel solennel à la conscience et à la décision conjointes des instances législative et exécutive sur une question humanitaire fondamentale », indique encore Ali Brahimi. Si la proposition n'a pas atteint encore la conscience de l'instance exécutive, elle a permis pour l'heure de fédérer toutes les voix en faveur de l'abolition de cette peine qui demeure une tache noire au fronton des Etats qui l'appliquent encore. « On peut dire aujourd'hui que l'abolition de la peine de mort suppose un niveau d'éducation et de culture générale qui permet aux sociétés de ne pas céder à la tentation de vengeance contre un sujet qui s'est rendu coupable de crimes souvent odieux », a déclaré dans son intervention le président du RCD, Saïd Sadi. Plus qu'une décision juridique, M. Sadi estime qu'ôter la vie à un individu pose une problématique philosophique « qui a le droit et au nom de quoi un dirigeant ou une institution peut-elle se donner cette méprise absolue et irrémédiable sur la vie d'autrui », s'interroge l'homme politique. Et d'ajouter : « Dans nos contrées, la peine capitale a d'abord vocation à protéger les pouvoirs avant les collectivités. » Et de déplorer que depuis « le naufrage » du 12 novembre, les parlementaires n'ont plus le pouvoir de contester le programme du président qui endosse la peine capitale. « La nouvelle Constitution ne nous permet que de discuter de la manière d'appliquer le programme du chef de l'Etat, donc de ne pas évoquer l'abolition de la peine de mort mais de la manière dont il faut appliquer la peine », a ajouté Saïd Sadi.