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« Le Sud-Ouest magmatique est plus important que nous ne le pensions » Moulley Charaf Chabou. Enseignant-chercheur en sciences de la Terre à l'université de Sétif et à l'Ecole nationale polytechnique d'Alger
Vous avez présenté, mardi dernier, une thèse en géologie portant sur la province magmatique de l'Atlantique central dans le Sud-Ouest algérien... Vous pouvez nous expliquer ? La Terre connaît épisodiquement (disons chaque 30 à 40 millions d'années) des périodes d'intenses activités volcaniques, où d'énormes quantités de lave se mettent en place sur les continents formant ce que l'on appelle en géologie les grandes provinces volcaniques. Imaginez que la superficie de l'Algérie soit entièrement recouverte par 3 à 4 km d'épaisseur de lave ! C'est ce qui se produit lors de la mise en place de ces grandes provinces volcaniques. L'une de ces provinces est celle de l'Atlantique central : c'est la plus vaste province volcanique de notre planète, puisqu'elle couvre une superficie de plus de 7 millions de km2. Une partie de la CAMP s'est étendue en Algérie. Mais jusqu'à maintenant, aucune étude n'a été réalisée sur cette partie algérienne. Il fallait d'abord prouver que toutes ces roches volcaniques appartiennent à la CAMP. C'est ce qu'on à fait dans notre travail de thèse en utilisant une technique de datation très précise et en étudiant la chimie de ces roches. Notre étude a démontré clairement que ces formations magmatiques font partie de la CAMP et que la superficie de cette province est encore plus grande que celle connue jusqu'à maintenant, en tenant compte de cette partie algérienne qui couvre une étendue de plus de 500 000 km2. Ce travail a été mené avec le Dr Amar Sebaï de l'Ecole nationale polytechnique d'Alger, en collaboration avec le professeur Hervé Bertrand, de l'Ecole normale supérieure de Lyon, premier spécialiste mondial de la CAMP et le Dr Gilbert Féraud du CNRS à Nice. Comment ces datations contribuent-elles à faire avancer la recherche ? Ces études de datation nous permettent par exemple de déterminer d'éventuelles relations de cause à effet entre les grandes extinctions massives et les grandes provinces volcaniques. On sait que durant son histoire géologique, la Terre a connu de nombreuses extinctions massives d'animaux : on en connaît cinq de grande importance au cours des 500 derniers millions d'années. Dans le cas qui nous concerne, on sait que la quatrième grande extinction massive que la Terre ait connue est celle qui s'est produite il y a 200 millions d'années à la limite entre le trias et le jurassique. C'est après cette extinction que les dinosaures ont dominé la Terre durant le jurassique. Or, les datations récentes ont montré que le volcanisme de la CAMP s'est mis en place il y a 200 millions d'années et donc serait peut-être le responsable de cette extinction massive. La plus grande extinction massive que la Terre ait connue durant son histoire, survenue il y a 250 millions d'années, et qui est responsable de l'extinction de près de 90% des espèces sur Terre, coïncide avec l'éruption d'une grande quantité de lave en Sibérie. Quelles sont les zones les plus connues en Algérie ? Jusqu'à maintenant, le volcanisme de la CAMP était mal connu en Algérie. Notre travail a permis d'effectuer une étude détaillée de cette province dans le Sud-Ouest algérien (régions de Béchar, de Tindouf, de Reggane ainsi que celle du Hank et de Fersiga près des frontières algéro-mauritanienne et malienne). Reste que la partie nord-ouest en Algérie n'est pas encore bien connue. L'année dernière, une équipe de l'université d'Oran a démontré l'appartenance à la CAMP de roches volcaniques situées dans les monts de Ksour (Aïn Sefra). Sur quel sujet allez-vous concentrer vos prochaines recherches ? Bien que j'envisage d'élargir mes recherches dans d'autres domaines de la géologie, je continuerai à travailler sur la CAMP en Algérie, notamment sur les régions encore mal connues et étudier l'impact de la mise en place de ces laves sur le potentiel pétrolier des bassins sédimentaires du Sud-Ouest algérien.