En attendant le procès de l'émir national, le tristement célèbre Abderrazak El Para, 29 terroristes formant katibat Es Sounna, affiliée au GSPC, sont jugés depuis hier au tribunal criminel de première instance de Constantine. Les Algériens se souviennent tous de ces « Afghans » passés devant les micros et les caméras de l'ENTV après leur arrestation en octobre 2003. Ils venaient d'être neutralisés après 22 jours d'accrochages avec les forces de la Ve Région militaire dans les monts du Babor, à Sétif. Hier, dans une salle interdite au public et réservée à ce procès, les visages rasés et les cheveux soigneusement coupés ont remplacé les longues crinières et les barbes salafistes. Les quelques sourires échangés çà et là, cachaient mal la crispation générale qui régnait chez les accusés. Après la vérification d'usage des identités des accusés, le juge entama vers 11 h le procès, en les entendant l'un après l'autre. Beaucoup sont originaires de la région de Sétif, mais d'autres viennent d'Alger, de Blida et de Jijel. Parmi eux, certains ont rejoint le maquis très tôt, à partir de 1992, après l'interruption du processus électoral et l'interdiction du FIS. Et si la majorité est composée de chômeurs, on y trouve aussi l'officier militaire et le cadre du ministère des Affaires religieuses. L'arrêt de renvoi, rédigé le 6 septembre 2004, souligne que les 29 accusés reconnaissent avoir été arrêtés lors des accrochages survenus avec les forces de l'ANP après 22 jours de résistance, en détention de grandes quantités d'armes et de munitions ainsi que des explosifs. Selon le même document, leurs propres aveux font état de nombreux assassinats, commis au nom du djihad contre des civils et des militaires, et d'autres crimes qui vont toujours avec l'activité terroriste qu'ils assument depuis 1992 jusqu'à 2003. Le greffier en charge de la lecture du document avait mis en exergue les faits tels que relatés par le rapport de l'opération pour ainsi récuser la version de la défense qui veut que cinq éléments s'étaient rendus d'eux-mêmes. Mais plus spectaculaire était la nouvelle version adoptée par l'ensemble des accusés devant le juge. Abou Abdourrahmane et ses acolytes ont, en effet, nié en bloc avoir commis les crimes qui leur sont imputés tout en reconnaissant s'être engagés au maquis. Tous étaient donc chargés de tâches ménagères comme ils le prétendent, et tout ce qu'ils ont raconté durant l'enquête et face au juge d'instruction « était arraché sous la torture ». Nous voilà donc devant un procès qui risque de durer au moins deux jours, à cause du nombre important des accusés, mais qui semble se diriger vers la condamnation des terroristes, à moins d'une décision politique qui viendrait s'inscrire dans le cadre encore non officiel de l'amnistie. A l'heure où nous mettons sous presse, l'interrogatoire se poursuivait toujours.