Ce groupe de terroristes avait été neutralisé, en mai 2003, après un accrochage ayant eu lieu dans les monts des Babors au sud-est de la wilaya de Sétif. Des condamnations à mort, à perpétuité et de lourdes peines de prison de 10 à 15 ans, tel est le verdict prononcé, jeudi, par le tribunal criminel près la cour de Constantine, à l'encontre de 24 membres de katibet Essouna, affiliée à l'organisation criminelle, le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc). Vingt-neuf accusés dont «l'émir» Boubtache Lemtaïche, né à Baraki, le 20 avril 1970, ont été appelés à la barre. Le procès avait débuté mercredi à 11 heures. Un important dispositif sécuritaire dépêché pour l'occasion, a quadrillé hermétiquement la salle d'audience interdite au public. Le visage crispé et le regard douteux parfois absent, les mis en cause semblaient complètement «ailleurs».Le peuple algérien n'oubliera certainement jamais les visages de ces individus en tenues de guerre afghanes, filmés par la Télévision algérienne après leur arrestation par les forces de l'ANP. Ce groupe de terroristes avait été neutralisé, rappelons-le, au mois de mai 2003, après un accrochage ayant eu lieu dans les monts des Babors au sud-est de la wilaya de Sétif au cours duquel une vingtaine de terroristes ont été abattus. Après 21 jours de résistance, le groupe physiquement anéanti, avait le choix entre mourir ou se laisser prendre. Appréhendé donc par les services de sécurité, le groupe passera aux aveux. Plusieurs femmes et enfants ont été délivrés. Selon l'enquête, Katibet Essouna est composée essentiellement d'individus originaires de Sétif, mais aussi d'Alger, Blida et Jijel. La plupart avait rejoint les maquis entre 1992 et 1994. Parmi eux un ancien militaire, radié du corps pour faute grave. Et un cadre du ministère des Affaires étrangères. Il est clair que, c'est là, l'un des dossiers les plus complexes que le tribunal criminel de Constantine avait à traiter. En effet, de très graves accusations ont été retenues à l'encontre des éléments du groupe, à savoir, création, constitution et adhésion à un groupe terroriste, atteinte à la sûreté de l'Etat, destruction de biens publics et privés, utilisation et détention d'armes et de munitions de guerre, acte de sabotage, apologie du terrorisme, subversion, homicide volontaire avec préméditation, vol et viol. Devant le tribunal criminel de première instance, Boubtache Lemtaïche, l'émir du groupe, ne semblait avoir aucun regret en s'étalant sur ses activités terroristes, on dirait même qu'il en était fier. Il avouera avoir planifié et exécuté des attentats contre les militaires depuis son «intronisation» à la tête de la Katibet Essouna et d'autres auxquels il n'avait pas participé, dont deux qui avaient coûté la vie à 15 et 20 militaires, perpétrés à Ziama Mansouriah et Bir Ghazala. Il déclare devant la cour avoir rejoint les maquis en 1992 après la dissolution du FIS. Il était à la tête de seriat Boulekhmès, puis An Nasr après l'élimination de son prédécesseur à ce poste, le sinistre et sanguinaire Habbache, par les forces de sécurité. Il affirme également avoir été à la tête de katibet Echbal Erahmane, composée d'une quarantaine de terroristes sous l'oeil du Gspc, pour finir émir de katibet Essouna. L'accusé avoue avoir tendu une embuscade aux gendarmes des Babors, l'enlèvement de deux adolescents, dont l'un fut égorgé. Il a été aussi l'auteur du guet-apens, tendu à l'ANP au douar Adouba, wilaya de Jijel. Le second accusé Cherik Khaled alias Yacine, lieutenant de Boubtache Lemtaïche, et ancien militaire, radié du corps de l'armée pour faute grave né en 1967 à El-Harrach, appelé à la barre, avoue qu'après avoir égorgé un jeune qui venait d'accomplir son service militaire, il avait rallié le groupe terroriste de Bordj Thar, wilaya de Jijel. Pour rejoindre avec le troisième accusé Madhi Abdsalem alias Essayah né en 1968 à Hussein-Dey, et le quatrième accusé Maâttar Aïssa alias Echauguiti né en 1968 à El Eulma, wilaya de Sétif en 1993 l'AIS. Ils se sont terrés par la suite à Djebel Bouhanche durant une certaine période qui leur permettra de créer une organisation salafiste. A souligner que le quatrième accusé Maâttar Aïssa, est un évadé de la prison de Lambèse. Il activait à Baraki avant de rejoindre les maquis de Jijel au sein du GIA. Il est accusé d'assassinat et d'avoir été l'auteur d'un attentat contre des gendarmes en 1995. Le troisième accusé Madir Abad Salam a, entre 1995 et 2003, participé à plusieurs attentats, dont celui qui a coûté la vie à cinq GLD à Aïn Septe. Il a rejoint le Gspc dès sa création par le tristement célèbre Hassen Hattab. L'audition du reste du groupe avait duré toute la journée du mercredi. Le groupe est accusé d'homicide volontaire, adhésion à un groupe armé et destruction de biens publics et privés. Le réquisitoire du représentant du ministère public a été prononcé en début de soirée. Convaincu de la culpabilité du groupe, le procureur de la République a, à l'issue de son intervention, requis la peine capitale contre les cinq premiers accusés, la prison à vie pour neuf d'entre eux, 15 ans pour 11 et 10 ans pour le 25e et l'application de la loi pour les quatre derniers. 18 avocats avaient assuré la défense, ils ont essayé tant bien que mal d'instaurer «le concept du doute». Selon eux, il y a irrégularité dans la procédure, les services de renseignement avaient exercé une pression sur les détenus pour obtenir des aveux. Pour gagner ce procès, l'un des membres de la défense, maître Aïssous Abdellah avance que l'accusation relative à l'homicide volontaire avec préméditation est infondée, pour absence de preuves tangibles, tel que l'acte de décès et la partie civile. Dans ce contexte, le représentant du parquet en prenant la parole, rappelle à la défense que du moment que c'est l'Etat qui prend en charge les victimes, la partie civile n'a pas à être présente dans ce genre de procès et que les actes de décès existent. Les membres du tribunal, qui se sont retirés pour délibérer, ne prononceront le verdict que jeudi à 11 heures. La cour prononcera la condamnation à mort pour les deux principaux accusés. Ils ont été reconnus coupables entre 1992 et 2003 de création, constitution et adhésion à un groupe terroriste, d'actes de sabotage, de destruction de biens publics et privés, subversion, homicide volontaire avec préméditation, utilisation et détention d'armes de guerre. Les troisième et quatrième accusés ayant bénéficié de circonstances atténuantes écopent d'une peine de prison à vie pour les mêmes chefs d'inculpation. Les cinq derniers accusés seront relaxés, les 21 autres ont été condamnés à 10 et 15 ans de réclusion criminelle, sachant que eux aussi ont bénéficié des circonstances atténuantes.