Finalement, et après plus d'un mois de folie, les prix des viandes blanches sont revenus à des proportions correctes pour le panier de la ménagère. Si la dinde continue encore à s'imposer par un coût excessif, malgré un léger recul, le poulet par contre est passé de 370 à 170 DA le kilo. « Cette situation ne devait pas durer longtemps », dira un vendeur de poulet au marché Boumezzou, qui explique dans ce sens : « Les producteurs de viandes blanches ont cessé de nourrir copieusement leur élevage à quelques semaines de l'Aïd pour créer une fausse rareté afin d'imposer leur diktat pendant plusieurs mois. Malheureusement pour eux, la demande a baissé, et il n'y avait pratiquement plus personne pour acheter de la viande blanche. Résultat : le coût a chuté plus vite qu'il n'est monté, et les producteurs se retrouvent avec un excès de production qu'il va falloir écouler, même si les prix ne sont plus ceux qu'ils escomptaient ». Au marché Boumezzou, et d'autres de la ville, c'est l'euphorie (pour le moment) pour les amateurs de viandes blanches. Abdelmalek, qu'on a croisé chez un revendeur de poulet, est le type même de ce que devrait être un bon homo economicus. « Je n'ai pas consommé de poulet ni de dinde depuis la dernière semaine du Ramadhan, précise-t-il, je n'ai pas voulu participer à l'immense arnaque imposée par les producteurs, et je crois que je n'ai pas eu tort. Je m'en suis abstenu, et aujourd'hui que les prix sont plus décents, j'en consomme à nouveau ». En effet, si la production ne suit pas, les risques d'une autre envolée du prix des viandes blanches n'est pas à écarter pour différentes raisons, dont l'imminence de deux fêtes religieuses, le 1er Moharrem et l'Achoura, deux occasions de consommer du poulet, habitudes culinaires faisant que la demande sur le poulet soit forte, et le retour des hadjs des Lieux Saints, ce qui suppose des fêtes familiales avec toute la cohorte de bons plats qui ne risquent pas de se décliner sans la cuisse de poulet, bien en évidence. Il reste donc que le souk reste et restera fébrile, tant que les autorités concernées ne prendront pas à bras-le-corps la régulation d'un marché livré aux lois de gens peu scrupuleux.