Présent à la 6e réunion régionale portant sur la promotion de la convention de l'Unesco pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, qui s'est tenue les 5 et 6 janvier à Alger, Mounir Bouchenaki, sous-directeur général de l'Unesco pour la culture, vulgarise la pertinence de cet événement. L'Algérie, le premier pays à ratifier la convention de l'Unesco pour la sauvegarde du patrimoine immatériel, a accueilli une réunion régionale, voire internationale. Une symbolique... Cette réunion a plusieurs significations. Elle est d'abord symbolique parce qu'elle se tient à Alger, la capitale du pays qui a été le premier à ratifier cette convention adoptée à l'Unesco en octobre 2003. Elle est symbolique aussi de par un grand expert algérien ayant présidé les travaux du comité intergouvernemental qui a préparé et rédigé la convention. Il s'agit du juge Mohamed Bédjaoui (ancien président de la Cour internationale de La Haye, juriste de renom). Elle est symbolique aussi par cette rencontre réunissant des experts venant du monde arabe, d'Afrique, d'Europe, plus précisément de la Méditerranée et un repésentant du Japon. C'est une réunion qui va sensibiliser l'ensemble des pays arabes - à l'exception de la Syrie qui a déjà ratifié la convention, il y a quelques semaines - à la ratification de la convention. Ce séminaire va avoir un impact d'abord sur la région arabe et africaine. Par analogie au patrimoine culturel matériel, quelle est l'acception ethnologique de celui immatériel ? Nous, à l'Unesco, ne présentons pas cela comme une opposition mais plutôt comme une complémentarité. L'Unesco a effectué un grand travail dans le domaine du patrimoine. L'image de l'Unesco, c'est Abou Simbal, Filé, les grandes campagnes des monuments de Sanaâ, de Fez, Carthage, La Casbah d'Alger. Et depuis quelques années, sous l'autorité du directeur général, Koïchiro Matsuura - il vient du Japon, l'un des premiers pays à avoir préparé les premiers textes législatifs sur le patrimoine immatériel, dès les années 1960 - nous avons travaillé sur un nouveau traité international portant sur la préservation des rites, des danses et chants traditionnels, des coutumes... Aujourd'hui, la convention de 2003 vient s'ajouter à celle de 1972. Quelle serait la mesure d'urgence quant à la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel ? La première urgence est de procéder à un travail méthodologique comme celui tangible (les inventaires, les études systématiques, les textes réglementaires pour la protection...). Les deux plus anciens pays ayant adopté une législation à cet effet sont le Japon et la Corée. Certains langues, dialectes et traditions sont menacés de disparition face à une globalisation à outrance. D'où l'importance d'une convention internationale pour la sauvegarde du patrimoine immatériel. Justement, existe-t-il un fonds en matière de protection du patrimoine immatériel ? Pour le moment, les fonds qui ont été votés par la conférence générale, les fonds du programme ordinaire. Après l'éventuelle signature de la convention (quorum de 30 pays) et son entrée en vigueur, il y aura la constitution d'un fonds qui est similaire au fonds du patrimoine mondial qui relève de la convention de 1972. Ainsi, l'Unesco sera en mesure d'apporter une assistance technique comme elle le fait pour le patrimoine matériel. Nous avons aussi un certain nombre de pays donateurs comme le Japon et la Corée qui apportent des fonds extrabudgétaires pour ce type d'opération. A l'issue de la guerre en Irak, vous avez frontalement interpellé les Etats-Unis concernant l'autodafé babylonien... Justement existe-t-il des fonds à cet effet ? C'était notre devoir. L'Unesco ne pouvait pas rester silencieuse et inactive face à un pillage qui se passait devant nous. Puisqu'il était filmé en direct. Le directeur général m'a donc chargé de conduire deux missions successives en Irak. Nous avons concentré notre travail sur Baghdad, Mossoul, Kirkouk, Nassiria et Bassorah. Et de front, nous avons immédiatement lancé une opération très importante auprès d'Interpol et de toutes les agences internationales, ce qui a permis aux Nations unies, lorsqu'elles ont adopté la résolution de juin 2004, de mettre en lumière la question du pillage du patrimoine culturel irakien comme une des priorités dans la réhabilitation et la reconstruction de ce pays.