L'Algérien est loin de consommer sa ration annuelle de viandes rouges. C'est le constat immédiat tiré du communiqué du ministère de l'Agriculture, rendu public hier. Selon ce document, dans lequel il est question de disponibilité et non de consommation, l'Algérien aurait à sa disposition 14,4 kg de viandes rouges par an. Une quantité qui dépasse de très peu les recommandations de l'OMS qui sont de près de 500 g de viandes rouges par semaine, soit 26 kilos par an. Pour combler ce besoin, la production en viandes rouges devrait tourner autour des 11 millions de quintaux par an. Selon ce communiqué, elle n'a atteint, en 2017, que 5,44 millions de quintaux, pour une valeur de 596 milliards de DA. Dans le détail, ce document précise que la production a été de 3,25 millions de quintaux de viande ovine, de 1,25 million de quintaux de viande bovine, de 0,42 million de quintaux de viande caprine, de 0,1 million de quintaux de viande cameline et de 141 quintaux de viande équine. Les wilayas qui sont sur le podium de la production des viandes rouges sont Djelfa, avec une production de 544 200 quintaux, suivie d'El Bayadh avec 336 990 quintaux, puis Tiaret avec 302 572 quintaux. Pour le cheptel, l'Algérie comptabiliserait 28,4 millions de têtes d'ovins, 1,9 million de têtes de bovins et 5 millions de têtes de caprins. Des chiffres qui sont, selon les spécialistes du marché, bien loin de l'effectif requis pour atteindre l'autosuffisance en viandes rouges. «Il est inconcevable d'avoir autant de superficie disponible sans pour autant l'utiliser à augmenter le nombre de têtes dans toutes les races sources de viandes rouges. Nous devrions à l'heure actuelle être à près de 50 millions de têtes dans la filière de l'ovin. Pour le bovin, les chiffres sont décevants. Ceci, sans compter l'oubli dans lequel sombrent les filières du camelin et du caprin», déclare El Hadj Tahar Boulenouar, président de l'Association nationale des commerçants et artisans algériens (Ancaa). Pour lui, le déficit en matière de viandes rouges est bien visible sur le terrain et n'a point besoin de chiffres pour le prouver. «Il y a deux indicateurs essentiels qui prouvent ce déficit estimé à plus de 5 millions de quintaux. Il s'agit de l'ouverture à l'importation durant les périodes de grande consommation de ce produit, à savoir le mois de Ramadhan ainsi que les prix élevés. Ils tournent autour de 1400 à 1500 DA pour l'ovin et le bovin. Le caprin est souvent indisponible et le camelin encore plus. Ces prix sont nettement plus chers que chez nos voisins», ajoute-t-il avant d'appeler les hautes autorités responsables du secteur à encourager encore plus les investissements, très timides jusque-là, dans cette filière et augmenter le nombre de têtes en orientant les aides vers les éleveurs et aussi les inciter à investir dans toutes les filières des viandes rouges. En effet, c'est une stratégie à long terme qui doit être entamée, selon Tahar Ramram, président de l'association des grossistes de viandes rouges. Pour lui, si nous arrivons tant bien que mal à satisfaire la demande en viande ovine, la filière bovine en est bien loin. «Dans cette filière, l'importation est estimée à 99%. Nous importons le vif, la carcasse et le sous-vide. Si les importations s'arrêtent pour une courte durée, les prix s'envoleront et seront hors de portée. Chose qui est insensée pour un pays comme le nôtre», abonde-t-il avant d'estimer qu'il est aujourd'hui indispensable d'établir une stratégie nationale pour les 10 années à venir en donnant plus d'avantages, notamment dans les crédits, aux éleveurs.