Dénonçant les régimes arabes qui semblent avoir donné un coup de canif à leurs principes, la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) se joint à un groupe d'avocats européens pour déposer une plainte contre Israël pour « crime de guerre », « crime contre l'humanité » et « génocide ». « C'est là un problème de décolonisation qui doit intéresser tous les défenseurs de la démocratie. » Nous prévoyons de déférer le gouvernement israélien devant le tribunal pénal international (TPI) par l'entremise du Conseil de sécurité de l'ONU », a affirmé hier Me Mostefa Bouchachi, président de la LADDH, dans un point de presse animé hier au siège de son organisation. La plainte devrait être déposée au TPI probablement d'ici à lundi. En attendant, tout ce que la société civile arabe peut faire, disent les responsables de la LADDH, c'est d'essayer d'expliquer à l'opinion internationale ce qui se passe réellement dans cette partie du monde. « Si l'on avait eu des Etats démocratiques, on aurait pu faire pression pour agir en faveur de la Palestine. » « Si les régimes arabes étaient démocratiquement élus, Israël n'oserait jamais agresser les Ghazaouis. Les gouvernements arabes dépensent des millions en équipement militaire pour les diriger contre leurs peuples », regrette Me Ali Yahia Abdenour, estimant que les répercussions du « silence complice » des gouvernements arabes se révéleront sur le long terme. « Lorsqu'on touche à la dignité et à l'honneur, les peuples arabes ne peuvent rester les bras croisés, ils vont réagir », dit-il, convaincu. Mais la priorité de la LADDH reste la levée de l'état d'urgence. Ses représentants dénoncent la régression des libertés publiques, à commencer par la liberté d'expression. « De Londres à Paris en passant par Beyrouth, tout le monde a manifesté pour la Palestine. Le seul pays où les manifestations de soutien étaient interdites, c'est l'Algérie au nom de l'état d'urgence qui dure depuis 17 ans », dénonce Me Ali Yahia Abdenour. Sur le chapitre de l'abolition de la peine de mort, les représentants de la LADDH défendent leur point de vue en ces mots : « La justice est rendue par des hommes qui peuvent se tromper. » Ils estiment qu'il est nécessaire de défendre le « droit à la vie ». « Ce que je reproche à Chibane, le responsable de l'Association des ouléma (qui qualifie les défenseurs de l'abolition de mécréants, ndlr) c'est de s'attaquer à ceux qui défendent l'abolition de la peine de mort et d'épargner l'Etat. Ses propos sont d'une intolérance absolue », déclare Me Ali Yahia Abdenour. Pour défendre son point de vue, la LADDH s'appuie sur des statistiques. Dans tous les pays qui ont aboli la peine de mort, dit-on, les chiffres de la criminalité sont restés inchangés. Sur le plan organique, la LADDH travaille à son déploiement sur tout le territoire national. Pour l'heure, les sections de la ligue sont présentes dans 25 wilayas du pays. Les représentants espèrent installer des bureaux dans toutes les wilayas d'ici au mois de juin. Me Ali Yahia Abdenour insiste sur la nécessité d'organiser les réunions au moment voulu et de respecter les statuts de la ligue. « On ne peut tenir aucune réunion publique. Nous avons seulement 50 m2 pour discuter des problèmes qui préoccupent les Algériens », s'indigne-t-il. Le ton de la LADDH reste globalement alarmiste. Un pessimisme que Me Ali Yahia Abdenour résume par cette formule : « Chez nous, il y a une régression des libertés. Dans le monde, il y a une régression de l'humanité. »