Elle était pitoyable la posture du raïs égyptien Hosni Moubarak, samedi soir, quand il intima, faussement autoritaire, à Israël de cesser le feu et de retirer ses troupes de Ghaza. Ce soudain retour sur le droit chemin de la dignité arabe auto-bafouée intervenait quelques heures avant l'annonce officielle du cessez-le-feu par Ehud Olmert. Moubarak savait donc que la machine de guerre d'Israël allait se taire. Le monde entier savait aussi que le cabinet de sécurité d'Olmert allait se réunir pour proclamer un cessez-le-feu unilatéral. Au diable le plan égyptien, semblait dire le Premier ministre israélien. Or, Moubarak était soucieux de brandir l'hypothétique armistice comme un trophée de guerre pour faire passer la pilule de sa compromission. Olmert ne lui a pas donné l'occasion de sortir de son profil bas. Il l'a plutôt enfoncé en précisant dans sa conférence de presse qu'il avait reçu un appel du rais égyptien – qu'il a vivement remercié pour son rôle ! – lui demandant un cessez-le-feu. Mais tout le monde aura compris qu'à défaut de convaincre son interlocuteur de lui accorder le privilège de récolter les dividendes diplomatiques, Hosni Moubarak a mis la puce à l'oreille à son ami Olmert afin de l'associer à la décision. Ceci côté jardin. Côté cour, le président égyptien fit étalage d'une sévérité peu coutumière à l'égard de l'armée israélienne qu'il a invitée à arrêter sa guerre et à rentrer chez elle illico presto. Mais après quoi ? Il était déjà trop tard… Avec le bilan macabre de 1300 morts et plus de 5000 blessés, il n'est certainement plus de bon ton de bomber le torse et d'afficher une « rejelà ». C'est mal placé ! En réalité, la soudaine montée d'adrénaline de Moubarak est plus une réaction de dépit vis-à-vis des responsables israéliens qui sont allés négocier avec les Etats-Unis les termes d'un cessez-le-feu. Le fameux accord entre Rice et Livni sur la lutte contre le trafic d'armes à la frontière avec Ghaza est en l'occurrence un autre camouflet diplomatique pour Moubarak. Pour cause, cet accord israélo-américain devrait fatalement s'appliquer à l'Egypte voisine de Ghaza. Même si son ministre des Affaires étrangères, Abou El Gheit, s'est empressé de signifier que son pays n'était pas concerné par le deal, il est clair que Le Caire est touché en plein cœur. Mais Moubarak ne désespère pas de tirer son épingle du jeu. C'est pourquoi il a convoqué hier – au pied levé – un sommet à Charm El Cheikh pour le soutien international « au plan égyptien ». Ses invités ? Les présidents des pays européens, ses deux amis rois « modérés », de l'Arabie Saoudite et de la Jordanie ainsi que son homme de main à la Ligue arabe Amr Moussa. Et pour couper l'herbe sous le pied de la conférence du Koweït et absorber son ordre du jour, le rais convoque – encore – une conférence internationale sur la reconstruction de Ghaza…