Alerte d'urgence ! Ne bois plus l'eau du robinet. Il contient le virus du choléra, faites passer l'information». Ce genre de message fait le tour des réseaux et est relayé par le plus grand nombre. Mode panique activé suite à la confirmation, hier, lors d'une conférence de presse à l'Institut national de la santé publique (INSP) à Alger, via son directeur central de la prévention Djamel Fourar des 41 cas de choléra, en plus d'un décès sur les 180 cas suspectés parmi les personnes qui ont été hospitalisées à Alger, Blida, Tipasa et Bouira. La même source a précisé que les cas de choléra enregistrés dans quatre wilayas du pays étaient des cas «isolés et limités à des familles», soutenant que la situation était «maîtrisée». La majorité des cas ont été enregistrés à Blida, où 22 sur les 41 patients suspectés ont été confirmés. 11 autres cas ont été confirmés parmi 18 patients à Tipasa, 1 cas sur 6 à Bouira et 5 cas parmi 14 patients à Alger, selon le rapport de cet institut. Lors de son intervention, Le directeur général de l'Institut Pasteur, le Dr Zoubir Harrath, parle de «courage politique». «Le choléra est présent au Yémen, au Tchad et au Niger. En Algérie, certaines maladies, dont le choléra, doivent être obligatoirement déclarées. Et déclarer l'épidémie elle-même est un courage politique», avait-il souligné. Cette déclaration aurait effectivement pu être assimilée à du courage si elle avait été annoncée en temps et en heure. En effet, selon une source médicale, «les premiers cas de choléra ont bel est bien été confirmés il y a d'une dizaine de jours». Certains spécialistes s'interrogent même sur les raisons qui ont poussé les autorités compétentes à communiquer aussi tardivement. «Nous aurions pu communiquer cette information dès la confirmation des premiers cas. D'autant plus que nous avons les moyens de faire face à cela. Les sérums physiologiques ne manquent pas. Idem pour les antibiotiques. Il fallait alerter la population bien plus tôt», conclut la même source. «Comment peuvent-ils dire que les dispositions nécessaires ont été prises sans alerter la population ?» s'interroge le spécialiste. Le choléra, cette infection très contagieuse, à transmission féco-orale qui entraîne la mort suite à des diarrhées aiguës, est causée par le bacille Vibrio cholerae, qui se propage en l'absence d'hygiène ou suite à la consommation d'eau ou de fruits et légumes contaminés. D'ailleurs, l'hypothèse de la contamination par l'eau a vite été écartée. Le directeur général de l'Institut Pasteur, le Dr Zoubir Harrath, a affirmé que les analyses bactériologiques effectuées par l'Institut sur des échantillons prélevés sur des personnes atteintes ont confirmé que l'épidémie du choléra s'est propagée en raison du non-respect des règles d'hygiène concernant la consommation de certains aliments, excluant une contamination liée à la consommation d'eau. Une information confirmée par le Dr Youcef Tarfani, sous-directeur au ministère de la Santé qui assure : «Les analyses de l'eau se sont révélées négatives». Pour ce qui est des voies de contamination, le Dr Mohamed Yousfi, chef de service des maladies infectieuses à l'hôpital de Boufarik, énumère : «Une personne peut en contaminer une autre via les mains sales. Aussi, la contamination peut également se faire via des aliments souillés. Il y a également ce qu'on appelle des personnes saines porteuses du virus. Ces personnes ne sont pas symptomatiques, mais sont contagieuses.» Quant au fait de déterminer si une personne est contagieuse ou pas, le spécialiste assure que «c'est seulement dans le cadre d'une enquête de cas qu'on procède à des prélèvements au sein d'une famille afin de savoir qui est malade ou pas. Le but est de rompre la chaîne de transmission.» Prise en charge Le souci avec le choléra est l'urgence. «Le problème avec le choléra, c'est le nombre de malades à prendre en charge à la fois. Autrement, les traitements sont simples et efficaces. Les patients nécessitent des soins intensifs accompagnés de mesures d'hygiène draconiennes. Le traitement, c'est une antibiothérapie adaptée avec hydratation par des solutés», assure Ahmed Benfares, président du l'Ordre des pharmaciens de la région de Blida. Un avis confirmé par le Dr Yousfi qui assure que les personnes symptomatiques doivent être prises en charge dans les plus brefs délais. Pour l'heure, le Dr Fourar a rassuré que la situation «n'est pas inquiétante et ne nécessite pas l'instauration d'un état d'urgence», appelant les citoyens au respect des règles d'hygiène. Le Dr Youcef Tarfani conseille à toute personne souffrant d'une diarrhée aiguë d'aller consulter très rapidement et ne pas se contenter de l'automédication. Le spécialiste conseille également de prendre beaucoup d'eau afin d'éviter la déshydratation : «Il est également indiqué de prendre des sels de réhydratation sous forme de sachets standard de SRO par voie orale et de se laver les mains fréquemment avec du savon liquide, rincer les fruits et les légumes avant leur consommation et s'abstenir de rendre visite aux malades atteints de choléra dans les hôpitaux.» De son côté, un biologiste recommande de faire bouillir l'eau du robinet avant de la boire, laver les fruits et légumes avec de l'eau avec deux gouttes d'eau de javel et éviter de consommer les pastèques et les sorbets. Par ailleurs, Ahmed Benfares estime qu'il est grave de revenir sur des maladies qu'on n'a pas vu depuis le début des années 80'. «Le manque d'hygiène et les problèmes d'étanchéité des canalisations d'eau potable et des égouts peuvent être les raisons de propagation d'une telle maladie», conclut-il. De son côté, Youcef Tarfani assure que l'hypothèse de voir un virus refaire surface n'est pas à écarter si les mesures d'hygiène ne sont pas respectées.