Un mort et 41 cas confirmés, c'est ce qu'a annoncé, jeudi dernier, le ministère de la Santé sur la réapparition étonnante et non moins déconcertante, pour l'opinion publique, du choléra, une maladie que tout le monde croyait disparue, en Algérie. Les cas annoncés d'intoxication depuis le début du mois d'août sur des symptômes d'une mystérieuse maladie dans les wilayas de Blida et Bouira, se sont avérés être dus au choléra. Ce que viennent de reconnaître, un peu tardivement, selon des spécialistes, les Autorités sanitaires nationales, qui annoncent le décès d'une personne, à Blida. Dans une conférence de presse, tenue jeudi, le directeur de la Prévention au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Djamel Fourar, a reconnu l'apparition de cas de choléra, enregistrés dans les wilayas d'Alger, Blida, Bouira et Tipaza, mais, qui sont des cas «isolés et limités à des familles». Dans son intervention, avec des cadres du ministère et le directeur général de l'Institut Pasteur d'Algérie (IPA), pour s'expliquer sur les cas de choléra enregistrés dans ces quatre wilayas où un décès et 41 cas ont été enregistrés sur 88 cas suspects, le Dr. Fourar a affirmé que la situation était «maîtrisée». Il a, surtout, confirmé le décès d'une personne à Blida. Cette personne «est décédée, mercredi soir, à l'hôpital de Boufarik, suite à une intoxication aiguë dont l'origine reste pour le moment indéterminée», avait indiqué le directeur, par intérim, de la Santé de la wilaya de Blida. Selon le Dr. Fourar, la situation «n'est pas inquiétante et ne nécessite pas l'instauration d'un état d'urgence», avant de rappeler le respect des règles d'hygiène. De son côté, le directeur général de l'IPA, le Dr. Zoubir Harrath, a exclu toute relation avec l'eau, incriminant le manque d'hygiène et la consommation d'aliments et fruits contaminés. Selon lui, les analyses bactériologiques effectuées par l'Institut sur des échantillons prélevés sur des personnes atteintes ont confirmé que l'épidémie de choléra s'est propagée en raison du non-respect des règles d'hygiène, concernant la consommation de certains aliments, l'eau n'étant pas en cause. «Les analyses en cours, à l'Institut Pasteur, sur les aliments consommés par les familles atteintes de choléra révéleront prochainement, les causes réelles de cette épidémie», a-t-il ajouté. Mais, dans son intervention, pour rassurer l'opinion publique, il a comparé la situation en Algérie à celle du Yémen, du Tchad et du Niger en affirmant, catégorique, que «les cas de choléra ne concernent pas uniquement l'Algérie». «Il y a certains pays qui ont enregistré des cas de choléra au début de l'année en cours, comme le Yémen, le Tchad et le Niger», a-t-il ajouté, avant de préciser que «certains pays ne déclarent pas les cas de choléra. En Algérie, c'est une maladie à déclaration obligatoire. On a eu le courage de le déclarer». Pour sa part, le Dr. Youcef Tarfani, sous-directeur au ministère de la Santé, a donné un peu plus d'informations sur les différents cas enregistrés dans les 4 wilayas : 6 cas ont été recensés à Ain Bessam (Bouira) dont 3 confirmés, 50 cas à Blida dont 22 confirmés, 18 à Tipaza dont 11 confirmés et 14 cas, à Alger, dont 5 confirmés. Le directeur de la Santé de la wilaya d'Alger, Dr. Mohamed Miraoui, a révélé que 10 cas sur 14 admis à l'hôpital El Kettar' ont quitté ce dernier, tandis que les 4 autres quitteront l'hôpital ce samedi. Quant au directeur de la Santé de la wilaya de Blida, Ahmed Djemai, il a annoncé que 12 cas sur 74 ont quitté l'hôpital de Boufarik, ajoutant que l'état de santé des autres malades «s'améliore progressivement» et ils devront quitter l'hôpital dans les prochains jours. C'est à Blida que la victime de cette épidémie a été enregistrée, le décès ayant été constaté à l'hôpital de Boufarik. Des résultats pas communiqués à temps ? Pour autant, ce qui est troublant dans cette affaire, c'est que le ministère et l'IPA avaient des soupçons au sujet de l'épidémie. Selon des informations parvenues de l'hôpital d'El Kettar d'Alger, spécialisé dans les maladies infectieuses, tout comme celui de Boufarik, pour la wilaya de Blida, les 2 autorités sanitaires étaient, parfaitement, au courant des résultats des analyses d'au-moins une partie des malades atteints de choléra depuis les premiers cas déclarés, à la mi-août. En fait, l'hôpital d'El Kettar où étaient hospitalisées, depuis la semaine dernière, une quinzaine de personnes qui présentaient des symptômes de forte suspicion de choléra, avait transmis des demandes d'analyses, afin de confirmer la maladie. Fait curieux, les résultats n'ont pas été communiqués à temps aux équipes médicales, selon des sources internes. A l'hôpital d'El Kettar, sur les hauteurs de Bab El Oued, près de La Casbah d'Alger, 5 cas ont été confirmés sur 14 suspects, selon le ministère de la Santé. Pour autant, les équipes médicales de cet établissement hospitalier auraient dû recevoir les résultats plus tôt. Devant le temps mis pour la transmission des résultats demandés, elles ont, donc, préconisé des traitements sur des bases cliniques et symptomatiques, selon des sources de l'hôpital, proches du choléra et les cas suspects placés dans un service isolé, vidé des autres patients. Selon le ministère de la Santé, l'enquête est menée sur les raisons de ces cas. La semaine dernière, un «branle-bas de combat» avait été enregistré dans la ville de Blida et la daïra de Bougara, à la suite d'un nombre impressionnant d'intoxications : 5 à Blida et 448 à Bougara. Mais, la direction de la Santé de la wilaya a écarté tout danger, estimant, selon les propos du directeur de la Santé de la wilaya M. Djemai, que les 5 cas de Blida, une famille habitant un bidonville, auraient été victimes d'une «intoxication sévère, suite à la pollution de l'eau potable au vu des conditions de vie précaires». Il a réfuté, également, que «les eaux du robinet étaient polluées», précisant qu'une délégation ministérielle a été dépêchée, sur place, pour s'enquérir de l'état de santé de ces personnes. «Toutes les mesures de précaution ont été prises pour empêcher l'apparition de cas similaires», a-t-il souligné. Ces cas ont été enregistrés, quelques jours seulement, après l'intoxication de 448 personnes habitant la commune de Bougara (est de la wilaya), qui auraient été victimes d'une eau polluée, selon toujours M. Djemai. Il a expliqué que ces personnes ont été atteintes d'intoxication, suite à la consommation d'une eau dont les analyses ont démontré qu'elle contenait des bactéries «coliformes», qu'il a qualifiées de «bactéries simples et pas dangereuses». Par la suite, il a changé sa version, après un démenti de l'Algérienne des Eaux, et a incriminé la qualité des fruits consommés.