Si pour le ministre des Finances, Abderrahmane Raouia, le cadre juridique actuel est suffisant pour accompagner le développement de la finance islamique, pour les acteurs de cette finance, il y a lieu d'apporter les ajustements adéquats. Ce que le gouvernement s'engage à faire en attendant l'élaboration d'un nouveau règlement pour mieux encadrer la gestion des produits financiers dits alternatifs au niveau des banques et établissements financiers. Le nouveau régime juridique qui permet aux banques publiques de commercialiser les produits de la Finance islamique (fi) est en phase d'élaboration, alors que ces produits étaient annoncés pour cette année. L'autre dossier sur lequel se penche actuellement le département des Finances concerne le cadre juridique organisationnel visant à faciliter et à élargir les transactions financières islamiques, notamment l'émission des emprunts souverains et la création de mutuelles d'assurance et de réassurance. Dans cette perspective, des institutions britanniques activant dans ce segment ont été sollicitées pour apporter leur appui. Un appui également attendu de la Banque islamique, dont une délégation se déplacera prochainement en Algérie pour définir les premières mesures nécessaires afin d'assurer le cadre approprié pour proposer ces nouveaux produits financiers. «Le besoin se fait ressentir. D'où l'importance de mettre en place un cadre légal», nous dira à ce sujet un acteur du secteur, pour qui le plus important est qu'il y ait cette prise de conscience quant à la nécessité de développer la FI, même si certains produits spécifiques, dans ce cadre, existent déjà avant l'annonce de la décision d'ouverture de ces fenêtres dans les banques publiques. Un point relevé dans l'étude du Forum des chefs d'entreprise (FCE) rendue publique en mai dernier. «Sur le plan légal, les obstacles ne sont pas insurmontables. Il faut apporter des modifications aux codes civil et fiscal et à la loi sur la monnaie et le crédit pour prendre en charge les spécificités de la finance islamique», a recommandé Lachemi Siagh, expert financier international, qui a mené cette étude. L'exonération de l'opération de garantie des vices cachés, la clarification du régime de la location-vente et le refinancement en matière de crédit-bail sont parmi les propositions émises à ce sujet. Il s'agit aussi, selon la même source, d'éviter la double taxation et les frottements fiscaux de l'opération achat/vente. «L'Algérie ne doit pas rester en dehors de ce mouvement. La finance islamique est une activité qui se généralise dans les quatre coins du monde. Elle s'inscrit plus largement dans le courant universel de la finance éthique et devient un phénomène en voie de mondialisation. Il est par conséquent dans l'intérêt économique de notre pays de s'y mettre au plus tôt», a conclu l'étude en question. Mais, il faudrait lever l'ambiguïté concernant la compréhension, par les banques, des procédures liées aux produits alternatifs, comme l'a souligné la Banque d'Algérie. Côté assurances, c'est également l'attente du feu vert du ministre des Finances. En dehors de Salam Assurances, qui active dans le domaine de l'assurance Takaful des biens, aucune compagnie en Algérie ne traite ce volet. Dans ce cadre, une société d'assurance de personnes (Family Takaful) est en cours de constitution entre la Banque Al Baraka Algérie, Al Salam Bank Algeria, la BADR, la BDL, la CNEP-Banque, Amana Assurance Algérie, la Société jordanienne d'assurance islamique et le wakf relevant du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs. «Les fondateurs sont dans l'attente de l'accord du ministère des Finances pour le lancement des activités de la société», apprend-on d'une source précisant que le dossier est fin prêt et qu'une fois lancée, cette société permettra de contribuer au développement de ce segment, surtout que la pénétration de l'assurance des personnes reste faible. Sur une production globale de 39,37 milliards de dinars au premier trimestre 2018 contre 36,42 milliards à la même période de 2017, la part des assurances des personnes (accidents, maladie…) n'a été que de 3,3 milliards, soit 8,38%. Ces questions seront au menu du premier Symposium algérien de l'assurance et de la finance islamique (SAAFI 2018) qui se tiendra les 24 et 25 novembre prochain à Alger, et dont le but est de faciliter les efforts des pouvoirs publics pour assurer l'implantation de la FI et de l'assurance Takaful. Il s'agit aussi d'apporter aux institutionnels et aux professionnels du secteur bancaire, assurantiel et financier, l'expertise indispensable à la réussite de ce nouveau défi, selon les organisateurs de cette rencontre.