L'OPEP, qui représente la moitié de l'offre mondiale de pétrole, et ses alliés, dont le géant russe, n'ont pas jugé bon d'augmenter le niveau de leur offre sur le marché, malgré la menace exprimée jeudi dernier par Donlad Trump à l'encontre des monarchies du Golfe. La réaction du marché à la réunion du comité de suivi de l'accord de l'OPEP et ses alliés n'a pas tardé à venir. Le prix de l'or noir a atteint un record jamais égalé depuis 2014, en tutoyant, hier à l'ouverture hebdomadaire du marché, la barre des 81 dollars le baril. La décision de l'OPEP et ses alliés de ne pas céder aux pressions américaines pour une hausse de la production a eu pour effet de booster le cours du baril de brent de référence à Londres, qui a bondi de 1,80 dollar pour atteindre 80,94 dollars à 8h40 GMT, puis 80,60 dollars à 9h45 GMT. L'Organisation des pays exportateurs de pétrole, qui représente la moitié de l'offre mondiale de pétrole, et ses alliés, dont le géant russe, n'ont pas jugé bon d'augmenter le niveau de leur offre sur le marché, malgré la menace exprimée jeudi dernier par Donlad Trump à l'encontre des monarchies du Golfe. Le président américain, qui misait sur une baisse des prix du pétrole et contenter par la même occasion les électeurs de son pays pour les prochaines élections de mi-mandat, notamment en leur garantissant une baisse des prix de l'essence, n'a pas eu gain de cause et semble lui-même un des facteurs de la hausse des prix de l'or noir, dont la courbe ascendante est surtout motivée par les sanctions américaines contre l'Iran, troisième grand producteur de l'OPEP. «Il est clair que les Etats-Unis mettent la pression sur les pays qui importent du pétrole iranien. Les importations coréennes, par exemple, ont pratiquement chuté à zéro, avant même l'entrée en vigueur des sanctions visant directement les exportations de pétrole de Téhéran prévues pour début novembre prochain», commente Naeem Aslam, analyste chez Think Markets. La décision de l'OPEP a pris de court certains investisseurs qui tablaient sur une obéissance aveugle de l'organisation à l'injonction de Trump. L'analyste Tamas Varga de chez PVM dit s'attendre d'ailleurs à une nouvelle déclaration du président américain contre l'OPEP, surtout après avoir vu la réticence saoudienne d'obtempérer à son appel. Le ministre saoudien de l'Energie, Khalid El Faleh, a adopté un ton prudent et a jugé «prématuré d'estimer ce que sera le niveau de production en 2019, et la hausse de la production serait improbable, sauf surprise concernant l'offre ou la demande». L'analyste Tamas Varga de PVM a décrypté cette sortie du ministre saoudien en disant que «les barils iraniens ne vont pas être remplacés et avec le déclin significatif de la production vénézuélienne, il n'est pas étonnant que les plus hauts de l'année aient été franchis». D'autres analystes, et pas des moindres, des géants du négoce comme Mercuria Energy Group Ltd et Trafigura Group sont plus optimistes pour la courbe des prix et vont même jusqu'à prédire un baril à 90 à la fin 2018 et même plus de 100 dollars au début de l'année 2019, et la raison essentielle serait sans aucun doute les sanctions américaines contre l'Iran. Bank of America Merrill Lynch rejoint aussi JP Morgan Chase & Co pour prévoir un baril à 95 dollars au premier semestre de l'année prochaine. Le marché a du mal à remplacer les approvisionnements iraniens qui étaient de près de 2,5 barils par jour. «Il s'agit d'un problème qui s'aggrave. Les techniques et les fondamentaux semblent aller dans la bonne direction pour le moment et cela peut être un cocktail très puissant», analyse Saxo Bank A/S. L'Arabie Saoudite – qui a été la première en juin dernier à appeler à une hausse de la production, suivie par la Russie – préfère aujourd'hui adopter une posture plus en phase avec la réalité de l'offre et de la demande sur le marché. «Le marché est bien approvisionné. L'Arabie Saoudite n'a pas à augmenter davantage, parce que tous nos clients reçoivent tous les barils qu'ils veulent», disait, avant-hier à Alger, le ministre saoudien. Quelle sera la réaction de Donald Trump face à une hausse encore plus importante des prix ? Il ordonnera probablement, disent les analystes, de puiser dans les réserves stratégiques de pétrole, surtout avant les élections de mi-mandat. La longue marche de l'OPEP depuis 2014 En 2014, une chute importante des prix a fait plonger le marché pétrolier dans une perturbation constante. En décembre 2016, un accord a été signé par les membres de l'OPEP et dix autres producteurs de pétrole, dont la Russie, afin de réduire l'offre de pétrole sur le marché. L'application depuis janvier 2017 de cet accord a eu pour effet de maintenir les prix au-delà de la barre psychologique de 50 dollars. Depuis début 2018, la moyenne des cours du brent est de 70 dollars, ce qui est pour contenter les producteurs et exportateurs de pétrole ainsi que les investisseurs. Mais le marché pétrolier reste plus que jamais soumis à de grandes pressions. Entre les données économiques de l'offre et la demande mondiale, et les influences géopolitiques, producteurs et consommateurs ne demandent qu'une chose : «Un marché stable.» Cette stabilité est toutefois fragilisée par différents facteurs, notamment géopolitiques, touchant directement des membres de l'organisation pétrolière OPEP. L'alliance de cette dernière avec dix autres producteurs mondiaux, notamment la Russie, n'est pas pour plaire aux Américains qui tentent par tous les moyens de casser leur dynamique. L'accord arrivera à sa limite à la fin de l'année en cours et seules les données du marché d'ici décembre pourront déterminer s'il sera reconduit ou prendra-t-il une nouvelle forme. Outre le dossier iranien, le marché restera attentif à l'évolution de la situation de banqueroute au Venezuela, mais aussi au conflit libyen. Avec la «disparition» du marché des 2 millions de barils/jour de l'Iran, la baisse vertigineuse des quotas du Venezuela et l'éparpillement de la production libyenne, l'OPEP aura fort à faire pour maintenir la stabilité sur le marché. L'entrée en vigueur des sanctions américaines en novembre prochain risque de faire monter les prix à des niveaux record dépassant 100 dollars. Une hausse qui n'est pas dans l'intérêt des exportateurs ni celui des importateurs de pétrole, car elle risque de provoquer une récession de l'économie mondiale et affaiblir les niveaux d'investissement.