Dès l'annonce officielle des résultats du scrutin présidentiel de dimanche dernier, le nouveau président Palestinien Mahmoud Abbas s'est dit impatient de reprendre les négociations avec Israël. « Nous tendons la main à nos voisins », a-t-il dit. « Nous sommes prêts pour la paix, une paix fondée sur la justice. Nous espérons que leur réponse sera positive. » Le président palestinien a appelé à une reprise du processus de paix fondée sur l'application de la Feuille de route, le dernier plan de paix élaboré par le Quartette (Etats-Unis, Union européenne, Russie, ONU). Ce plan qui n'a pu être appliqué à cause de la violence qu'a vécue la région proche-orientale prévoit la création cette année, d'un Etat palestinien indépendant et viable sur les territoires occupés en 1967. Israël qui a annoncé officiellement par le biais de son Premier ministre Ariel Sharon, accepter les termes de ce plan mais avec ses réserves (Plus de 14), a tout fait pour le saboter. Sans aucune ambiguïté, Abbas agit donc fidèlement à la ligne politique qu'il a annoncée au cours de sa campagne électorale. Il aspire à un règlement de la cause palestinienne par un règlement politique, loin de la lutte armée et ce malgré les déboires qu'a subis le premier processus de paix signé en 1993 entre l'OLP et Israël. Les accords d'Oslo dont il est l'architecte, qui ont permis la mise sur pied de l'Autorité palestinienne, ont subi un échec retentissant, car après plus de 10 ans, le peuple palestinien se retrouve dans une situation peut-être pire que celle qui a précédé la signature des accords en question. L'échec des négociations sur les questions cruciales de ce conflit et le massacre israélien sur l'esplanade d'El Aqsa en septembre 2000 ont entraîné une révolte populaire qui n'a pas cessé depuis. Plus de 3000 Palestiniens ont été tués au cours de cette Intifadha, l'économie palestinienne agonise, la pauvreté s'est amplifiée parmi la population, la Cisjordanie a été entièrement réoccupée, Israël y a même édifié un mur de séparation qui lui permit d'annexer de facto près de la moitié des terres. Il représente en fait une nouvelle frontière qu'Israël veut imposer aux Palestiniens. Quant à la bande de Ghaza qui a vécu des tueries effroyables et dont la population ressemble beaucoup à celle d'une grande prison, ce n'est pas un endroit où il fait bon vivre. Cette situation et la faiblesse des secrétaireries palestiniennes qu'Israël a tout fait pour démolir, espérant voir le chaos s'installer dans les territoires, a entraîné l'émergence de plusieurs groupes armés dont les plus importants sont rattachés aux mouvements radicaux tels que le Hamas et le Djihad islamique ainsi qu'au Fatah lui-même considéré comme le parti au pouvoir. Ces groupes armés responsables de toutes les opérations militaires contre Israël, qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur du territoire israélien ont pris beaucoup d'ampleur au point de mettre au défi l'Autorité elle-même. Ce sont justement ces groupes armés et les mouvements politiques auxquels ils sont affiliés que Abbas doit convaincre du bien-fondé de sa pensée. Cette question représente le principal défi auquel il est confronté. Abbas doit utiliser tout son savoir et son habileté politique afin d'arriver à un compromis avec les mouvements qui prônent la résistance armée. Certains dirigeants du Hamas ont même annoncé que le résultat du vote ne permet pas à Abbas de décider à lui seul du devenir de la résistance armée. Abbas qui, au cours de sa campagne électorale a appelé à l'union nationale doit, à l'image du défunt président Arafat, qui n'a jamais cédé aux pressions israéliennes ou autres, tout faire pour éviter une guerre fratricide dans les territoires. La négociation doit rester le seul moyen de persuasion. Recourir aux armes serait un suicide collectif. Cela ne veut nullement dire que toute la responsabilité de la réussite d'un tel débat incombe à Abbas seul, loin de là. Ces mouvements radicaux qui ont appelé au boycott des élections présidentielles doivent respecter le choix du peuple qui en votant pour Abou Mazen (nom de guerre de Abbas) a aussi voté pour son programme politique. Si l'on dénie à Abou Mazen le droit d'imposer ses convictions par la force, il en est de même avec les autres parties. Réussira-t-il ou non à mener son peuple vers la paix et la liberté. Soyons patients.