Les députés de la majorité présidentielle au sein de l'Assemblée populaire nationale sont à l'origine d'une «fronde» qui vise le premier d'entre eux, en l'occurrence le président de l'institution, Saïd Bouhadja. De quoi surprendre et laisser dubitatif plus d'un, quand on sait comment fonctionne cette «alliance» habituée à marcher comme un seul homme aux injonctions du Palais. En effet, ils seraient plus de 300 élus du FLN, du RND, du MPA, du Taj et des indépendants à demander le départ du troisième personnage de l'Etat de son perchoir, et ce, dans une confusion des genres, la plus totale, tout aussi édifiante qu'incongrue, d'autant plus qu'elle émane de représentants de la nation appelés à voter les lois et à le faire en connaissance de cause. Il y a de quoi être inquiet pour l'avenir de l'institution. On l'a déjà été, il y a quelques semaines, avant la clôture de la précédente session parlementaire, lorsque des députés du RND ont manifesté dans les couloirs de l'hémicycle en signe de solidarité avec l'un des leurs, celui de la wilaya de Tipasa, soupçonné de corruption. Un comble, car cette solidarité de corps entre des élus de la nation n'a eu comme effet auprès de l'opinion que de laisser la désagréable impression d'impunité totale des élus et que l'on devait les considérer au-dessus de tout soupçon, donc au-dessus des lois… Ces «manifestants» d'un genre nouveau, habitués à dire oui à toute injonction qui vient d'en haut, entendaient ainsi protester contre toute poursuite contre leur collègue, qui est pour eux blanc comme neige, écartant toute suspicion à son encontre pouvant entraîner son exclusion du parti et autre poursuite judiciaire. C'est dire le degré de compréhension de l'impunité par ces députés et sans doute de bien d'autres, alors que l'opinion publique s'attendait à les voir assumer leur rôle sur d'autres questions autrement plus importantes en interpellant le gouvernement sur des faits et des événements graves qui se sont déroulés au cours de l'été, comme l'épidémie de choléra, la condamnation en Italie de personnes mises en cause dans l'affaire Sonatrach-Saipem ou encore la cession, avortée semble-t-il, des parts détenues par le partenaire espagnol dans l'entreprise Fertial à un opérateur privé national, proche du cercle présidentiel, dans l'opacité la plus totale. Ainsi, l'idée du FFS d'une commission d'enquête parlementaire sur le choléra n'a trouvé que peu d'écho dans les travées de l'APN, où on lui a préféré toute juste une mission d'information qui n'aurait somme toute que valeur symbolique. Quant à savoir pourquoi, suite au procès italien de Saipem-Sonatrach, la justice algérienne ne s'est pas intéressée à Farid Bedjaoui, l'intermédiaire algérien qui aurait reçu des commissions de 197 millions d'euros dans la passation des contrats entre Sonatrach et Saipem, l'idée ne semble même pas avoir effleuré quiconque de cette majorité «présidentielle». Tout comme les péripéties du fameux mandat d'arrêt contre l'ancien ministre de l'Energie, Chakib Khelil, blanchi et lavé de tout soupçon par la volonté du pouvoir, ne semblent pas avoir suscité leur curiosité. Rien d'étonnant pour la majorité parlementaire : il ne faut surtout pas froisser l'Exécutif auquel beaucoup de ceux qui la composent lui sont redevables.