Plusieurs eurodéputés ont appelé au respect et à l'application des arrêts de la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) qui stipulent expressément que le territoire du Sahara occidental est «distinct et séparé» du royaume du Maroc et que par conséquent les accords UE-Maroc n'y sont pas applicables. Lors d'un triple débat mardi dernier à Bruxelles, organisé au niveau des commissions des affaires étrangères, de l'agriculture et du développement rural et de la pêche du Parlement, les députés européens ont mis en exergue leurs projets d'avis respectifs concernant la proposition du Conseil relative à l'extension des préférences tarifaires au territoire du Sahara occidental via les modifications des protocoles dans l'accord d'Aassociation UE-Maroc. Le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, Anders Primdahl Vistisen, a mis en relief le soutien de l'UE aux efforts des Nations unies visant à assurer un règlement juste, durable et mutuellement acceptable du conflit du Sahara occidental, sur la base du droit à l'autodétermination et conformément aux résolutions pertinentes en la matière. Pour sa part, l'eurodéputé allemand Klaus Buchner a regretté la position «choquante» de l'UE et le détournement des arrêts de la CJUE concernant un territoire illégalement occupé sur lequel le Maroc n'a aucune souveraineté, dénonçant les manipulations sémantiques auxquelles se livrent les institutions européennes en ayant recours à la terminologie erronée de «population locale» en lieu et place de «peuple du Sahara occidental». Condamnant les violations répétées des droits de l'homme dans les territoires occupés du Sahara occidental, M. Buchner a révélé que certains membres la délégation de la commission du commerce international du Parlement européen qui a effectué une mission au Sahara occidental les 3 et 4 septembre dernier, qui ont souhaité approcher des ONG véritablement représentatives du peuple sahraoui, ont tout bonnement été empêchés puis menacés par la police marocaine. Le Front Polisario, seul interlocuteur légitime Au niveau de la commission agriculture, l'eurodéputé français Michel Dantin a formulé des réserves sur la pertinence, au plan douanier et commercial, de la distinction opérée par le nouvel accord entre les produits originaires du Sahara occidental et du Maroc. L'eurodéputée allemande Maria Noilchl a, quant à elle, relevé qu'en plus de violer le droit international, la démarche juridique européenne berne les consommateurs de l'UE en ce qu'elle bafoue leurs droits en termes de transparence et d'étiquetage des produits. Selon la députée espagnole Ana Miranda la Commission a agi à l'encontre des arrêts de la CJUE, «passant par une porte dérobée» en allant négocier avec le Maroc alors que l'accord de pêche doit être signé avec le Front Polisario. De son côté, la députée suédoise et vice-présidente de la commission pêche, Linnéa Engstrom, a rappelé que le Maroc ne dispose d'aucune souveraineté sur le Sahara occidental en s'interrogeant, à l'adresse de la Commission, sur le fait que le Maroc établit des certificats de capture de pêche et vétérinaires sur des produits issus du Sahara occidental. De son côté, l'eurodéputée suédoise Bodil Valero a déconstruit la validité de la prétendue consultation menée par la Commission européenne et le Service européen pour l'action extérieure (SEAE), affirmant «c'est auprès du Front Polisario, reconnu par l'ONU et l'UA en tant qu'interlocuteur légitime et unique du peuple sahraoui, que l'UE doit obtenir le consentement et non pas de la part des colons des territoires occupés». L'eurodéputée espagnole Maria Lidia Senra Rodriguez s'est offusquée, pour sa part, de la méthode suivie par l'UE dans sa prétendue consultation du peuple sahraoui. Elle s'est interrogée sur ce que pense le peuple sahraoui de cette question. Pour sa part, le député portugais Antonio Marinho Pinto a rappelé la responsabilité historique de l'Espagne dans la situation actuelle au Sahara occidental et a plaidé pour une implication et un engagement de l'UE pour trouver une solution politique à ce conflit. En rappel, le président de la commission pêche, Alain Cadec, qui a accueilli les membres du Front Polisario en leur qualité de représentants du peuple du Sahara occidental, a déploré l'absence du représentant du SEAE, Vincet Piket, lors de l'échange avec les représentants du Front Polisario. Arrivé plus tard, il lui a exprimé son irritation et sa désapprobation pour une telle attitude.