T. Nacéra, 34 ans et B. Baroudia, 44 ans, reflètent fidèlement le portrait des femmes que l'on rencontre généralement le soir à l'intérieur et aux abords des débits de boissons et autres estaminets des grandes villes. Elles devaient répondre, en ce début du mois de décembre 2008 devant le tribunal criminel d'Oran, du chef d'accusation d'assassinat. Tout dans leur attitude indiquait qu'elles n'éprouvaient aucun remord à l'égard de leur victime, A. O. Jamel en l'occurrence, âgé de 33 ans à l'époque des faits. Selon l'arrêt de renvoi, une année auparavant, presque jour pour jour, A. O. Jamel faisait le pied de grue au niveau de la place Valéro, à quelques pas du siège de l'hôtel de ville d'Oran. En fait, A.O. Jamel attendait sa concubine, T. Nacéra, qui l'aurait contacté le matin même sur son téléphone mobile pour lui fixer un rendez-vous. Dans un premier temps, une altercation aurait opposé le jeune homme à sa concubine dès qu'elle se pointa au rendez-vous en compagnie de sa complice, B. Baroudia. Les événements ont pris subitement une tournure dramatique lorsqu'il lui aurait administré une gifle. Les deux accusées l'auraient attaqué sans lui laisser le temps de comprendre. En raison de sa chétive constitution physique, il a été rapidement terrassé et maîtrisé par B. Baroudia de fort gabarit. T. Nacéra a exploité cet avantage pour tirer un coutelas de sous sa djellaba et le poignarda à plusieurs reprises sur différentes parties du corps avant de lui sectionner la carotide (selon les résultats de l'expertise médicale). Sans se soucier du sort de leur victime, les meurtrières ont pris la poudre d'escampette après leur forfait. Elles ont été localisées et interceptées plusieurs mètres plus loin par une patrouille de police, grâce aux caméras de surveillance. La victime avait, entre-temps, succombé lors de son transfert vers le service des urgences du CHU d'Oran. A la barre,T. Nacéra déclare tout de go : « Lorsqu'il a tiré son couteau, j'ai réagi instinctivement pour me défendre. Je l'ai poussé et il s'est mortellement blessé en trébuchant sur le trottoir. » Le président lui fait remarquer : « Mais comment expliquez-vous la mystérieuse disparition de l'arme du crime ? », l'accusée balbutie : « Je ne sais pas, un badaud l'a peut-être ramassée. » B. Baroudia formule à son tour des déclarations similaires à celles de sa coaccusée et ajoute en substance à haute voix : « Il s'est acharné sur elle à coups de poing avant de sortir un grand couteau. Je n'ai pas eu le temps d'intervenir, il a chuté et s'est blessé lui-même avec son arme. » Appelé à la barre en qualité de témoin, B. M., l'ami de la victime, qui était présent sur les lieux du drame, affirme pour sa part : « Il l'a giflé et elle a tiré un coutelas. Il était chétif et les deux femmes ont vite pris le dessus. Elles se sont mises à deux pour l'égorger ». On pouvait aisément deviner, à travers leurs regards chargés d'animosité, ce que les accusées souhaitaient faire à ce témoin. Le représentant du ministère public a mis en évidence les antécédents judiciaires des accusées en soulignant qu'elles n'étaient pas à leur première condamnation pour coups et blessures volontaires avec arme blanche. Il a conclu en requérant la réclusion criminelle à perpétuité pour chacune des deux accusées. Les avocats de la défense ont plaidé le bénéfice de larges circonstances atténuantes en faveur de leurs mandantes. Au terme des délibérations, le tribunal criminel a condamné chacune à une peine de 15 années de réclusion.