Cinquante personnes issues de neuf familles croupissent dans un bourbier urbain situé en plein chef-lieu de la localité d'Aokas. Dans des conditions qui sont loin de répondre aux normes élémentaires d'hygiène et de salubrité publique, elles prennent leur mal en patience depuis des décennies. Quarante ans de vaines démarches pour en finir avec ce ghetto qui ne dit pas son nom. La fameuse cité apparaît aujourd'hui comme une plaie hideuse dans le tissu urbain. Côtoyant un oued charriant toutes les impuretés et les puanteurs de la ville et débordant au gré des intempéries, ses occupants décrivent un quotidien infernal. Lors des dernières intempéries, ils ont senti comme une véritable humiliation le fait de voir la Cité des 80 logements protégée des eaux par une digue alors que leurs misérables demeures étaient abandonnées aux caprices de la rivière infecte. à plusieurs reprises depuis l'indépendance, ils ont du être évacués et relogés en catastrophe avant de regagner leur maudite cité avec la promesse, jamais tenue, d'avoir accès à des demeures plus dignes et plus hospitalières. Le quotidien est une réalité de laquelle tous les résidants se sont accommodés : moisissures, champignons, infiltrations d'eau, mauvaise aération, manque d'ensoleillement, émanations pestilentielles avec leur lot de misères dont les plus criantes sont les maladies de peau et les troubles respiratoires. Les habitations, sommaires, inaugurées sans plafond, ni aucun revêtement et n'offrant pas un minimum de commodités laissent voir des dégradations avancées avec des toits effondrés. Le réseau d'assainissement, remontant aux premières années de la naissance de la cité, étant en panne, les résidants dans leur majorité ont du recourir aux fosses septiques ; d'où le reflux des eaux usées, avec tous les désagréments imaginables, les jours de pluie. Heureusement que l'électricité est là pour atténuer l'inconfort, mais cela n'a été possible que grâce à l'argent des résidants. Et pourtant que de fois n'a-t-on pas vu débarquer des personnes, armées de toute une logistique, s'affairer à arpenter, mesurer, tracer à la chaux, palabrer avec leurs hôtes et prendre note sur des calepins. Mais une fois tout ce bon monde reparti, c'est l'interminable attente qui reprend de plus belle, racontent les habitants. Les différentes offres qui ont été présentées aux concernés leur proposant un relogement provisoire avant de regagner leurs parcelles où les attendraient des maisons neuves ont été toutes rejetées, car perçues comme une manœuvre habile visant tout simplement à les exclure des terrains qu'ils occupent. Certes, la cité a été soulagée avec quelques logements sociaux que la municipalité a attribués lors des différentes distributions. Dernièrement, deux réunions ont été tenues successivement avec le P/APC et le chef de daïra, en présence de tous les services compétents, à l'effet de déboucher sur une solution viable. Là, les requérants ont été mis devant un choix difficile : ou les logements sociaux ou les terrains qu'ils réclament. Leur choix s'est porté sur la deuxième option. Pour M. Bellouze Slimane, P/APC d'Aokas, il n'y a guère d'autre choix. « Etant donné notre incapacité à satisfaire leur demande, consistant en l'octroi à tout un chacun d'un logement social, nous leur avons proposé soit de quitter la cité contre un quota significatif de logements, soit de leur céder les terrains. Suite à leur décision, l'APC a déjà approuvé le POS et la démarche suit son cours au niveau des autres services », assure notre interlocuteur. Tout en souhaitant que l'APC et les services concernés procèdent avec diligence dans la conduite de la démarche, les infortunés occupants de la cité de recasement lancent un véritable SOS aux autorités. « Nous avons déjà perdu deux des nôtres dans ce ghetto de la honte, arrachés à la vie à la fleur de l'age. Nous demandons la venue du wali sur les lieux pour constater de visu l'étendue du désastre », lancent nos interlocuteurs.