Depuis un mois, un vent de contestation souffle sur les Dom- Tom (Guadeloupe et Martinique). A l'appel des syndicats locaux, des manifestations, des grèves et des marches de protestation, sont quotidiennement organisées pour dénoncer la vie chère. Au départ, c'étaient les propriétaires des stations d'essence qui étaient visés par les grévistes. Ils leur reprochaient d'augmenter les prix alors que celui du pétrole a connu une chute vertigineuse. Mais la contagion s'est vite étendue à l'ensemble du secteur de la vie sociale et économique comme la grande distribution, le tourisme et même certaines administrations de la Fonction publique. Les habitants dénoncent une situation ancienne qui veut que 90% de l'activité économique soient concentrées entre les mains des patrons blancs. Ces derniers sont accusés de faire de gros profits sur le dos des locaux et de perpétuer indirectement l'esprit colonialiste et esclavagiste. Menée par les leaders du collectif LKP (Liyannaj Kont Pwofitasyon) qui veut dire « Ensemble contre les profiteurs », la contestation a atteint son point culminant dimanche et lundi derniers avec l'installation de barrages sur les grands axes routiers. Objectif : paralyser l'activité économique et empêcher les gens de rejoindre leurs lieux de travail. La gendarmerie a répondu par la force et arrêté puis relâché plus de 50 grévistes. Les autorités craignent un embrasement généralisé. Pris de court, le gouvernement a, dans un premier temps, fait la sourde oreille. Mais devant le pourrissement de la situation, il a dépêché sur place Yves Jégo, Secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer pour discuter avec les patrons et les représentants de la population locale. Ces derniers ont mis sur la table pas moins de 102 revendications. La demande phare reste l'augmentation des salaires de 200 euros. Mais c'est sur ce point précisément qu'achoppent les discussions et aucune partie ne veut céder. En France métropolitaine, les députés craignent que la situation outre-mer ne débouche sur une crise politique majeure. Le parti de Sarkozy (UMP), majoritaire au sein du Parlement, a accusé son rival socialiste « de jeter de l'huile sur le feu » et de profiter de ce qui se passe dans l'outre-mer pour se remettre en selle. Faux, a répondu un député de gauche qui a fait le déplacement dans les Dom-Tom avec deux de ses collègues. « C'est le parti du Président qui, en faisant la sourde oreille, a jeté de l'huile sur le feu. » Vendredi dernier, plus de 5000 Antillais ont organisé un rassemblement à la place de Clichy à Paris (18e) arrondissement pour soutenir les grévistes de l'outre-mer. Craignant que le conflit s'importe en France, Nicolas Sarkozy a repris le dossier en main. Il a convoqué pour aujourd'hui jeudi les présidents des collectivités locales et les parlementaires des départements d'outre-mer afin de « faire un point sur la situation de ces territoires dans le contexte de crise économique ». Le Président français souhaite entamer la « rénovation des politiques publiques en outre-mer ». Mais, est-ce suffisant ? Pas sûr, selon Olivier Besancenot, leader du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), (extrême-gauche) qui rêve d'un nouveau mai 68.