Rétropédalage. Il est urgent d'attendre finalement. Après avoir annoncé, il y a une semaine, que les tests ADN entreront en vigueur en avril, le ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, Eric Besson, est devenu soudainement moins affirmatif. Il s'est interrogé publiquement sur l'utilité de ces tests pour déterminer la filiation des candidats au regroupement familial. « Il y a eu, à juste titre, tellement de précautions que premièrement, il faut vérifier que le décret d'application est bien conforme à l'esprit et la lettre de la loi et, deuxièmement, que cela a encore une signification parce qu'on peut aussi bâtir une cathédrale dans laquelle on ne peut pas entrer », a-t-il déclaré à TV5 Monde, à la veille d'une réunion interministérielle sur ce sujet au niveau des directeurs de cabinet et des conseillers. Le 12 février dernier, il était sur une ligne. « Quand j'aurai la conviction absolue que tout a été fait sur le plan éthique, moral et des réalisations concrètes, je signerai ce décret. Cela nous amènera probablement dans un mois et demi, deux mois, pas davantage », avait tranché le successeur de Brice Hortefeux. Le discours a changé. Il semble vouloir enterrer le projet, éviter une nouvelle polémique tant le climat social est tendu. « Mon intuition est que de toute façon, et dans tous les cas de figure, il ne pourrait y avoir que peu de cas d'application, parce que la loi a tellement été encadrée à la suite de la polémique que vous connaissez, que son effet sera de toute façon mineur », relativise-t-il. Il est difficile de voir autre chose dans sa déclaration qu'une oraison funèbre. La France a adopté, en 2007, l'expérimentation de tests ADN pour le regroupement familial dans la loi sur la maîtrise de l'immigration, selon des modalités très édulcorées par le Sénat par rapport à l'amendement initial qui avait déclenché de nombreuses protestations. Le nouveau ministre, transfuge du Parti socialiste et qui siège désormais à la direction du parti présidentiel, maintient l'objectif d'expulsion de 27 000 immigrés en situation irrégulière. Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS et historien de l'immigration, relève que « le discours sur les étrangers en situation irrégulière a toujours oscillé entre leur criminalisation et leur victimisation. La victimisation n'empêche pas les reconduites à la frontière, c'est une sorte de complément. Le gouvernement veut se donner une image humanitaire, il y a une volonté de camoufler certaines dimensions de sa politique ». En temps de crise, l'immigration redevient souvent, comme par magie, un sujet d'actualité.