La remise à flot du plus vieux parti suite à sa restructuration organique et au parrainage politique de ce parti par Bouteflika a certainement fait jaser dans les chaumières des deux autres partis de l'Alliance présidentielle qui savent maintenant qu'entre eux et le FLN le cœur de Bouteflika ne balancera plus à présent que le choix du Président se soit porté sur le Fln. Par calcul politique, le RND et le Fln ne pouvaient pas, bien évidemment, montrer publiquement leur hostilité ou leur mécontentement face au terrain que leur allié, et néanmoins rival, le Fln est en train de gagner en tirant le gros lot pour s'assurer le puissant soutien de Bouteflika. Même si on avait taillé un costume sur mesure pour Bouteflika en lui créant le poste de «président d'honneur» du FLN pour ménager les susceptibilités des deux autres partis de l'Alliance présidentielle, le rideau vient à peine de tomber sur les travaux du Fln avec la mise en place de ses structures organiques que l'on commence déjà à s'agiter dans tous les sens dans les rangs du MSP et du RND. Le doute commence, en effet, à s'installer dans les esprits quant au rôle et au poids de ces deux formations au sein de l'Alliance relookée. Les données de l'équation vont en effet complètement changer : l'alliance à trois s'est élargie et devient une alliance à trois plus un qui impliquera forcément une redéfinition des pouvoirs au sein de cette coalition. Bouteflika étant le «président d'honneur» du Fln, il se voit également de fait intronisé président de l'Alliance présidentielle, même s'il n'aura pas à s'impliquer personnellement et publiquement dans les activités de cette coalition. On devine cependant vers quel parti iront ses préférences au moment des arbitrages politiques et lors des échéances électorales. A la différence du MSP, le RND compte dans ses rangs des personnalités du sérail : le chef du gouvernement, Ouyahia, qui est à la tête du parti, le président du Sénat, M. Bensalah, le nouveau secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), M. Abadou, une organisation choyée et courtisée par le pouvoir pour la symbolique de Novembre 1954 qu'elle charrie, pour ne citer que ces personnalités, sans compter tous les anciens ministres et anciens cadres du FLN qui ont basculé dans le RND à l'époque de son âge d'or. A ce titre, le parti de Ouyahia se considère lui aussi dépositaire de l'esprit de Novembre et s'estime, par conséquent, en droit de revendiquer des droits filiaux inaliénables et une part de l'héritage par rapport au Pouvoir. Ce n'est d'ailleurs pas fortuit si le patron du RND a eu au cours de son allocution, à l'occasion de la célébration lundi du 8e anniversaire de la création du parti, cet accès de fièvre nationaliste en revendiquant pour son parti et ses militants le label novembriste. «Nous sommes des novembristes», a martelé Ouyahia pour bien signifier à qui de droit, au Fln bien entendu, que nul n'a le monopole du patriotisme et que ce parti trouvera désormais le RND en face de lui pour lui rappeler que l'histoire devenue un exécrable fonds de commerce est un patrimoine commun et non plus la propriété d'un parti ou d'un groupe. Le tout est de savoir comment le RND s'y prendra pour tailler des croupières au FLN sans mettre en péril l'Alliance présidentielle dans laquelle ce parti occupe une place de choix de par son poids électoral et sans éclabousser directement ou indirectement Bouteflika en tant que «président d'honneur» du parti par des attaques ou des critiques frontales sur le Fln. En quête de nouveaux repères La marge du RND apparaît à cet égard bien étroite. Autant le Fln est conforté dans son statut de parti présidentiel érigeant cette formation en parti inattaquable et intouchable par les partis, associations et groupes d'influence qui gravitent autour du Pouvoir même si pour des raisons politiques et tactiques on refuse d'admettre au FLN cette lecture que les observateurs ont fait de l'acceptation par Bouteflika du poste de président d'honneur du parti, autant le RND est en quête de ses repères à la lumière des derniers développements et bouleversements qu'a connus la scène politique nationale et particulièrement pour le cas du RND, l'Alliance présidentielle. Entre le souci de ne pas perdre son poste à la tête du gouvernement en évitant de s'engager sur un terrain de confrontation à découvert et politiquement suicidaire – une position au sein de l'exécutif qui peut lui ouvrir de nouveaux horizons politiques et dont il fait profiter à souhait son parti – et l'ambition de faire de celui-ci un parti déterminé à ne pas jouer le rôle de supplétif et de porteur d'eau du FLN réhabilité, Ouyahia est soumis à un défi quasi olympique qui lui impose de slalomer sur une piste difficile et de réussir un parcours sans faute.