D'un côté, il y a cette grande désolation qui se dégage de l'immense terre-plein totalement dénudé de toute infrastructure d'accueil et de commodités. De l'autre, il y a la présence de plus de 30 sardiniers venus des rivages de Tipaza et d'Alger autour desquels s'activent près de 400 marins-pêcheurs. Ici, c'est la pleine saison de la sardine qui atteint en avril son point culminant. Ce qui fera le bonheur de ces centaines de pêcheurs venus depuis l'Algérois en quête d'une prise miraculeuse. A Petit Port, elle l'est assurément comme le confirmeront de très jeunes marins. Nos interlocuteurs s'interrogent sur les retards qu'accuse l'ouvrage dont les premiers travaux de construction remontent à l'année 1996. Prévue initialement pour être livrée en 46 mois, cette structure entame allègrement sa 9e année sans qu'un espoir ne vienne conforter les opérateurs locaux afin qu'ils puissent s'installer dans cette zone poissonneuse. En effet, en matière d'infrastructures d'accompagnement, rien n'est envisagé pour l'instant. A la DTP, on assure que c'est à l'entreprise de gestion du port de pêche (EGPP), une filiale de l'EPM, que revient la construction des structures d'accompagnement. C'est pourquoi tous ces travailleurs venus d'ailleurs n'ont trouvé refuge que dans les bungalows de Petit Port. Une solution toute provisoire qui prendra fin dès les premiers jours des vacances, lorsque les vacanciers en prendront possession. Il en sera fini de la pêche et les 30 sardiniers s'en retourneront du côté de Bou Haroun, Cherchell ou Alger. C'est un jeune patron de pêche qui nous indiquera la présence d'un énorme boyau qui sort de l'eau et qui longe la jetée sur plus de 500m. «Sans ces gros tuyaux et cette puissante pompe, aucun d'entre nous de s'aventurerait à pêcher dans cette zone», soulignera-t-il. Et son mécanicien de renchérir que c'est grâce à ce système que l'envasement perpétuel du port est contenu dans des limites qui permettent aux seuls sardiniers de franchir la passe. Ce stratagème aurait été mis en place dès l'arrivée sous contraintes des premiers bateaux. Ceux qui feront l'objet d'un transfert à partir du port de Mostaganem mais quitteront rapidement le site dont les risques d'envasement avaient été consignés dans une expertise que personne ne prendra au sérieux. Pour les habitants de cette région, l'endroit le plus indiqué pour accueillir cette infrastructure se trouve être un ancien port romain. Il s'agit de Port de Ménargue. Pourtant ces nombreuses mises en garde ne seront pas prises en considération. Malgré les avertissements, le choix de Petit Port sera maintenu. Les conséquences se résument à une désaffection par les professionnels locaux. Sous la menace de dunes rebelles Sans la présence de cette puissante pompe, ils sont nombreux parmi les gens de mer à redouter que le port ne se transforme en une mare à canards. Selon les chiffres communiqués au président de la République, le 11 février 2004, l'enveloppe initiale s'élevait à 99,5 milliards de centimes. Alors que les délais initiaux sont largement dépassés de plus de 4 années, l'ouvrage aurait déjà consommé pas moins de 130 milliards. Avec les retards enregistrés, l'absence de structures d'accompagnement et le maintien sous perfusion à cause de l'envasement, cette somme pourrait connaître une sérieuse inflation. Pourtant il faudra bien se rallier à l'évidence. Sans l'imposant système de pompage qui nécessite le maintien en permanence d'un équipement important et d'au moins un couple de plongeurs, il va sans dire que cette structure portuaire sombrera rapidement sous les sables. Une méprise qui risque de coûter davantage au Trésor public. Même l'alternative de recourir à la construction d'une nouvelle jetée ne semble pas satisfaire les rares spécialistes que nous avons consultés. Certains souligneront avec force arguments que l'origine de l'envasement ne peut pas être directement liée aux seuls courants marins. Toutefois, au niveau de la DTP, on explique les longs retards par diverses raisons. Notamment celles relatives aux difficultés de payement et aux intempéries de l'hiver 2002 qui seraient en partie responsables de l'allongement inconsidéré des travaux. Sans oublier ceux imputables directement à l'entreprise en charge du projet ainsi qu'à l'administration qui n'aurait pas réussi à mobiliser, en temps opportun, les crédits de payement. Notamment les 35 milliards de cts additionnels que nos interlocuteurs à la DTP attribuent au découpage du projet en 2 tranches. Se basant sur les analyses du LEM, nos interlocuteurs soutiennent que le tirant d'eau au niveau du bassin serait stabilisé à 4 mètres, notamment depuis le dragage effectué par la CELAR, une entreprise syrienne. En ce qui concerne le chenal, la DTP envisage un ultime dragage afin de porter le tirant d'eau actuel à au moins 5 mètres. Ainsi, ce port de pêche qui aurait été livré à plus de 90% à l'EGPP sera réceptionné en juillet prochain, nous assure-t-on. Une date butoir que tous les opérateurs attendent avec beaucoup d'appréhension.