Ce constat a été confirmé récemment par plusieurs conserveurs, particulièrement ceux dont les unités sont implantées dans la wilaya d'El Tarf et représentant plus de 55% de la production nationale du concentré de tomates. Dans ces deux wilayas, l'ambiance est au catastrophisme, même si du côté des services agricoles l'on tente, loin du regard des empêcheurs de tourner en rond, de colmater les brèches et de rassurer les agriculteurs. A Annaba, l'on n'a pas trouvé mieux que l'élaboration d'une convention régissant les relations de travail entre agriculteurs producteurs de tomate industrielle et conserveurs. En fait, à travers cette convention, les représentants de plus de 550 producteurs de tomate industrielle des 2 régions balisent leur parcours pour la campagne 2005. Leur objectif, imposer aux conserveurs regroupés dans l'Association des conserveurs de tomate (Actom), la prise en charge de la totalité de leur production à un prix préalablement fixé (7DA/kg) et le règlement des producteurs de tomate fraîche dans un délai acceptable. Leur démarche semble être le reflet de leurs appréhensions. Ces dernières ont pour origine d'importantes importations de concentré de tomates de Chine. Elles sont pour beaucoup dans la mise en faillite et la fermeture en 2004 de 5 conserveries sur les 17 en activité à Guelma, Skikda, Annaba et El Tarf, et les difficultés financières auxquelles sont confrontées plusieurs autres. A Annaba comme à El Tarf, les agriculteurs ont exprimé leur scepticisme quant à la démarche des directions des services agricoles. «Ce n'est pas à ce niveau que l'on pourra parler de recherche de solution, mais au ministère de l'Agriculture pour mettre un terme à ces importations licites et illicites à partir des frontières terrestres de l'Est du pays. Comme si les malheurs avec les aléas de la nature, la bureaucratie, l'absence de subvention auxquels nous sommes confrontés chaque année ne suffisaient pas, voilà que l'on cherche à nous achever avec la fiscalisation. Ceux qui nous gèrent savent-ils au moins ce qui se passe sur le terrain ? Sont-ils informés de la grande magouille qui s'opère dans la gestion des coopératives ? Pourquoi à ce jour, contrairement à tous les pays du monde, l'Etat algérien ne subventionne-t-il pas la tomate industrielle ?», s'est interrogé Abdelkader Belahoul, agriculteur. Du côté des conserveurs, l'on affirme que tant qu'il n'y aura pas de subventions pour la culture de la tomate industrielle et que le problème du foncier ne sera pas résolu, aucune autre solution ne pourra être appliquée. «Nous ne sommes pas dans des conditions à même de nous permettre d'avaliser une quelconque convention de relations de travail avec les agriculteurs. Tout autant qu'eux, nous appréhendons le problème que pose l'importation du triple concentré de tomates en 2004. Il est à l'origine de la fermeture de plusieurs conserveries. D'autres pourraient suivre en 2005», a indiqué le président de l'Actom. Cette situation, apparemment inextricable, n'est pas faite pour rassurer les producteurs de tomate fraîche, actuellement dans l'expectative. Plusieurs ont exprimé leur volonté de s'adonner à une autre spéculation que la tomate industrielle. Ils iront rejoindre la cohorte de ceux qui l'ont déjà abandonnée pour s'adonner à une autre culture telle la céréalière. Là également, il n'ont pas eu le bon coup d'araire, car non seulement les régions de Annaba, de Guelma, de Tarf et de Skikda sont loin d'être à vocation céréalière, mais tout a été emporté par les eaux furieuses des dernières intempéries.