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La rentrée à quels titres ? (I)
Publié dans El Watan le 15 - 09 - 2005

On nous dit que la rentrée sera, aussi, littéraire. Soit. En attendant de voir ce qu'elle nous réserve au Salon international du livre d'Alger (qui ouvre ses portes la semaine prochaine), on peut se réjouir de voir que nos écrivains, en France, se portent et s'exportent bien.
Très bien même. Ainsi, si Yasmina Khadra poursuit sa carrière internationale avec un nouveau roman, qui fait déjà grand bruit, L'attentat (éditions Julliard), il apparaît que se confirme le talent de Mourad Djebel, jeune auteur, parfaitement méconnu chez nous, qui s'était révélé en 2001 avec un très beau roman, Les sens interdits (éditions La Différence). Il publie ce mois-ci, chez le même éditeur, Les cinq et une nuits de Schahrazède, un roman étonnant, complexe, touffu (près de 370 pages), d'une écriture tendue, violente parfois et qui tente de reconstituer le fil perdu de la mémoire. Il faudra y revenir en urgence.
Et puis il y a Sansal qui nous revient, à sa façon, c'est-à-dire discrète, silencieuse avec ce curieux objet qu'est Harraga. La discrétion semble être, d'ailleurs, la qualité principale de Boualem Sansal. Lorsque l'on s'est retrouvé un vendredi du mois d'août pour discuter de son roman, il est arrivé sur la pointe des pieds, s'excusant presque, avec au fond des yeux une lueur malicieuse, un sourire accroché à la commissure des lèvres, tignasse argentée qui lui donne un-je-ne-sais- quoi de gentleman anglais.
Lorsque Boualem Sansal parle, il ne parle pas il murmure, il faut alors tendre l'oreille pour découvrir cette voix tranquille qui, tranquillement, raconte les tours et détours de l'Algérie d'aujourd'hui. Il ne faut pas s'attendre à des confidences ou à des indiscrétions de sa part, il ne dira du mal de personne, haussera à peine les épaules, jamais le ton, et même s'il habite toujours Boumerdès (la cicatrice du tremblement de terre de mai 2003 est encore là pourtant), où tout ne va pas fort (c'est le moins qu'on puisse dire), il n'est pas amer, n'envisage pas une seule minute de quitter l'Algérie. C'est presque joyeusement qu'il parle de ses lectures (c'est un lecteur boulimique), du grec et du latin qu'il possède encore, de la langue arabe et du Coran, de ses séjours passés dans les bibliothèques d'Europe centrale, où il pouvait fouiner des jours entiers à la recherche d'une simple information sur un détail de l'architecture médiévale… Mais aujourd'hui, il est tout à son affaire. Son roman sort dans quelques jours et lui-même rejoint Paris pour y aller défendre son livre. Il est à la fois heureux et ennuyé. Heureux, parce que ce livre est là, achevé, il ne lui appartient déjà plus (il raconte comment il stupéfait souvent ses lecteurs qui l'interrogent sur tel ou tel de ses personnages alors que lui les a oubliés !) ; heureux, parce qu'il va retrouver son éditeur,
retrouver une maison d'édition qui lui va bien, qui lui ressemble en somme, l'antre Gallimard, discrète et cossue, avec ses couloirs silencieux, ses petites pièces mansardées, ses salons d'honneur, mythique avec le bureau intact du fondateur, les bureaux minuscules mais émouvants de Pierre Nora ou de Philippe Sollers. Là bas, rien ne filtre, aucun mot au-dessus de l'autre, austérité et discrétion donc sont les maîtres mots à l'image des couvertures de leurs romans dans la fameuse «collection blanche», une collection qu'a donc rejoint Sansal un jour d'été 1999 avec son premier roman Le serment des barbares. Mais il est ennuyé aussi, car il sait que lors des innombrables entretiens et autres rencontres qu'on lui a programmés, il va plus parler de l'Algérie, de la politique, de la réconciliation, des cours du pétrole que véritablement de son roman. Mais bon, c'est ennuyeux mais c'est ainsi, il en va exactement de même pour un écrivain russe ou brésilien, finit-il par lâcher philosophe et sage. Oui, c'est ça, Sansal a la sagesse de ceux qui ont beaucoup vécu et c'est un bonheur que de l'écouter. Mais il ne faut pas se fier aux apparences, car on le sait maintenant, il y a deux sortes d'écrivains : ceux qui ressemblent à leurs livres et ceux qui en prennent le contre-pied. Exemple : autant ses livres sont décharnés et mutiques, autant Beckett était chaleureux, joyeux, sociable. Pour Sansal, et bien c'est tout le contraire. On a peine à croire que ce monsieur aux manières si raffinées, à l'élégance certaine (élégance du propos, de la posture), séduisant même, puisse écrire d'une façon si violente et si âpre, avec une colère évidente. Le serment des barbares -accueilli fraîchement en Algérie, portée au nues en France, l'une et l'autre des réactions étant démesurée- était un bloc massif, une coulée rageuse, enfiévrée de mots, de scènes, de personnages dans une Algérie crépusculaire, boueuse, comme perdue. Puis ses deux livres suivants (L'enfant fou dans l'arbre creux, en 2000, Dis-moi le paradis, en 2003), s'ils confirmaient son talent immense, étaient, curieusement, moins tranchants, moins convaincants, parce que Sansal y cédait plus volontiers à son péché mignon, la sentence, la phrase définitive qui trop souvent alourdit la narration, l'entrave dans son avancée, un art de la formule qu'il possède parfaitement mais qui faisait penser aux dialogues d'Audiard.
(A suivre)
Boualem Sansal, Harraga, roman.
Ed. Gallimard, 274 pages, septembre 2005.


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