Après Dis-moi le paradis, paru aux éditions Gallimard dans la collection Blanche en 2003, le très discret Boualem Sansal revient à nouveau sur la scène littéraire avec Harragas, attendu pour le 1er septembre, toujours chez Gallimard. Le quatrième roman de Sansal, avec ses 288 pages, nous replonge à nouveau dans l'univers bien pesant de l'auteur, une ville, un malaise, des gens tourmentés, un quartier en sursis qui n'arrive plus à vivre… à survivre plutôt, à tout ce qui se trame. Harragas, nom symbolique d'une jeunesse sacrifiée mais aussi celui d'une Algérie qui se cherche, qui ne cesse de plonger dans l'abîme. Cette Algérie des années 1990 qui n'en a pas fini avec ses fantômes, car c'est bien de cette période qu'il s'agit dans Harragas ; des centaines de jeunes absents jusqu'à l'insolence, qui rêvent, dos aux murs, de la terre promise de l'Eldorado, mais des islamistes, investis du pouvoir de vie et de mort sur une population apeurée, croient en une “mission divine” chimérique. Face à eux, un pouvoir prêt à tout, des femmes privées de tout, même de parole, puis des opportunistes et des lâches qui ne ratent aucune miette, guettant les moments propices. Si l'Algérie hante l'écriture ironique et dure de Sansal, les quartiers restent tout autant des lieux de prédilection pour l'auteur. On se souvient de Bab El-Oued dans Dis-moi le paradis, et du bar de l'Amitié où l'on discute beaucoup en tentant de refaire le monde, en général, et l'Algérie, en particulier. Et aussi de L'enfant fou de l'arbre creux… Mais, ce qui marque le plus est incontestablement Le Serment des barbares, un roman à la limite de la suffocation. Harragas est donc attendu par les mordus de la littérature algérienne, ceux qui savent apprécier la magie des mots et des maux qui vont avec. Boualem Sansal nous donne donc rendez-vous le premier septembre pour faire connaissance avec l'univers de Lamia, dans un quotidien de solitude et de folie douce. Mais voilà qu'une jeune écervelée, arrivée d'un autre monde, vient frapper à sa porte. Elle dit s'appeler Chérifa, elle s'installe, sème la pagaille et, bon gré mal gré, va lui donner à penser, à se rebeller, à aimer, à croire en cette vie que Lamia avait fini par oublier et haïr dans cette maison que le temps ronge et où les fantômes et les amers souvenirs hantent les murs. Harragas de Boualem Sansal, éditions Gallimard, collection Blanche 288 pages/ septembre 2005. Nassira Belloula