Omar Lesait (ou Louzit) de l'Association des artistes algériens en France, une structure invisible jusque-là, accuse l'artiste de « nuire à l'image de l'Algérie ». Dans une lettre adressée à Jean-Michel Ribes, directeur du théâtre du Rond-Point de Paris, et reprise par le site kabyle.com, il reproche à Mohamed Fellag de dépasser les limites. « Quand on veut ‘'descendre'' quelqu'un, on dit qu'il est tôlier, mécanicien ou maçon. Je ne sais pourquoi, mais c'est comme ça, il n'y a pas de sots métier. Je connais aussi l'humour et la dérision, donc ce n'est surtout pas le contenu que je vise ou je veux censurer quoi que se soit, mais seulement le titre. D'ailleurs, je voudrais bien savoir pourquoi les gens viennent voir ce spectacle (...) alors je vous demande de bien vouloir ôter ce titre... Je trouve ce titre insultant et blessant à l'égard des 35 millions d'Algériens », écrit-il. S'attaquant ensuite à l'auteur de Un bateau pour l'Australie, il ajoute : « Je profite de cette occasion pour dire à Fellag que l'Algérie est un grand et beau pays et qu'il est démocratique, alors il peut faire rire, mais quand il s'agit de faire de la politique, il n'a qu'a créer un parti ou adhérer à l'un d'entre eux (...) ce peuple mérite respect et dignité ». Selon Omar Lesait, Fellag doit retourner l'ascenseur à l'Algérie qui lui a donné « le droit de rentrer dans les grandes écoles ». Dans un autre article publié par Kabyle.com, il a accusé Fellag de « danser nu devant les voisins ». Réagissant à ces propos, Mohamed Fellag a, dans une interview publiée hier par nos confères de Algérie News, accusé Omar Lesait de faire dans l'escroquerie et de duper de jeunes artistes qui souhaitent se représenter à Paris. « Je le connais, d'autant bien que je sais que ce chauffeur de taxi parisien - c'est sa véritable profession - a trompé de jeunes talents en les faisant produire sans les payer. Moi-même, j'ai été victime de ses agissements en 1991-1992(...) Il se peut aussi qu'il veuille faire de l'anti-Fellag un fonds de commerce ou un moyen de se faire médiatiser. Je n'exclus pas non plus qu'il eut été manipulé », a-t-il déclaré. Selon lui, les œuvres humoristiques ne se lisent pas au premier degré. « Mon métier est de travailler sur les clichés d'une société, la mienne en l'occurrence, et de les donner à voir à un public. Peut importe lequel... Je ne suis pas porteur d'un projet politique ou idéologique. Ce qui m'intéresse, c'est la subversion à rebours », a-t-il ajouté. Par le passé, Omar Lesait, qui se revendique de la droite française, s'était déjà attaqué à d'autres artistes algériens dont le chanteur Idir lui reprochant d'avoir voyagé dans l'avion particulier du président Bouteflika. En tournée française jusqu'à septembre 2009, Tous les Algériens sont des mécaniciens, qui puise dans la source de l'humour noir, l'artiste raconte le quotidien d'un quartier d'Alger, des jeunes rassemblés autour d'une voiture en pannes, la crise de l'eau ( 24h/ 24 est toujours un rêve à Alger et ailleurs), la venue des travailleurs chinois. Des Chinois ? « En trois quatre ans, ils apprennent l'algérien quand les Français n'y sont pas parvenus en cent trente ans, au point qu'au moment de partir, ils n'ont pas pu dire au revoir… », lance-t-il. dans son spectacle. Spectacle présenté d'une manière drôle dans le blog de l'artiste : « Le moteur d'une voiture est le seul endroit du pays où la démocratie s'exerce en toute liberté, égalité, fraternité. La mécanique est l'art de se sortir des situations compliquées de la vie quotidienne. En lorgnant du côté d'Alfred Jarry, on pourrait presque dire qu'elle est l'art des solutions imaginaires ». Ces idées ont été développées autrement dans le dernier roman de Fellag, L'allumeur de rêves berbères (paru en 2007). Pour le comédien, l'humour est une façon simple de dépasser la déprime et le désespoir. Son spectacle, joué avec Marianne Epin, au théâtre du Rond-point, situé à deux pas des Champs Elysées, a connu un grand succès, même si la représentation a duré presque 45 jours. La presse français, dans une unanimité pas toujours parfaite, a plutôt bien accueilli le travail de Fellag. « Tous les peuples ont leur(s) comique(s). Mais les Algériens battent, sans doute, tous les records. Le pire trouve toujours son pitre. Fellag est un traité d'amitié franco-algérien à lui tout seul. Les chefs d'Etat qui se courent après devraient un jour en faire l'arbitre », écrit L'Humanité, journal de gauche. Fellag, 59 ans, prix de la Francophonie en 2003, est partisan de l'idée que le rire efface les idéologies et dit simplement l'humain.