En partenariat avec Global Right, un ensemble d'ONG et d'avocats du Maroc, d'Algérie et de Tunisie, a lancé, en 2007, une série de consultations communautaires à l'adresse des femmes de leurs régions respectives, âgées entre 17 et 80 ans. Mme Khira Taleb, partenaire du projet pour la région de Tlemcen, nous en parle. Le mariage étant le consentement entre deux époux, dans ce cas quel est le but du contrat de mariage que vous défendez ? Le concept de mariage comme contrat présuppose un accord négociable entre deux parties consentantes, créant ainsi des obligations qui vont être légalement applicables. Les époux sont libres de définir leurs droits et leurs devoirs respectifs à travers des clauses détaillées introduites dans le contrat de mariage. Le non-respect des clauses est considéré comme une violation du contrat pour laquelle la partie lésée peut exiger un dédommagement en cas de divorce. Le contrat de mariage ne garantit pas l'égalité homme-femme, mais garantit des clauses protectrices des droits des femmes durant le mariage. Ceci étant une initiative concrète afin de promouvoir les droits humains de la femme à travers l'usage stratégique des contrats de mariage dans la mobilisation communautaire au niveau de la base et dans l'éducation civique. Le point de départ du projet a été les consultations communautaires ... Les consultations communautaires ne sont ni des entretiens ni des sondages. Lors des consultations communautaires que nous avons faites dans nos régions respectives (Tlemcen, Oran, Alger, Tizi Ouzou, Skikda et Tébessa…), nous avons voulu discuter de leur perception du contrat de mariage et des clauses qu'elles considèrent importantes à inclure dans leur contrat. Ces femmes appartiennent à différentes couches sociales, de différents niveaux d'instruction et différentes professions (femmes rurales, citadines, milieux déshérités…). Quelles sont les clauses qui sont revenues le plus souvent ? La première clause n'est pas d'ordre matériel. Loin de là. A l'unanimité, les femmes ont parlé de l'interdiction de la violence sous toutes ses formes (domestique, verbale, physique, psychologique, sexuelle…). Elles souhaitent vivre dans un climat serein et jouir du respect de leur époux. La violence domestique est une violation aux droits humains les plus élémentaires. La deuxième clause est le droit de travailler. Un consentement verbal entre les parents respectifs avant le mariage et, par la suite, une interdiction de travailler par l'époux, reniant « l'engagement ». En cas de divorce, les femmes pour la majorité se retrouvent sans ressources.La question des biens matrimoniaux (notamment ceux acquis lors du mariage), du logement, des soins médicaux, de la gestion et des charges du foyer, des enfants, de la planification familiale, a été débattue et retenue. Pour que ce projet soit plus « crédible », il faudrait qu'il passe par les députés. Il semble même que vous ayez déjà pris contact avec certains d'entre eux ... En octobre 2008, un contrat de mariage modèle a été présenté lors de la rencontre-débat que nous avons tenue à Alger, avec les partenaires algériens du projet et Global Rights. Le contrat tel que présenté est un outil de plaidoyer législatif, afin de promouvoir les lois concernant les droits humains des femmes. L'introduction d'un modèle de contrat de mariage à travers un usage généralisé aura pour impact des pratiques qui seront plus progressives que la législation courante et pourra servir de modèle concret pour les changements législatifs dans les lois du statut personnel, cela dans le long terme, d'où la nécessité d'en débattre avec des députés et des décideurs. Je souhaiterai, ainsi que tous les partenaires algériens du projet, la mise en place d'un contrat type de mariage, qui sera officiel et obligatoire, tout en sachant que chaque couple pourra le négocier à sa convenance et le modifier pendant leur vie conjugale…