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La mosquée à l'ombre des Tween towers
Publié dans El Watan le 02 - 01 - 2006

Pourtant dès que l'on foule le sol malaisien, l'on est tout de suite démenti par les réalités plus avenantes et plus hospitalières de ce pays aux mille contrastes. En débarquant à l'aéroport international de Kuala Lumpur, on est vite frappé par ces images de touristes étrangères habillées en shorts courts exhibant leur bronzage débarquant ou embarquant de et vers d'autres destinations touristiques de l'arrière-pays. Les Malais et les Malaises de confession musulmane qui s'y trouvaient n'éprouvaient aucune gêne devant ces scènes qui font partie de la vie courante en Malaisie. Le pays est un modèle par excellence de tolérance et d'ouverture sur le monde. C'est aussi un pays transparent qui n'a pas peur du regard et du jugement de l'autre, qui assume pleinement sa différence et son autonomie en refusant de ressembler ou de mimer des modèles de sociétés venus d'ailleurs, de quelque capitale musulmane ou islamique que ce soit. La Malaisie refuse de vivre cachée, recluse, enfermée dans des dogmes qu'ils soient religieux ou autres. Cela se constate jusque dans son art achitectural comme le visiteur étranger peut le constater dans la conception de l'aéroport de Kuala Lumpur, tout de verre bâti, une maison de verre toute dédiée à la transparence et d'où l'on peut admirer la beauté du paysage extérieur. Un décor naturel pour un peuple tout aussi naturel et entier. C'est que la principale force et richesse des Malaisiens réside dans le fait qu'ils ont réussi très tôt et avec beaucoup de courage et de concessions réciproques de la part des différentes ethnies peuplant la Malaisie à forger une nation solide et pérenne qui assume son unité dans la diversité ethnique et religieuse. A partir de là, dès lors que cette équation identitaire est résolue non sans heurt, voire au prix du sang et d'une violente guerre interethnique survenue en 1969, tout devenait possible et le devint réellement pour ce petit pays de moins de 1 million de km2. Le pays respire aujourd'hui pleinement la prospérité, le progrès et la modernité. N'était la chaleur qui vous prend à la gorge surtout lorsque l'on n'est pas habitué à une telle variation de température comme c'est le cas des touristes venus du Nord, en débarquant à Kuala Lumpur on se croirait dans une grande ville nord-américaine. Avec les buildings tout en verre s'élançant vers le ciel, les grands magasins de distribution comme le Cosmos World qui abrite un millier d'échoppes et où toutes les grandes marques internationales sont représentées, les multiples attractions qui font courir les touristes du monde entier comme l'aquarium géant qui accueille plus de 150 espèces de poissons, sa salle de cinéma 3D géante où les amateurs de sensations fortes en ont pour leur argent, son quartier chinois, le Chinatown, royaume de la contrefaçon et de la gastronomie chinoise, mais la plus grande curiosité de Kuala Lumpur reste incontestablement les deux tours jumelles Petronas baptisées du nom de la compagnie pétrolière malaisienne. Du haut de leurs 88 étages, ces tours où sont concentrés des sièges d'administrations et de sociétés ainsi que des commerces veillent sur la grande mosquée de la capitale située à quelques mètres plus loin et illuminent Kuala Lumpur de mille feux à la nuit tombée. Ces tours qui sont une réplique des Tween Towers américaines détruites par les attentats du 11 septembre sont à la mesure des grandes ambitions que nourrit ce petit pays qui entre à grands pas dans la cour des grands. Aussi loin que l'on porte son regard dans le centre de Kuala Lumpur, les tours en verre imposantes essaiment de partout. Lorsque l'on a sa chambre d'hôtel au 20e étage, c'est comme si on était au rez-de-chaussée tant dans ce pays gagné par le virus du gigantisme et la «tourmania» il n'y a presque aucune limite à l'altitude.
Quinze modèles de voitures
Ce boom de la construction a généré dans son sillage le sempiternel problème de la circulation automobile propre aux grandes mégapoles qui ont été vite rattrapées dans leur extension par le développement économique et social avec toutes les administrations, les services, les sièges des banques et des sociétés qui se sont engouffrés dans le nouveau tissu urbain. Rouler dans la capitale est un véritable calvaire. Kuala Lumpur compte officiellement environ 2 millions d'habitants, mais ce chiffre est allégrement dépassé si l'on y ajoute les Malaisiens qui habitent dans les banlieues de la capitale. A la sortie des bureaux, les bouchons des véhiculent quittant la capitale forment une longue procession qui peut atteindre plusieurs kilomètres. Les habitants de Kuala Lumpur évitent la route pour ceux qui n'y sont pas contraints en se rabattant sur le métro et le tramway. Le métro de Kuala Lumpur qui est aussi bien tenu du point de vue de la propreté et de la ponctualité que n'importe quel métro d'une capitale européenne a été réalisé il y a à peine trois ans par une société allemande. Aujourd'hui, la Malaisie construit elle-même les wagons de son métro. La capitale est dotée également d'un réseau de tramway et de TGV en renforcement du métro et des autres moyens de transport, tels que les bus et les taxis. En moins de 28 minutes, on peut ainsi au moyen du TGV gagner l'aéroport de Kuala Lumpur à bord d'un train qui offre toutes les commodités du transport moderne avec télévision dans les wagons et autres services divers. Ce visage moderne de Kuala Lumpur, œuvre du boom économique qu'a connu le pays au cours de ces dernières années, contraste avec les bâtisses délabrées et pelées des HLM des quartiers populeux comme celui du Chinatown où les bâtiments en béton avec le linge qui pend des fenêtres et des balcons ressemblent à nos lugubres HLM. Pays riche et prospère, la Malaisie n'est pourtant pas Monaco. La pauvreté n'est certes pas endémique mais elle est bien réelle. Le loyer d'un logement d'une pièce cuisine peut atteindre hors capitale la moitié du salaire d'un ouvrier. Pour vivre décemment pour une famille de deux à trois enfants, il faudrait un revenu de 2000 ringits (environ 500 euros), alors que le revenu moyen est de 500 ringits. Une femme de ménage gagne environ 300 ringits. La prospérité dans laquelle baigne la Malaisie est-elle équitablement partagée ? C'est le ministère des Affaires religieuses qui prend en charge les démunis à travers une politique d'aide sociale, explique-t-on. La Malaisie tire une grande partie de ses richesses de l'industrie touristique. Pour la seule capitale Kuala Lumpur, il existe plus d'une vingtaine d'hôtels de luxe de 4 et 5 étoiles. La Malaisie accueille chaque mois plus de 1,5 million de touristes étrangers en provenance essentiellement d'Europe (Britanniques, Allemands, Français), d'Australie, des pays asiatiques voisins. L'objectif visé par le ministère du Tourisme malaisien est d'atteindre 17 millions de touristes à fin 2005 contre 15 millions en 2004. Conséquence des attentats terroristes du 11 septembre, la Malaisie a drainé au cours de ces dernières années des flux importants de touristes européens, du Moyen-Orient et des pays du Golfe à la recherche de destinations touristiques plus sûres. Le marché maghrébin intéresse particulièrement la Malaisie. Le ministre du Tourisme malaisien avait pris son bâton de pèlerin en 2004 dans la région se rendant également en Algérie pour faire la promotion du produit touristique malaisien. Un nouveau concept «To feel home» (se sentir chez soi) vient d'être lancé par les responsables du tourisme malaisien qui ont mis en place toutes les commodités afin que le touriste arabe ne se sente pas dépaysé (ouverture de restaurants orientaux et maghrébins, recrutement des agents pafistes arabes ou parlant l'arabe…).
«To feel home»
Les touristes du pays du Golfe notamment saoudiens ont fait de la Malaisie leur nouvelle destination touristique. Les plus conservateurs atterrissent à Kelantan, au Nord-Ouest, attirés par la beauté sauvage de ses îles et par le mode de vie de cet Etat fédéré tombé entre les mains du parti islamiste lors des dernières élections législatives de mars 2004. La diversité des sites et la multiplicité des îles vierges inhabitées que l'on peut retrouver à l'est, à l'ouest et au nord du pays font que les touristes étrangers peuvent trouver partout toutes les infrastructures appropriées et tout ce qu'ils recherchent, pour les amateurs de dépaysement, de sensations fortes et des rivages au sable fin à l'ombre des cocotiers. L'escale de Langkawi, dans le nord-est du pays, fait partie des nombreux archipels malaisiens qui font courir les touristes étrangers. Situé à une heure d'avion de la capitale Kuala Lumpur, cet archipel de l'Etat fédéré de Kedah composé de 99 îles est un véritable havre pour les touristes en mal d'exotisme. La curiosité touristique de cette région réside surtout dans ses îles inhabitées qui émergent tels des champignons au milieu de bras de mer qui se croisent et se perdent au détour de chaque île. On s'y rend à l'aide de barques que l'on peut louer pour la traversée ou pour la journée. Le ballet incessant des barques chargées de touristes allant d'une île à une autre, déchargeant des groupes de touristes sur les berges d'une plage pour faire trempette et découvrir les lieux est salué au passage par une noria d'aigles qui ont donné leur nom à cette île surnommée l'île des aigles.
Chaque île a son histoire et sa légende. Comme l'île de la femme enceinte dont la légende raconte qu'une femme stérile a réussi à donner la vie après s'être baignée dans ses eaux qui auraient une vertu procréatrice. Le mystère est ici maître des lieux. Comme cette mer intérieure cernée par de petites îles et dont on ne sait par quel étrange phénomène ses eaux sont douces comme l'eau d'un lac. Les touristes s'en donnaient à cœur joie dans cette immense piscine naturelle atteignant 50 m de profondeur. On peut même s'offrir un massage gratuitement de poissons-chats en plongeant les pieds dans un petit bassin. Bien que béni par le ciel pour l'avoir gratifié d'une nature dont elle a su tirer le meilleur profit, la Malaisie n'a pas compté que sur le tourisme pour se développer et atteindre le niveau de développement actuel qui la place parmi les pays émergents d'avenir dans la région. L'économie malaisienne qui avait réussi avant le dernier crash boursier le tour de force d'atteindre un taux de croissance de 8% contre 4% aujourd'hui du fait des conséquences du désordre économique mondial a diversifié ses sources de revenus. L'industrie électronique, l'industrie automobile (15 modèles sont sortis des usines malaisiennes avec un taux d'intégration pour certaines de 100% et pour une production annuelle globale de 2 millions de véhicules), les plantations d'huile de palme (la Malaisie en est le premier producteur mondial), d'hévéa pour le caoutchouc, de cacao, de fruits exotiques, de riz sont autant de créneaux d'activités que la Malaisie a développés. Elle est confrontée à un grand problème de main-d'œuvre surtout dans le secteur de la construction en plein boom et les plantations. Il y a plus d'un million de travailleurs étrangers légaux en Malaisie et quelque 500 000 clandestins. Si l'économie malaisienne a pu résister aux contrecoups des crises successives qui ont affecté l'économie mondiale au cours de ces dernières années, c'est grâce aux richesses naturelles et aux matières premières que recèle le pays et qui ont permis à son industrie de continuer à fonctionner sans accrocs. Le commerce extérieur de la Malaisie occupe aujourd'hui la 16e place au plan mondial. La croissance exceptionnelle des économies chinoises et japonaises est loin d'inquiéter la Malaisie, très active dans les regroupements régionaux. Ce pays entend au contraire tirer le meilleur profit de cette situation et de son environnement régional en drainant de nouveaux investissements et capitaux .


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