Cette réunion, qualifiée d'«importante» de part et d'autre de la Méditerranée, apparaît beaucoup plus comme la première étape d'un long processus destiné à défricher le terrain et à asseoir un consensus sur la nature de la réponse à apporter au phénomène des flux migratoires. Première étape, car les travaux de cette rencontre ministérielle ont montré, par-delà les déclarations de bonne intention des uns et des autres, qu'Africains et Européens ont encore du chemin à parcourir avant de construire le partenariat auquel ils ont appelé, tant leurs divergences sur la question apparaissent encore importantes. Un exemple de ces divergences : les représentants de l'UE se sont opposés à la création d'un fonds spécial de développement réclamé par l'Afrique. Le Commissaire européen au développement, Louis Michel, a exclu la mise en place d'un nouveau mécanisme de financement, estimant qu'il ne ferait que réduire les ressources destinées aux politiques de développement en Afrique. L'UE a en outre proposé un système de quotas de migrants tenant compte des besoins des marchés de travail de chaque pays européen. Le vice-président de la Commission européenne, Franco Frattini, a annoncé qu'il allait soumettre aux pays membres de l'UE le projet d'une agence européenne d'immigration, un projet permettant, notamment, de fixer les besoins européens en matière de main-d'œuvre et de veiller à la formation linguistique des candidats. Là encore, il est peu probable que cette idée soit bien reçue par les gouvernements africains qui voient dans ce genre de propositions une tentative légale des pays européens de vider le continent de ses cerveaux. L'intérêt, toutefois, de cette rencontre est que les pays africains sont parvenus, pour la première fois, à parler d'une seule voix. Cet acquis car c'en est bien un a permis déjà d'éviter que la réponse à la problématique des flux migratoires ne soit strictement sécuritaire ainsi que le souhaitent beaucoup de pays européens. Au factuel, l'approche prônée par les représentants des pays des deux continents combine justement sécurité et développement. «La migration illégale ou irrégulière ne doit pas être abordée uniquement sous l'angle de la sécurité», ont convenu les participants à cette réunion dans la déclaration finale qui a sanctionné leurs travaux. Ils y évoquent «une perspective plus vaste du développement» et insistent sur une intégration de la migration dans les stratégies de développement des pays d'origine des flux migratoires. Dans le document adopté, l'UE s'engage ainsi à mettre en œuvre une augmentation de l'aide aux pays en développement de 0,56% du PIB en 2010 et de 0,7% en 2015, réservant au continent africain au moins 50% de cette augmentation. La déclaration finale, dite «pacte inédit», souligne également que ce «partenariat est susceptible de garantir l'éradication de la pauvreté, du chômage et des maladies afin de réaliser un développement global et durable».La déclaration souligne en outre «l'engagement des pays européens et africains à trouver des solutions concrètes aux problèmes posés par les flux migratoires illégaux et irréguliers», et à «protéger les droits de l'homme, de tous les migrants, en particulier ceux des femmes et des enfants». Aussi, les deux parties se sont engagées à garantir une «protection efficace des réfugiés et des personnes déplacées» et à créer des «conditions favorables à leur retour volontaire chez eux», ajoute le texte. A signaler que plus d'une cinquantaine de ministres des pays membres de l'Union africaine et de l'UE ont participé à cette conférence sur la migration. Celle-ci, la première du genre, a été convoquée, rappelle-t-on, suite à une initiative de l'Algérie, prise au sommet de l'UA, tenu en janvier 2006, au Soudan.