Une petite semaine lui a suffi pour voir toute l'Europe lui tomber dans les bras, comme une belle femme séduite. Par son style, son charisme et son discours, Barack Obama a ravi les dirigeants du vieux continent. Partisans et adversaires de l'Amérique en France, en Allemagne, en République tchèque, en Grande-Bretagne et surtout en Turquie ont succombé au verbe de cet homme nouveau à tous points de vue. Débarrassé de l'image répugnante qu'a le monde musulman surtout d'un Bush va-t-en-guerre, Obama est arrivé en Europe en chevalier de la paix. Sur ce plan, il n'y a vraiment pas photo. L'héritage de George Bush est définitivement enterré et l'image détestable d'une Amérique arrogante et envahissante se conjugue doucement, mais sûrement au passé. Pour ce faire, le nouveau président des Etats-Unis a déployé une formidable machine de marketing politique où le geste calculé, le pas cadencé et la parole mesurée ont tôt fait de projeter d'Obama l'image d'un homme providentiel dont l'Amérique a besoin. Dont le monde a besoin. Son déplacement sur les terres européennes va en tout cas laisser des traces dans le bon sens du terme. Son mentor, David Axelrod, a brillamment réussi à fabriquer le « label » Obama. Sur le marché flottant de la bourse de valeurs politiques et diplomatiques, le « produit » écrase la concurrence et bien sûr, s'exporte très bien. « On sème, on cultive, on moissonne, cela prend plus d'une semaine », avoue, tout sourire, la cheville ouvrière du phénomène Obama. Et pour cause ! Le président américain a ravi la vedette à Brown, Sarkozy et autre Merkel, à travers des engagements originaux qui tranchent radicalement avec la littérature guerrière de son tristement célèbre prédécesseur. Barack Obama savait qu'il était attendu de pied ferme sur cette question. « Yes we can », même en Europe… Réponse du nouveau maître du monde : « Je vous demande d'excuser l'arrogance américaine ! » Il faut être suffisamment costaud pour oser un tel aveu de la part d'un président américain. Cette amende honorable a évidement titillé l'ego des dirigeants du vieux continent, définitivement convaincus que l'ère d'une Europe « caniche » des Etats-Unis est révolue. Pour Obama, l'avenir du monde se conjugue au pluriel, les pays musulmans compris. Depuis Prague, il a appelé à « s'unir pour empêcher que le terrorisme tue des centaines de milliers de personnes à New York, Moscou, Islamabad, Bombay, Tokyo ou Tel-Aviv, Paris ou Prague ». Il a plaidé pour un monde sans armes nucléaires, irradiant ainsi de son aura toute la Russie, arrachant même un sourire radieux au très sérieux Dimitri Medvedev. Et la moisson de cet important investissement personnel a été plutôt bonne. A commencer par ce G20 qui a débloqué de nouveaux fonds pour la relance et qui a décidé des mesures contre les paradis fiscaux. Barack Obama a également pu forcer la main, pourtant serrée, à l'Europe qui a accepté finalement d'envoyer 5000 hommes supplémentaires en Afghanistan. Ce qui n'est pas rien, compte tenu de l'héritage de George Bush. Et pour boucler la boucle d'une campagne diplomatique de charme pour soigner l'image des Etats-Unis, Barack Obama s'est presque mis dans la peau d'un musulman en Turquie. Morceaux choisis d'une belle caresse dans le sens du poil : « Les Américains de confession musulmane ont beaucoup apporté aux Etats-Unis. » « Beaucoup d'autres Américains ont des musulmans dans leur famille ou ont vécu dans des pays à majorité musulmane. » « La foi musulmane de mon père et le fait que j'aie passé une partie de mon adolescence en Indonésie ont fait de moi un président différent. » Des confessions qui ont été avalées comme de l'eau bénite en Turquie et dans le monde musulman, même si les actes sur le terrain restent le baromètre fiable et viable d'une nouvelle conception des relations internationales débarrassées des clichés et des procès d'intention. C'est dire que, ne serait-ce que par son style de gentleman, Barack Obama pourrait être le stabilisateur d'un monde devenu fou. Mais de là à mettre sur ses frêles épaules tous les problèmes du monde pour les régler ici et maintenant, il y a un pas que beaucoup n'osent pas franchir. « Pourquoi tous les maux de la Terre n'ont-ils pas disparu depuis que le président Obama est arrivé en Europe cette semaine ? », a ironisé David Axelrod. Toujours est-il que Barack Obama a montré au monde qu'avec lui : « Yes we can ! »