La couverture médiatique de la campagne électorale a été inégale. Le président candidat et l'équipe gouvernementale qui le soutient ont eu la part du lion des espaces médiatiques consacrés à cette campagne. Les résultats préliminaires d'une étude de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH), réalisée durant les quinze premiers jours de la campagne (du 19 mars au 1er avril), le confirment. Initiée pas la LADDH en collaboration avec le groupe arabe pour le monitoring des médias, cette étude a concerné 4 titres de la presse étatique, 7 titres de la presse privée, deux chaînes de radio et l'ENTV. « Les résultats de l'étude ont confirmé l'inégalité des chances entre les six candidats en lice », a affirmé le président de la LADDH, Mustapha Bouchachi. Les médias étudiés, en particulier la presse publique, ont largement favorisé le président-candidat. Ce dernier a eu, à lui seul, 27,63% de l'espace et du temps consacrés à cette campagne. Ceci en plus des 4,03% du traitement consacré à ses activités durant la même période en tant que président où il n'a pas manqué de faire l'éloge de son programme (messages lus dans le JT de 20 heures ou publiés par la presse). Ce qui lui donne déjà plus de 31% des parts. Les membres du gouvernement qui ont fait campagne pour lui ont également bénéficié de plus de couverture que les autres candidats. Ils ont eu 14,91% des espaces. Ainsi, Bouteflika s'est emparé de 50% de l'espace médiatique. En revanche, ses concurrents dans cette course n'ont eu droit qu'à un faible taux de couverture. En effet, le meilleur d'entre eux est Louisa Hanoune avec 10,50%, suivie de Moussa Touati (9,70%), Djahid Younsi (8,77%), Fawzi Rebaïne (8,42%) et Mohamed Saïd (8,26%). Les titres de presse ayant fait l'objet de l'étude n'ont consacré qu'un espace insignifiant aux partisans du boycott des élections que sont le FFS et le RCD, avec uniquement 1,72%. « Le résultat est connu, à quoi sert-il de voter ? » Et même l'espace qui leur a été consacré a servi, beaucoup plus, pour les critiquer. Les médias publics et certains titres de la presse privée ont consacré 54,8% de leurs produits médiatiques à la critique de ces partis. Le traitement positif ou neutre de leurs activités ne représente respectivement que 34,7% et 10,6%. « Cela confirme que le traitement de la campagne électorale était à sens unique », commentent les responsables de la LADDH. En général, note l'étude, c'est la presse écrite étatique qui a consacré plus de son espace rédactionnel à cette campagne avec un taux de 45,5%. Elle est suivie par la presse privée (34,9%) et les médias audiovisuels avec un taux de 19,5%. En plus des médias, l'administration, estiment les responsables de la Ligue, a également favorisé Bouteflika. « Les moyens colossaux déployés en faveur du président-candidat confirment cette prise de position de la part de l'administration », souligne Mustapha Bouchachi. La LADDH considère, selon lui, que « l'élection s'est faite le 12 novembre 2008 ». « Il n'y a, aujourd'hui, aucun Algérien qui se pose la question de savoir qui sera le président algérien le 10 avril prochain », enchaîne-t-il. Pour l'orateur, « le déploiement de gros moyens ne répond qu'à un seul objectif : légitimer cette élection aux yeux de l'Occident ». Poursuivant, Mustapha Bouchachi affirme que l'Algérie a beaucoup régressé en matière de démocratie. « Il y a un oued qui s'est creusé entre le système et le peuple algérien », souligne-t-il, en précisant que « son organisation se fait des soucis sur l'avenir des droits de l'homme dans le pays ». Pour sa part, le président d'honneur de la LADDH, Ali Yahia Abdennour, dira que « les élections en Algérie ne sont pas faites pour élire un président ». « Ce qui intéresse le pouvoir actuellement, c'est sa légitimité au yeux des étrangers. Il ne se soucie plus du peuple », lance-t-il. Pour lui, le pouvoir se maintient « par le fric et le flic ». Abordant la question de l'amnistie générale, Ali Yahia Abdennour souligne d'abord que Bouteflika n'a rien inventé en parlant de référendum, puisque la loi exige que cela soit fait par le Parlement ou par une consultation populaire. Cela dans la forme. Dans le fond, dit-il, « la paix et les droits de l'homme sont indissociables ». « S'il n'y a pas de vérité et de justice, il ne peut y avoir de paix », ajoute-t-il, en affirmant que seule une solution politique à cette crise est en mesure d'instaurer la paix.