L'Expression: Dix jours après le début de la campagne électorale pour les législatives du 17 mai, quelle appréciation faites-vous à ce parcours? Saïd Bouchaïr: La campagne se déroule normalement et je dirai même, mieux que les campagnes précédentes de 2002 et de 2004. Mais, il faut reconnaître, néanmoins, qu'il existe un certain nombre de problèmes sur le terrain, à l'instar de celui lié à l'affichage anarchique qui existait et qui revient d'une manière récurrente. Nous avons fait de notre mieux en sollicitant l'intervention des partis politiques et des candidats libres aux fins de respecter la réglementation en vigueur. En ce qui concerne les interventions à la Télévision et à la Radio, il faut reconnaître que tout fonctionne normalement. Tous les candidats intervenants sont conscients de ce que stipule la loi électorale. Nous avons quand même dépêché des surveillants au niveau de la Télévision et de la Radio. Une chose est sûre, nos surveillants ne doivent aucunement faire des interventions directes. Mais, il est strictement interdit de toucher et de s'en prendre aux symboles de l'Etat et aux personnes, des responsables officiels et de partis politiques. Nous avons décidé d'accorder aux candidats le libre choix des séquences d'intervention et des sonores à la Télévision et à la Radio. Cela permettra aux partis politiques en lice et aux candidats de transmettre leurs messages aux électeurs et aux militants. Le choix de cette méthode obéit à la logique d'éviter des problèmes vécus lors des précédentes échéances. Certains partis ont émis des réserves sur le choix de séquences et de sonores qui se faisait auparavant selon le libre choix des journalistes et des médias. Est-ce que votre commission a eu à faire face à des problèmes d'un autre genre? Nous n'avons pas eu affaire à de gros problèmes. Je ne vous cache pas, nous avons eu à régler, à la Télévision, un problème avec un parti politique. Cette formation politique a été appelée à revoir la séquence qui devait passer à la Télévision. Lequel discours n'a pas été adapté aux règles en vigueur. Nous avons pu régler ce casse-tête à l'amiable et le parti a dû revoir sa copie pour qu'elle soit plus conforme à la réglementation. D'une manière générale, nous n'avons pas eu à intervenir en ce qui concerne le contenu des discours prononcés par les candidats et les chefs de parti dans les endroits autorisés. Cela se passe d'une manière libre et chacun à sa liberté, à la condition qu'on ne touche pas aux symboles de l'Etat algérien, à ses institutions et à ses responsables. Vous ne pensez pas que certains partis violent la loi en vigueur? Quelques-uns tournent encore le dos à la directive selon laquelle les candidats ne doivent pas user de l'image du président de la République. Quel est votre commentaire? Tout à fait, certains partis continuent de défier cette directive qui a été adressée à toutes les formations politiques en lice. L'article 182 de la loi électorale stipule que l'usage des attributs de l'Etat est interdit. Quant à l'article 213, celui-ci dispose de ce qui suit: quiconque qui enfreigne les dispositions citées dans l'article 182 est puni d'une réclusion de cinq à dix ans. Toutefois, la loi est claire, mais ce n'est pas la commission qui doit intervenir pour faire appliquer la loi. Ce n'est pas une défaillance d'un seul parti, mais plusieurs formations persistent dans la bêtise. Nous n'avons pas de relations avec la justice qui est l'instance habilitée à intervenir dans ce genre de défaillance. La directive que nous avons adressée aux partis politiques a une crédibilité morale, mais nous devons dire, une fois de plus, qu'il existe bel et bien des services chargés de veiller au respect de la loi. Votre commission a-t-elle enregistré des recours émis par certaines formations politiques? En ce qui concerne ce volet, nous avons reçu, dès notre installation, des recours de la part de certains partis, mais qui ont été rejetés par l'administration publique. Ces recours ont un lien, entre autres, avec les atteintes à l'ordre public, la non-conformité des programmes, la non-compatibilité avec la Constitution, programmes non cachetés et menaces. Notre commission a été installée un peu en retard, ce qui ne nous a pas permis d'intervenir pour résoudre certains problèmes de ce genre et d'autres en relation avec des candidatures rejetées par l'administration publique. Chose que nous avons faite le plus normalement possible en 2002 et 2004. Nous avons appelé, alors, à résoudre ces problèmes entre le candidat et l'administration publique sans se référer à la justice. Cette fois-ci, le retard accusé dans l'installation de notre commission ne nous a pas permis, malheureusement, d'agir à temps et de solutionner certains problèmes. Les délais font partie de l'ordre public. Une partie du staff gouvernemental est en campagne. Que prévoit la loi dans ce sens? Nous ne prenons pas en considération les activités partisanes des ministres candidats. Les responsables candidats n'ont pas le droit à une couverture médiatique quand ils s'adonnent à une activité électorale. Nous avons demandé à ce que tous les ministres et cadres de l'Etat, en campagne, ne soient pas couverts médiatiquement. Cependant, la loi ne leur interdit pas l'activité partisane. Quant à la couverture des meetings des têtes de liste, je crois que nous n'avons pas les moyens de couvrir l'activité de 1142 têtes de liste, y compris les 100 listes des candidats indépendants. Les médias ont donc les moyens de couvrir l'activité électorale des chefs de parti et des secrétaires généraux. Mais dans le cas où un responsable de parti délègue une autre personne, celle-ci a tous les droits à une couverture médiatique comme les autres responsables de parti. Que prévoit la loi électorale pour des partis non agréés, mais qui se présentent sous la casquette d'autres formations? Tout candidat a le droit d'épouser un programme d'un quelconque parti. C'est un candidat comme tous les autres. Il a aussi le droit de faire alliance avec d'autres partis qui jouissent des mêmes droits. Que fait votre commission pour éviter des cas de fraude électorale? Notre commission est là pour cette raison. Sa mission commence depuis son installation jusqu'à la proclamation finale et officielle des résultats par le Conseil constitutionnel. La commission doit élaborer un rapport général qui doit être adressé au président de la République. Cela dit, le travail de notre commission ne s'arrête pas à la fin de la campagne électorale. Les rapports que nous avons présentés au président de la République lors des précédentes élections de 2002 et de 2004 ont pris en compte les difficultés et les problèmes ayant survenu pendant la campagne. Et c'est en tenant compte de ces mêmes rapports que le président de la République a décidé d'adresser des directives appelant l'administration à être neutre dans son travail et pendant la campagne électorale.