Pendant que l'Algérie continue à valoir son pesant d'or, le pays le plus riche du Maghreb avec un matelas de 140 milliards de dollars de réserves de change, une bonne partie de la populations vit sous perfusion d'un salaire et/ou d'une pension qui ne font ni grossir ni tromper la faim. Le premier test du président réélu s'annonce dur : résoudre l'équation de pays riche et de peuple pauvre. Il est attendu de lui également de mettre en place une économie capable de produire de la prospérité, de la richesse et d'offrir des emplois. Une économie qui n'est plus rentière comme celle dont dispose actuellement le pays. L'Algérie, il est utile de le reconnaître, continue à offrir à l'ère d'un pétrole cher des salaires moins élevés que ses voisins et cela comme pendant la période des vaches maigres. Les enseignants du palier secondaire débutent leur carrière avec 637 euros au Maroc et 575 euros en Tunisie, alors qu'en Algérie, les professeurs de lycée doivent consommer une quinzaine d'années de leur carrière pour pouvoir atteindre les 300 euros. De quoi s'offrir une cuisinière ou un simple réfrigérateur Eniem, alors que les locataires finissent le mois pour la plupart endettés jusqu'au cou. Un simple petit deux pièces revient de 200 à 300 euros (20 000 à 30 000 DA) à Alger et ses environs, dans un pays où la régulation et la présence de l'Etat font défaut. En Algérie, les médecins généralistes débutent leur carrière avec 250 euros et un spécialiste de niveau bac +12 à 450 euros. Au royaume chérifien, ils (les médecins) commencent à 727 euros et 910 euros et en Tunisie à 791 euros et 935 euros. Dure perspective pour un président qui n'a fait que promettre monts et merveilles pendant une campagne de 19 jours. Le directeur de campagne du candidat Bouteflika a affirmé hier sur les ondes de la radio algérienne qu'il (Bouteflika) tiendra ses engagements en ce qui concerne l'augmentation du Salaire national minimum garanti (SNMG). Le salaire minimum est actuellement fixé à 120 euros depuis l'accord tripartite de septembre 2006, contre 178 euros en Tunisie et 164 euros au Maroc. Depuis, le gouvernement peine à convaincre sur la justesse de son calcul. Il met en avant tantôt les mises en garde du FMI, tantôt une rigueur budgétaire pour mieux échapper aux dérèglements financiers. Cependant, l'embellie financière interdite aux fonctionnaires avait bel et bien profité aux députés sans avoir recouru aux calculettes. Le paradoxe d'un « pays pauvre à milliards » demeure intact. A l'ère où les réserves de change atteignent les 150 milliards de dollars, complétés par environ 50 milliards enfouis dans le Fonds de régulation des recettes, les dirigeants continuent à assister aux départs massifs des Algériens vers l'Europe à bord d'embarcations de fortune. Pendant le second mandat de Bouteflika, le phénomène des harraga a pris des proportions alarmantes. Pour ne citer que les chiffres de 2007, plus de 1500 harraga, dont 1485 nationaux, ont été arrêtés et 83 corps repêchés. L'Etat a préféré thésauriser ses revenus et laisser fuir ses enfants, à la recherche d'une vie meilleure. Sur le plan économique, des pays africains développent une meilleure croissance que celle réalisée par l'Algérie, sans pour autant faire appel à des plans de relance. Dans l'édition 2008 des perspectives économiques globales, la Banque mondiale a prévu une « croissance à deux chiffres dans des pays qui ont su diversifier leurs exportations, comme la Jordanie, le Maroc et la Tunisie ». Dans ces pays, « la croissance devrait faire un bond en 2008 pour atteindre 6,3%, contre 5,4% en 2007 », si l'on se réfère à la même source. Cela dit, tous les plans de relance décidés depuis déjà une décennie n'ont pu servir qu'à atteindre la moyenne africaine de croissance économique, estimée à 6,2%. L'Algérie injecte 15% de son PIB pour faire 5% de recettes. Un sérieux problème de choix économique et de compétences se pose en toile de fond.