Invité hier au forum hebdomadaire du quotidien El Moudjahid, Rédha Malek a retracé le parcours militant et combattant du signataire, pour la partie algérienne, des accords d'Evian, le 18 mars 1962 : Krim Belkacem. La finesse et la diplomatie de Krim Belkacem ont fait de lui, selon Rédha Malek, une grande personnalité connue et reconnue, y compris par les dirigeants français d'alors. De la fameuse «paix des braves», lancée par De Gaulle à la conclusion du cessez-le-feu après la signature des accords d'Evian, Krim Belkacem et ses camarades, a précisé l'orateur, ont su déjouer toutes les manœuvres coloniales et garantir une indépendance intégrale de l'Algérie. «Comme il a rejeté la paix des braves, Krim et ses camarades du gouvernement provisoire (GPRA) ont refusé la dislocation du territoire algérien en refusant l'annexion par la France du Sahara», a-t-il expliqué. Sur cette question, le conférencier est revenu sur les tentatives de l'ex-président tunisien Lahbib Bourguiba de négocier avec De Gaulle une partie du Sahara. C'était en 1961. Selon Rédha Malek, Lahbib Bourguiba s'est rendu en France pour demander au général De Gaulle la récupération de Bizerte, qui était une base de l'Otan à l'époque. «Mais alors que De Gaulle lui avait demandé plus de temps, Bourguiba a tenté de négocier, avec lui, une partie du Sahara. Une demande refusée par le responsable français», a-t-il indiqué. L'information n'a été révélée par le général De Gaulle, selon lui, qu'à la veille du sommet des non-alignés qui s'est tenu en septembre 1961 à Belgrade. «Après la révélation de ses intentions, Bourguiba est rentré en Tunisie et n'a pas pris part à ce sommet», a-t-il ajouté. En sus des tergiversations françaises tout au long du processus des négociations, Krim Belkacem et la délégation algérienne ont fait face à une opposition interne aux négociations avec le colonisateur. L'état-major, à sa tête l'ex-président Houari Boumediène, s'est, a-t-il rappelé, opposé aux négociations. «On reprochait au GPRA d'être trop flexible, trop ouvert et que, eux, ils représentaient l'aile la plus dure de la révolution. Mais en réalité, c'était un problème de pouvoir», a-t-il soutenu en rendant hommage à Krim et à ceux qui étaient avec lui, en l'occurrence Lakhdar Bentobal et Boussouf. «Un trio qui a, a-t-il enchaîné, su maintenir et défendre les principes de la révolution jusqu'au bout en dépit des difficultés et des critiques.» «Ce n'était pas facile de faire de la politique pendant la révolution et de prendre des positions très courageuses vis-à-vis du colonialisme. Le GPRA a eu le courage de mener l'Algérie à l'indépendance», a soutenu Rédha Malek. Le GPRA a connu, a-t-il souligné, un crise «aiguë qui aurait pu tourner très mal». Une crise entre les partisans des négociations et des responsables de l'état-major d'alors qui considéraient que le moment n'est pas encore propice pour aller négocier. Boumediène et son groupe, a noté Rédha Malek, avaient estimé qu'il fallait d'abord régler les problèmes internes. «Les problèmes posés étaient de savoir comment réorganiser le GPRA et comment le mettre plus en contact avec l'intérieur», a-t-il lancé. Rédha Malek a révélé, par la suite, une partie de la discussion qui a eu lieu entre lui et Boumediène à ce sujet. «Ces problèmes n'étaient pas aussi urgents que les négociations. Boumediène disait qu'on est pas mûr pour aller négocier et je lui ai dit : ‘'Mon cher, les négociations pouvaient nous passer sous le nez et que c'était une occasion unique pour régler les problèmes de l'Algérie sur le plan de la colonisation.'' Des problèmes, il y en a eu avant, pendant et après la révolution», a-t-il conclu. Krim Belkacem a été découvert assassiné dans une chambre d'hôtel à Francfort (Allemagne) en octobre 1970.