Et encore, ce qui est généralement rapporté est loin de traduire la réalité des faits puisqu'il est question de pas moins de soixante-dix opérations par jour. Bien sûr, la tentation de présenter la situation sous la forme de cas isolés est toujours forte, sauf que la réalité pousse parfois à de terribles aveux. Hier, deux personnes ont été tuées et dix autres blessées dans l'explosion d'une voiture piégée à l'entrée de la rue menant au siège du Mouvement de l'entente nationale (MEN), du Premier ministre, Iyad Allaoui. L'attentat a été revendiqué par le groupe du Jordanien Abou Moussab Al Zarqaoui, lié à Al Qaîda et ennemi numéro un des Etats-Unis en Irak. « Nous avons reçu deux morts et dix blessés, dont sept policiers et trois civils », a déclaré une source au service des urgences de l'hôpital Yarmouk. Le 3 janvier, une voiture piégée avait explosé au même endroit, dans l'ouest de Baghdad, tuant quatre personnes. Le groupe islamiste Ansar Al Sunna, lié au réseau terroriste Al Qaîda, avait revendiqué cet attentat. Dimanche, le groupe avait annoncé dans un communiqué sur Internet avoir tué Salem Jaâfar Al Kanani, un candidat du parti de M. Allaoui aux élections du 30 janvier. Abou Moussab Al Zarqaoui a déclaré « une guerre farouche » aux élections destinées, selon lui, à donner le pouvoir aux chiites. Zarqaoui affirme que les élections sont « un piège abominable, destiné à assurer aux Rafidha (appellation péjorative des chiites) le contrôle des rouages du pouvoir » dans ce pays. « Nous avons déclaré une guerre farouche à ce processus ignoble, qui constitue une grande farce américaine », a-t-il dit. Le gouvernement irakien redoute la multiplication des actes de violence durant et après les scrutins de dimanche. Il a annoncé des mesures de sécurité draconiennes pour assurer un bon déroulement de ces élections, les premières multipartites depuis plus d'un demi-siècle en Irak. A ce sujet, l'ambassadeur américain en Irak, John Negroponte, a prédit une forte participation aux scrutins, mais averti qu'il pourrait y avoir des problèmes dans deux provinces à prédominance sunnite. La violence persistante, et même quand elle s'aggrave comme c'est le cas actuellement, et probablement même pour une période qu'il est impossible d'évaluer, est banalisée, alors que les Irakiens refusent de la considérer comme une fatalité. Ils ne sont pas seuls dans ce cas puisque d'autres avaient parlé de boîte de Pandore. Des rapprochements ont été établis avec le Vietnam, que la victoire militaire américaine rapide sur l'armée régulière irakienne avait éclipsés, mais les faits sont têtus, comme l'attestent les pertes américaines de plus en plus grandes et de moins en moins médiatisées.