La nature du mouvement du sol que connaît le centre-ville de Aïn El Hammam n'est toujours pas déterminée. En attendant l'entrée en action du groupement de bureaux d'études qui travaille également sur un site à Tigzirt, les services techniques locaux travaillent d'arrache-pied pour peaufiner une banque de données sur ce phénomène. Des informations qui « définiront s'il s'agit d'un glissement de terrain ou d'un tassement, afin d'adapter la solution idoine ». Tout compte fait, le phénomène inquiète de plus en plus les habitants de l'ex-Michelet, et particulièrement les résidants des logements APC/CNEP, situés sur le boulevard colonel Amirouche. Notre visite, la semaine dernière, a coïncidé avec la venue d'une commission ministérielle pour établir un constat. Contrairement à ce qu'avaient déclaré les experts, lors de la première sortie, le mouvement du sol semble plus rapide qu'on ne le pensait. Les premiers signes d'un éventuel glissement de terrain ont été constatés en 2005, apprend-on. Le phénomène s'est confirmé, puis, son mouvement s'est accéléré ces trois dernières années. A moins de six mois avant la fin de l'étude confiée au groupement, la superficie vulnérable semble s'étendre de jour en jour, constate-t-on. Les immeubles 14, 15 et 19, les plus touchés, abritent 22 familles. Ces derniers présentent une inclinaison remarquable, des fissures profondes et des piliers cisaillés. Parmi les mesures d'urgence, les autorités viennent d'entamer la démolition de l'actuel marché couvert, situé en contrebas des immeubles, afin d'alléger le poids sur la surface, mais l'opération a été suspendue suite à une polémique née autour de cette question. Selon des riverains, « la structure sert de soutènement aux immeubles menacés. Mais on soupçonne également que des opportunistes ne s'intéressent qu'a rafler un contrat juteux pour sa démolition ». Du linge qui sèche sur les balcons indique que les habitants ne sont pas encore évacués. Cependant, qu'est ce qui oblige les habitants et les locataires des immeubles APC/CNEP à rester sur place, alors que les bâtisses menacent de s'effondrer à n'importe quel moment ? Les commerces situés sur le site sont-ils assurés contre les effets des catastrophes naturelles ? N'ayant pas trop le choix, les commerçants continuent de travailler, conscients du danger. « Il reste encore des familles là-dedans. Elles vivent la peur au ventre, parce qu'elles n'ont pas où aller. D'autres ont rejoint leurs villages, les pouvoirs publics ne les ayant pas prises en charge », raconte un citoyen. Amine, désormais ex-résidant de la même cité dit : « Des échos ont fait état que les bâtisses seront démolies. Pour ça, il n'y a pas de doute. Nous avons été sommés de quitter les lieux sans pour autant nous trouver une solution de recasement. Nous sommes repartis au village. Mais certains n'ont pas où aller, ils occupent toujours leur logement. » Pour le maire, « toutes les familles seront prises en charge par la wilaya. C'est une décision du wali. Cependant, il se peut qu'elles seront réparties sur plusieurs sites à travers la wilaya, ce que contestent certains acquéreurs ». À 500 m de la cité APC/CNEP, à la rue des Cordonniers et la rue Bounoir, les habitants et les commerçants sont inquiets. Le sol craque sous leurs pieds et aux portes de leurs commerces. Des fissures sont visibles sur la chaussée, plus profondes dans les cloisons. « La semaine dernière, j'ai entendu un craquement, puis en sortant j'ai vu ce mur en face fissuré comme vous pouvez le constater », dit un commerçant. Sur le terrain, des techniciens du service de l'urbanisme sondent le mouvement du sol. « Nous venons d'effectuer 5 sondages dans des endroits différents. Nous installons des appareils, tels des inclinomètres pour mesurer et surveiller le comportement du sol. Et ce, afin qu'on puisse en définir la nature. Les informations que nous récolterons serviront les bureaux qui devront approfondir l'étude », explique un technicien rencontré à la rue Bounoir. Par ailleurs, le phénomène a levé une partie du voile sur la réalité des souscriptions des biens à un contrat d'assurance contre les catastrophes naturelles. Désorientés, plusieurs commerçants n'ont jamais assuré leurs biens. Reconnaissant n'y avoir jamais pensé, un libraire regrette : « Depuis que j'ai appris que le risque était réel, je me suis rendu dans une société d'assurance, mais on m'a répondu que c'était trop tard. Si les autorités n'agissent pas, nous allons tout perdre. » En effet, selon un professionnel des assurances, « une note de la direction régionale de la SAA interdit depuis janvier 2009 la souscription à l'assurance tous les biens qui se trouvent dans le périmètre concerné par le mouvement terrestre », avant d'ajouter : « Dans le cas de Aïn El Hammam, aucun assureur ne peut répondre à de nouveaux souscripteurs. Et ce, pour la simple raison que le site est connu de tout le monde qu'il est à risque. » Sur ce chapitre, rappelons qu'une étude d'IRISCO, une société chargée par le Conseil national des assurances (CNA) de mener une enquête, a démontré le manque d'intérêt chez les citoyens à se conformer à cette mesure obligatoire. Mais la même mission conclut que ce faible engouement est dû au manque de moyens, d'informations, et à une défiance généralisée envers les compagnies d'assurance.