Le président Bouteflika a promis de se mettre au chevet de la justice qui, de l'avis des spécialistes, souffre de nombreux maux. Les pressions de la tutelle, la précipitation dans la prise de décision et la corruption sont quelques-unes des plus grandes plaies de la justice algérienne. L'indépendance de la justice existe, pour l'heure, uniquement dans les discours officiels. Il est rare que la parole soit donnée à ceux qui exercent quotidiennement dans les palais de justice à l'exemple des magistrats, greffiers, avocats, huissiers, experts judiciaires… Le bâtonnier d'Alger a déclaré, dans l'une de ses interventions médiatiques, que le sentiment d'injustice serait de l'ordre de 80%. Même si le chiffre paraît contestable, il semble certain que l'Algérien a perdu confiance en les tribunaux. Pour Mokrane Aït Larbi : « L'amélioration de la situation de la justice passe obligatoirement par la réforme du système politique. » L'indépendance des juges est un préalable à toute réforme. « Ce n'est pas en réunissant des représentants de tel ou tel secteur pendant des mois au Club des pins qu'on arrivera à réformer le système judiciaire. A mon avis, le pouvoir politique ne veut pas d'une justice indépendante, car il y a trop d'intérêts qui seront remis en cause, et l'affaire Khalifa a encore une fois démontré la mainmise de l'Exécutif sur la justice pour arriver à des poursuites sélectives », a estimé M. Aït Larbi dans une interview qu'il nous a accordée dans l'édition du 11 mai 2008. Maître Mostefa Bouchachi, avocat et défenseur des droits de l'homme, explique qu'il n'y a pas de justice indépendante dans la mesure où « les textes qui découlent de la Constitution stipulent que l'Exécutif a la primauté sur toutes les institutions ». La loi organique donne la possibilité au ministre de suspendre les magistrats. Il est à noter également que la loi relative au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) – qui gère la vie professionnelle des magistrats – est présidée par le chef de l'Etat et le ministre de la Justice. La nomination des magistrats dans les postes clés se fait par l'Exécutif. D'autres faits participent à accentuer le sentiment d'injustice des Algériens. Le fait est qu'un procès civil qui nécessite deux années de travail est jugé en quelques mois. Les magistrats sont généralement tenus par des délais relativement courts. Il est à rappeler que le chef de l'Etat a exhorté, lors de sa prestation de serment, les instances judiciaires à jouer « pleinement la mission qui leur est dévolue », soulignant que la réforme mise en œuvre dans ce secteur a permis de mettre en place « les conditions d'une justice plus professionnelle, plus impartiale et plus indépendante dans ses jugements et plus rapide aussi dans son fonctionnement ». Ces moyens « se traduiront à l'avenir, par un niveau d'exigence accru et une sévérité redoublée à l'égard des insuffisances et de tout manquement individuel à l'éthique qui doit animer les magistrats », a-t-il noté. Véritable volonté de mettre de l'ordre dans la justice algérienne ou simple vœu pieu ? Le président a cinq ans pour redorer le blason des tribunaux algériens.