Depuis la construction du barrage de Béni Amrane vers la fin des années 1970, les terres des Cherfaoui ont cessé de gratifier les ménages par les habituelles abondantes récoltes. En effet, les eaux souterraines qui remplissaient les innombrables puits pour l'irrigation de 14 hectares de terres agricoles sont devenues aujourd'hui quasiment rares. Les arbres fruitiers tels que les orangers, les pommiers et les pêchers et les immenses vignobles ont presque disparu. Encouragés par les pluies abondantes pendant l'hiver et le printemps de cette année, les fellahs ont tenté de redonner vie à ces terres restées longtemps abandonnées. Mais, malheureusement les tentatives ont été vouées, presque toutes, à l'échec. La cause en est que le système d'irrigation mis en place par les colons, resté longtemps non opérationnel, s'est détérioré. En effet, les canalisations métalliques qui servaient au pompage d'eau des fonds des puits, entre autres, se sont oxydées et sont devenues inutilisables. Devant la somme colossale que de telles réparations exigent, le manque de soutien financier et l'absence des services d'orientation, ces terres fertiles qui étaient, jadis, généreuses, sont malheureusement condamnées actuellement à l'abandon. A cause de ces entraves, la jeune génération qui habite dans cette localité a été poussée à délaisser le travail de la terre. Le seul Cherfaoui qui lutte encore dans ce domaine est Youcef. Après une longue et riche expérience acquise en travaillant avec un voisin agriculteur et agronome de formation, il a décidé de se lancer tout seul pour redonner vie à cette terre qui ne demande qu'une faveur : être cultivée. Les 16 familles qui y vivent dénoncent l'oubli dont elles se sentent victimes « les responsables ne se rappellent de nous que pour leurs intérêts », nous a dit un père de famille avant d'enchaîner : « Ils n'ont pas oublié de nous envoyer un minibus pour aller voter le 9 avril dernier. Pourquoi n'ont-ils pas mis à la disposition de nos enfants ce même transport pour le ramassage scolaire ? » En effet les enfants sont scolarisés à l'école de Oued El Djenane, à 1 km de là. Ils sont obligés de faire cet itinéraire à pied quatre fois par jour en hiver et en été étant donné que même le morceau de pain et la portion de fromage promis par les services de l'éducation nationale ne sont plus hélas servis. Ce n'est pas uniquement les petits écoliers qui souffrent mais tous les résidants du hameau. Car, la route qui mène aux habitations n'a jamais été goudronnée. Cela affecte la circulation automobile et piétonne. Il n'y a ni réseau d'assainissement, ni éclairage public. Le citoyen recourt par conséquent à la réalisation de fosses septiques. A ce sujet un jeune nous dira : « Après maintes réclamations, des responsables sont venus plusieurs fois effectuer des études pour faire des plans, mais sans jamais revenir concrétiser le projet. » Avant de conclure : « Le téléphone et le gaz de ville restent un luxe pour notre domaine malgré la proximité des canalisations. »