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Ces «moussalsalate» qui défient Prison Break
Publié dans El Watan le 07 - 10 - 2007

Depuis le mythique El Hariq (L'incendie), le feuilleton-culte de Mustapha Badie adapté du roman éponyme de Mohammed Dib, tourné au début des années 1970, le feuilleton algérien suit son chemin cahin-caha vers la petite lucarne et surtout le cœur du téléspectateur national. Fait édifiant : en sondant bon nombre de nos concitoyens, il nous a été donné de constater qu'il existe un véritable engouement pour les productions algériennes, et cela n'est pas exclusivement le propre de la ménagère scotchée à son poste de télévision pour suivre d'un élan pavlovien un épisode de son sketch-chorba ou de son… «moussalsal de 19h» préféré.
Des jeunes, des moins jeunes, des cadres, des universitaires, nous ont affirmé être des téléspectateurs assidus, voire même des aficionados de nos fictions télé. Certains connaissent par cœur le pitch de tous les mélos et autres sitcoms diffusées le long de ces dernières années. Ils connaissent aussi les noms de tous les comédiens qui se sont illustrés comme des «stars» de feuilletons, les Mohamed Adjaïmi, Bahia Rachedi, Larbi Zekkal, Mourad Chellouche, Djamila Arrès, Lynda Yasmine, Azzedine Bouraghda, Malika Belbey et autres Karim Zenasni. Ainsi, malgré l'explosion du marché de la fiction à la faveur des bouquets satellites et leur offre pléthorique de séries en tous genres où se mêle la saga américaine à forte dose d'adrénaline façon 24 heures ou Prison Break, le feuilleton social égyptien (Qadiate raï âme, Une affaire d'opinion publique sur le thème du viol), le polar à la française (Navarro) ou encore le soap opera mexicain «moudabladj» (doublé), paradoxalement, nos feuilletons se défendent plutôt bien face à cette déferlante du zapping à en juger par l'accueil (quoique difficile à quantifier à défaut de médiamétrie) réservé à la dernière production en date : Mawîd maâ el kadar (Rendez-vous avec le destin) de Djaâfar Gacem. Et pour rendre justice aux pionniers, il faut dire que la «drama» à l'algérienne a eu quelques «ancêtres».
Les aînés gardent certainement à l'esprit le combat de Lalla Aïni (superbement campé par Chafia Boudraâ) dans El Hariq, luttant avec la misère dans les méandres de Dar Sbitar et tenant en laisse son diablotin de Omar sous le regard amusé d'une Biyouna à ses débuts et déjà espiègle, le tout sur fond de dénonciation de la condition coloniale. Le public sondé retient aussi le feuilleton El Massir de Djamel Fezzaz (1991), un réalisateur précocement disparu qui devait s'imposer comme un spécialiste du genre (le feuilleton dramatique), enchaînant les succès (Kayd Ezzaman, El Wassiya, Le Joueur). Son chef-d'œuvre aux yeux du public reste incontestablement Chafika. Notons aussi d'autres feuilletons qui ont valu des pics d'audience à l'ENTV, notamment El badhra de Amar Tribèche (qui revient ce ramadhan avec El Layali El baydha), Chahra, Wahiba, El Imtihane essaâb…
Nous voici au siège de la société de production sd-box, la boîte de Djaâfar Gacem et Sid-Ahmed Gnaoui. Elle est pour ainsi dire l'héritière de Timgad-Prod, qui fut créée en 1998 et qui s'était notamment illustrée avec le programme Jil music. Le public découvre le label SD-Box avec ce feuilleton dont quasiment tous les téléspectateurs que nous avons rencontrés ont salué l'originalité, notamment sur le plan technique.
Dans les coulisses de «Mawîd maâ el kadar»
Djaâfar Gacem, la bouille débonnaire, nous reçoit aimablement dans son antre situé dans un appartement chic du quartier huppé de Sidi Yahia (Hydra).
Le décor est «in», le mobilier «fashion». L'univers de Djaâfar Gacem est à l'image de ses films : moderne. Dans une cellule de montage high-tech, le golden boy du paysage audiovisuel algérien s'affaire à fignoler le vingtième et dernier épisode qui devait être diffusé le soir même en access prime time, au grand dam des nombreux fans du docteur Malek alias Athmane Bendaoud, le héros de la série.
D'où sort donc ce lutin de Djaâfar Gacem, lui qui a le don de réussir presque tout ce qu'il touche ? Son parcours est celui d'un artiste qui a su glaner des expériences un peu partout. Il a appris le b.a. ba du métier dans les studios de l'ENTV comme chef opérateur avant de partir parfaire ses études en France. Des études de cinéma bien sûr, à Paris VIII. Il travaille pour des chaînes françaises (TF1, France 2, France 3, Arte) avant de collaborer avec les chaînes arabes ART et MBC. Entre-temps, il crée Timgad-Prod. avec Sid-Ahmed Gnaoui, une société de droit français dont le pendant algérien sera Sd-box. Il touche à tout : pub, événementiel, avant de se lancer dans la fiction avec Ness M'lah City qui fera un carton.
Adoptant un ton jeune, un habillage «cool» et un traitement filmique d'inspiration cinématographique, Djaâfar Gacem tranche par sa démarche audacieuse qui le révèle très vite comme un empêcheur de «filmer en rond». Quartier les Annassers. Dans un autre appartement mué en cellule de montage, le réalisateur Sid-Ali Fettar, autre enfant terrible du cinéma algérien, issu, lui, de la génération post-indépendance (Coulisses, 1967, Raï, 1988, Amour interdit, 1993, Ahlam wa Awham, 2005…) supervise le montage d'un feuilleton dont il vient de terminer le tournage intitulé Makatib (Destinées). Il en assure la production exécutive avec sa société Drama Plus pour le compte de l'ENTV. «C'est une histoire éminemment romantique. C'est le croisement des destins de couples en crise. Cela parle aussi des relations entre jeunes, qu'elles soient amoureuses ou pas. Dans ce feuilleton, il y a tous les éléments d'identification mais cela revêt aussi un caractère universel», explique le réalisateur. Le feuilleton promet des révélations, de nouveaux jeunes premiers comme le comédien Réda Mansouri dont c'est la première apparition. Les titres donnent l'impression de se multiplier à foison, et pourtant les productions par saison se comptent sur les doigts d'une seule main.
Un marché fictif
La création fictionnelle, tous formats confondus (séries télé, sitcoms, téléfilms) est loin derrière le niveau escompté. Ne parlons pas de concurrencer un pays comme la Syrie. «Le marché de la fiction est lui-même fictif», ironise Kamel Yaïche, un metteur en scène plein de verve, avant de souligner : «Quand on voit certaines choses à la télévision, on se demande si c'est nous les crétins ou c'est eux. J'ai l'impression que le téléspectateur zappe sur l'ENTV pour voir des trucs comme Lefhama. Il ne demande pas plus puisque le plus il l'a ailleurs.» Belkacem Hadjadj, le réalisateur de Machahou, de El-Manara, de Hakda wala K'tar et autres Taxi El Medjnoun dresse un constat lucide : «Au vu de ce qu'était le niveau du cinéma algérien, la logique aurait voulu qu'à l'heure actuelle, nous soyons leaders dans ce domaine. Or, nous sommes en pleine régression, tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. Il faut dire qu'à partir du moment où nous avons une seule chaîne de télévision qui doit répondre à tous les publics, que ce soit les femmes au foyer, les jeunes ou les intellectuels, fatalement, cette situation va pousser vers un nivellement par le bas. Il aurait fallu envisager des chaînes thématiques, libérer le champ audiovisuel, mais pour cela, il faut une volonté politique. Ce que fait le Maroc est extrêmement intelligent avec l'ouverture de l'audiovisuel et cela lui a permis de développer des chaînes de qualité.»
Une petite analyse de contenu montre que grosso modo, la majorité de nos feuilletons relèvent du «moussalssal ijtimaî», le mélodrame social frisant parfois le mimétisme vis-à-vis des feuilletons charquis, avec force séquences larmoyantes et pathos à volonté. Ce mimétisme est fortement souligné à travers certaines scènes de marivaudage à l'égyptienne. Cela est marqué dans certains feuilletons par le faste des décors, un luxe confinant au kitsch. Une bonne partie de ces feuilletons donne dans la «fiction de boulevard», avec le plus souvent des huis clos familiaux mettant aux prises la belle-mère et sa bru, des histoires de mariage et de «hammam», le tout expédié avec une touche de réalisme social. Si le propos n'est guère hardi, la forme est généralement peu recherchée, avec des séquences lourdes, des dialogues empesés, un jeu approximatif, des plans carrés, un montage basique et une esthétique, somme toute, peu attrayante. «Il y a généralement très peu de risques dans le feuilleton. Le risque est dans le cinéma» résume, tranchant, Belkacem Hadjadj.
«On fait des feuilletons assis»
Sid-Ahmed Agoumi, icône du cinéma algérien avec une cinquantaine de films au compteur et presque autant de pièces de théâtre, et que le public a retrouvé dans Mawid maâ el kadar, porte du haut de ses 67 ans un regard désabusé sur nos feuilletons-maison. Nous avons eu le plaisir de le rencontrer tout dernièrement au festival de théâtre de Limoges (Les Francophonies en Limousin). Installé à Paris depuis 1994, l'année de l'assassinat de son ami Azzeddine Medjoubi, il revient sur le petit écran dans la peau de l'inspecteur Allel, un fin limier de la police qui jure de venger la mort de la belle Feriel, la femme du docteur Malek. «Aujourd'hui, on fait des feuilletons assis. Ça parle assis, ça joue assis et ça se déplace peu. Ça s'étire, ça s'étire, et l'intrigue avance paresseusement après avoir parlé autour du café pendant un quart d'heure. Tout cela afin de boucler coûte que coûte 20 épisodes», dissèque-t-il (voir interview). Même le directeur de la programmation de l'ENTV, Djamel Ben Rabah, se faisant l'écho des réactions du public, admet le niveau très moyen des fictions algériennes : «D'une façon générale, il n'y a pas d'insuffisances majeures. Toutefois, nous avons constaté que le public est très exigeant par rapport aux émissions humoristiques. Mis à part la caméra cachée qui a accroché une audience assez importante, les autres émissions n'étaient pas assez consistantes. Les feuilletons algériens également ont fait l'objet de reproches. Les spectateurs ont déploré notamment la qualité de l'image et le choix des castings», explique-t-il (La Tribune du 9 septembre 2007). «On a l'impression de voir le même feuilleton. Pourquoi ne pas faire par exemple un feuilleton sur la corruption ?», s'interroge Belkacem Hadjadj. Sid-Ali Fettar abonde dans le même sens : «Il y a des milliers de sujets qui ne demandent qu'à être traités. Pourquoi ne fait-on pas une série sur les harraga ?» Certains s'étonnent aussi que la figure de l'activiste de droit divin soit totalement occultée malgré quinze ans de terrorisme alors que les Jordaniens ont commencé depuis un bon moment déjà à travailler sur l'émergence de l'islamisme armé avec un réalisme troublant. L'écrivain et chroniqueur Y. B., alias Yassir Benmiloud, faisait à ce propos une remarque pertinente. Dans un entretien à Charlie Hebdo suite à la sortie de son roman L'Explication (J. C. Lattès – 1999), l'ancien trublion de la presse algérienne observait : «On a la plus grande concentration de fils de p…au mètre carré, et on ne l'exploite pas en littérature ! Si on ne peut même pas sortir un bon thriller de dix ans de génocide…» Cela vaut pour la fiction télé qui exploite très peu cette veine (pour cause de Moussalaha ?). «On retrouve toujours les mêmes archétypes folkloriques», note un critique de cinéma. Des archétypes du paysan naïf, de la belle-mère acariâtre, du père autoritaire et de la petite jeunette candide qui ne rêve que de se caser. Depuis quelque temps, les nouveaux riches ont fait leur apparition dans le salon cathodique.
Interrogés sur les raisons de ce manque d'imagination, tous les réalisateurs que nous avons rencontrés ont été unanimes à déplorer une crise de scénario. «Ecrire pour la télé est un métier à part. Il faut également noter que scénariste et dialoguiste sont deux métiers différents», dit Belkacem Hadjadj. «Nos feuilletons ne sont pas écrits par des spécialistes. Les personnages ne sont pas fouillés. On aboutit alors à des caractères peints à gros traits, des situations caricaturales. Le scénariste est censé présenter l'histoire d'une façon dramaturgique. Il y a de l'amateurisme dans l'écriture de la plupart des scénarios», regrette Sid Ali Fettar. Pour innover, des pays comme le Liban ou l'Egypte ont carrément acheté les concepts de séries américaines très populaires telles Urgences (dont la version française a été un flop) ou encore Desperate Houswives.
Empathie et effet de miroir
Comment expliquer donc le bon score d'audience de certains feuilletons comme Chafika, El Badhra ou Mawîd maâ el kadar ? Tout d'abord l'empathie, l'effet d'identification. L'effet de miroir comme dit Belkacem Hadjadj : «Quand on lui parle de lui-même, l'Algérien s'intéresse, même quand l'image est déformée, même avec une morve au nez», analyse-t-il. Le fait est qu'il se reconnaît dans le «je» de l'acteur algérien. «Même quand l'image et le son sont pourris, même avec des faux raccords, quand ça parle de toi, tu écoutes», explique pour sa part Lynda, étudiante en cinéma et esthétique à la Sorbonne. Pour elle, les spectateurs algériens sont des «harraga de la zappette» qui prennent le temps de s'arrêter à la station ENTV quand un programme les pince dans la corde sensible : «Ce qui nous plaît dans Prison Break, Friends ou Sex and the City, c'est que c'est techniquement très bien fait, très bon scénar, très bons effets, c'est impeccable. Mais il n'y a pas d'identification tandis que dans un feuilleton algérien, il y a une compensation émotionnelle. Les gens demandent juste un minimum de sincérité.» Il y a aussi le fait que le feuilleton vienne à nous, et ce, dans un contexte où le réflexe d'aller en salle de cinéma – quand salle il y a – a disparu de la praxis culturelle des Algériens. A quoi il conviendrait d'ajouter un «effet ramadhan» : toute la famille est regroupée autour de la télévision totémique nationale, à une heure de grande écoute qui plus est, pour le repas rituel de la rupture du jeûne. Une plage horaire qui enregistre jusqu'à 97% d'audimat pour l'ENTV selon une étude, et qui s'étale de la séquence chaâbi post-ftour au feuilleton dramatique du jour, en passant par les interminables pages de pub (sponsoring oblige), les sketches chorbas et la caméra cachée. «Nous, on met l'ENTV pour l'adhan et on regarde jusqu'à 20h. A l'heure du JT plombé de l'Unique, on change de nationalité», lâche un «téléphage».
Prison cathodique
Pour conclure, le nœud se situe à deux niveaux fondamentaux : le niveau artistique et le niveau financier. L'amélioration de la qualité ne peut se produire que si un investissement conséquent est consenti au niveau de la formation. Formation des comédiens mais aussi des équipes techniques et des scénaristes. Quant à la production, elle ne peut venir que d'une volonté politique comme le relèvent à l'unisson tous les professionnels rencontrés, d'ouvrir le champ audiovisuel, seul gage pour la libération du génie créatif. Tant que perdure le verrouillage, point de salut pour nos vendeurs de rêves. Et pour cause ! Les fictions télé – comme leur nom l'indique – dépendent étroitement des chaînes de télévision, pourvoyeuses de budgets. L'ENTV qui est à tous les segments (production, programmation, diffusion), ne peut continuer à conditionner seule l'imaginaire des Algériens. La «guerre» de l'image (sur fond de guerre du sens) requiert aujourd'hui une mobilisation forte sur ce terrain-là, ne fût-ce que pour «corriger» l'image du Maghrébin et du Moyen-oriental telle que véhiculée par les fictions occidentales, particulièrement US. «La meilleure façon de contrer l'offensive des promoteurs de la loi du 23 février eût été de reconstituer les images des enfumades de triste mémoire», souligne Sid Ali Fettar qui rappelle au passage l'épisode de ce feuilleton syrien controversé sur Fadhma N'soumer, et qui aurait appelé une riposte créatrice de même calibre. De son côté, la profession tente de s'organiser, notamment à travers l'Association des réalisateurs professionnels présidée par Belkacem Hadjadj. «Nous tentons de mettre un peu d'ordre de façon à ce que l'argent public aille vers les vrais professionnels. Aujourd'hui, on crée une société de production comme on ouvre une épicerie. Il y a des films faits par des techniciens et de pseudo-réalisateurs viennent ajouter leur nom au générique. C'est inacceptable. Pour mettre fin à tout cela, nous envisageons de créer une carte professionnelle», dit le réalisateur de Machahou. Ce dernier lance également un appel pour encourager les cinéclubs dans les écoles. «Nos enfants ne sont pas initiés à la culture de l'image. Ils deviennent une proie rêvée pour les images qui viennent d'ailleurs. Moi, mes premières images venaient de l'école, c'est ça qui m'a donné envie de faire du cinéma. On se servait d'un drap blanc et d'un vieux projecteur. Aujourd'hui, c'est cent fois plus simple : il suffit d'un vidéoprojecteur et une caisse de DVD. Mais paradoxalement, le cinéma a déserté l'école», déplore-t-il. Maâwid maâ el kadar serait-il alors l'arbre qui cache la forêt plutôt que l'augure d'une ère nouvelle ?
Il est à craindre que les conditions générales de création s'avèrent de plus en plus difficiles au sein d'un paysage audiovisuel marqué par l'autoritarisme d'un pouvoir politique qui s'obstine à tout cadenasser.
Le public algérien mérite certainement mieux que ce régime inculte qui, à l'heure du numérique, continue de tourner à l'analogique. Et en noir et blanc de surcroît. Un régime qui a une peur bleue du mot «imagination»…


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