Après un vrai faux suspens, la composante du gouvernement est tombée hier. C'est la même. Exception faite du départ du président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Bouguerra Soltani, qui avait émis le vœu d'être déchargé de ses fonctions ministérielles, et qui, en réalité, n'en occupait aucune, ce fut un ministre sans portefeuille, les autres ont tous été reconduits, à l'instar du Premier ministre Ahmed Ouyahia. Aucune place donc pour la surprise. Le chef de l'Etat l'avait affirmé à moult occasions : il inscrivait son troisième mandat dans « la continuité ». Une continuité qui suppose la poursuite des mêmes politiques, mais pas forcément avec la même composante gouvernementale dont certains membres avaient été publiquement « descendus » par le président Bouteflika avant de décider de les reconduire. Lui-même avait conclu, en août dernier, à « l'échec » des choix économiques imprimés au pays. Les privatisations patinent, on est plus que jamais dépendants de la rente pétrolière, les réformes qui devraient toucher les secteurs bancaires, la justice et l'école n'avancent pas, l'agriculture et la santé sont en jachère. Autant de paramètres, soutiennent les analystes, qui auraient pu provoquer et justifier au moins quelques remaniements. Le constat de l'échec à lui seul aurait été à même de produire l'électrochoc. Tout compte fait, ce n'est point l'obligation de résultat qui préside à la nomination ou à l'éviction d'un ministre, mais bien le gage de fidélité et d'allégeance qu'il soit capable de donner. Le président Bouteflika – que l'on croyait retiré après la cérémonie d'investiture pour réfléchir à comment donner un sens à son troisième mandat, sévèrement critiqué par l'opposition – a fini par maintenir le statu quo. Dans le gouvernement en place et avec lequel le chef de l'Etat travaille depuis plusieurs années déjà, il y a en réalité deux pôles. Le noyau dur qui gère la plupart des postes de souveraineté, représentés par le trio Noureddine Zerhouni à l'Intérieur, Chakib Khelil à l'Energie et Abdelhamid Temmar à la charge de la Promotion des investissements. Ces trois ministres ont été ramenés par Abdelaziz Bouteflika à l'entame de son premier mandat en 1999. Ils constituent une sorte de garde prétorienne aux côtés du département de la Justice confié également depuis 2003 à un autre fidèle collaborateur, Tayeb Belaïz en l'occurrence. Le deuxième pôle est composé essentiellement de loyaux serviteurs, de lieutenants qui ont redressé le Front de libération nationale (FLN) en 2004. Ils sont nombreux. Il s'agit surtout de Abdelaziz Belkhadem, ministre d'Etat, de Tayeb Louh, ministre du Travail, de Rachid Harraoubia de l'Enseignement supérieur, de Ould Abbès, ministre de la Solidarité nationale, de Saïd Barkat qui a permuté récemment avec son collègue Amar Tou devenu ministre des Transports, et de Mahmoud Koudri placé au poste de ministre chargé des Relations avec le Parlement. Les autres partis de l'Alliance présidentielle gardent aussi leurs portefeuilles. Inutile de revenir sur les bilans de chacun. Mais les raisons du maintien de la même équipe gouvernementale insérées dans le communiqué laconique de la présidence de la République ne résistent à aucune critique. Il est surprenant que l'on justifie « l'immobilisme » par les contraintes d'un calendrier international que l'on sait pas aussi chargé que cela. Il est également difficile de déchiffrer et de donner un sens à la notion « des exigences internes » qui ont amené le président Bouteflika à reconduire la même composante gouvernementale ! Le pays avait bel et bien besoin d'un changement, on lui a imposé la continuité dans l'échec. Les arguments, tous les arguments sont irrecevables.