Le vent de fronde qui souffle sur le parti de Bouguerra Soltani confirme les carences de la pratique politique en Algérie. Quel avenir peut-on imaginer pour le Mouvement de la société pour la paix (MSP) à l'ombre de la crise qui le divise en deux? Le pari de Bouguerra Soltani de rassembler sa famille en laissant les portes ouvertes à tous les dissidents est le mieux que l'on puisse dire, perdu et sa tentative de conciliation avortée. A vrai dire, le premier responsable de ce mouvement Bouguerra Soltani n'a jamais su bien gérer la situation, notamment depuis la tenue du quatrième congrès du parti en 2008 qui a donné lieu à une guerre de leadership entre lui et Menasra Abdelmadjid, cadre du parti. Cette situation qui a failli bloquer alors les travaux du congrès n'a été dénouée qu'au troisième jour avec le retrait de Menasra de la course à la présidence du MSP. Mais le torchon n'a jamais cessé de brûler depuis et le paroxysme est atteint juste après la dernière élection présidentielle. Déjà durant la campagne électorale, le MSP s'est fragmenté en deux ailes se disputant le soutien de Bouteflika. Ainsi, le 13 avril, soit quatre jours après l'élection, la bête noire numéro 1 de Bouguerra Soltani annonce la création d'un nouveau parti (un mouvement parallèle) appelé le Mouvement de prédication et de changement (MPC). Depuis, la formation de feu Nahnah n'a jamais connu une aussi grave hémorragie qui a touché toutes ses composantes, des cadres du parti jusqu'aux simples militants. Répondant à l'appel de Abdelmadjid Menasra, les fidèles quittent les uns après les autres le parti et rejoignent l'autre mouvement parallèle. Au lendemain de la création de cette nouvelle formation, 28 parmi les 52 députés (53,85%) que compte le MSP, ont signé leur divorce d'avec Soltani. La direction du parti a gelé l'appartenance au groupe parlementaire du MSP de 9 dissidents. Au lieu de sauver le bateau en rade, M.Soltani l'a noyé davantage en minimisant les dégâts et en lâchant les rames. Le 17 avril dernier, à l'issue de la clôture de la rencontre des présidents de bureau de wilayas tenue à Zéralda, le premier responsable du MSP a remué le couteau dans la plaie en reprochant aux dissidents une erreur de conduite. Il a estimé alors à 3% le nombre des sécessionnistes. Entre-temps, les départs en cascade n'ont jamais cessé. Le 24 avril, une nouvelle est tombée comme un couperet, l'ampleur de la crise va crescendo. 75% des élus du MSP dans la wilaya de Boumerdès, soit 25 cadres dont trois élus APW, 2 présidents APC et 20 membres élus au sein des différentes assemblées communales de wilaya, ont signé un communiqué rendant publique leur démission officielle du parti. A cette date, voyant le contrôle de la situation lui échapper, M.Soltani a émis le souhait d'être déchargé de ses fonctions au sein du gouvernement en sollicitant le Président Bouteflika par courrier, pour se consacrer aux affaires de son parti. Ce qui fut fait quelques jours après. Là encore, au lieu de redresser la barre, la situation dans la sphère empire. Le 2 mai, 31 élus d'Alger ont annoncé leur démission du MSP et rejoignent le parti de Menasra. Ce sont des présidents d'APC, des vice-présidents, des maires délégués, des élus APW et des conseillers communaux représentants du parti. Ces renonciateurs ont expliqué leur geste par la déviation du parti du MSP de la ligne tracée par feu Mahfoud Nahnah, le reniement de l'identité du mouvement, le non-respect de ses structures légitimes élues, la marginalisation des militants fidèles aux préceptes de feu Mahfoud Nahnah et de ses partisans...Le même jour, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, a déclaré à Alger, qu'il n'y a pas de raison pour le rejet des dossiers des nouveaux partis politiques et de leur agrément s'ils répondent à toutes les conditions requises. Une déclaration qui a réjoui Menasra et ses partisans. Mais revenons aux faits: le 3 mai, le président du MSP, Bouguerra Soltani, a appelé, à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, les membres dissidents à revenir au bercail, excluant de fait la tenue d'un congrès extraordinaire. Peine perdue. Menasra continue son avancée. Le 4 mai, soit avant-hier, 564 femmes cadres quittent le parti et 11 élus locaux de Relizane annoncent leur démission. Il y a péril en la demeure.