Le tribunal de Sidi M'hamed d'Alger a traité hier plusieurs affaires concernant la presse. Des décisions, jugées graves par les avocats de la défense, ont été prises à l'encontre des journalistes et des quotidiens. Le procès opposant les directeurs d'El Khabar, Ali Djerri, et d'El Watan, Omar Belhouchet, et la journaliste Salima Tlemçani au premier responsable de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), Ali Tounsi, et son secrétaire général, Mahmoud Amokrane, a été clos hier et ce, après plusieurs audiences et nombreux reports. Le 28 décembre 2004, l'affaire a été mise en délibéré pour le 25 janvier 2005. La partie civile avait demandé 300 millions de dinars (30 milliards de centimes) de dommages et intérêts. Le procureur avait requis six mois de prison ferme pour chacun des concernés. La défense a plaidé l'innocence. Hier, le tribunal a condamné les deux directeurs de publication et la journaliste à six mois de prison avec sursis, au versement d'une amende ferme d'un montant de 50 000 dinars chacun ainsi qu'à trois millions de dinars de dommages et intérêts. Khaled Bourayou, avocat de la défense, a déclaré que cette décision, lourde, ne se justifie pas du point de vue des faits et vise la sanction de la liberté de la presse. « Nous constatons que, depuis quelques mois, les décisions prises par la justice contre les journalistes sont extrêmement graves. Jamais nous n'avons assisté à des sanctions aussi lourdes contre la corporation de la presse comme cette fois-ci », a souligné Me Bourayou. L'affaire remonte à 2003. Au début, elle avait concerné la DGSN et les responsables des deux quotidiens. A mi-chemin, les responsables de la DGSN ont été déboutés. Le juge avait signifié alors aux représentants des plaignants l'irrecevabilité de leur plainte, et ce, pour violation des règles de procédure. L'affaire aurait pu prendre fin à ce stade n'était l'implication du ministère de l'Intérieur qui avait adressé une citation à comparaître devant le tribunal aux responsables des deux quotidiens ainsi qu'à la journaliste. Hier, un autre procès a opposé Le Soir d'Algérie à un responsable de la Banque de développement local (BDL). Responsable cité dans un article qu'il a jugé diffamatoire. Lors de l'audience, le procureur a requis 6 mois de prison avec sursis contre l'auteur de l'article en plus d'une amende ferme d'un montant de 50 000 DA. Le parquet a demandé la suspension du journal pour une durée de six mois. L'affaire a été mise en délibéré pour le 22 février prochain. Me Bourayou a relevé que le recours à la suspension d'un journal pour une diffamation est un précédent grave. « Il existe une disproportion et la proposition de suspendre Le Soir d'Algérie est une décision qui ne s'explique pas et les motivations sont, ni plus ni moins, d'ordre purement politique », a-t-il dit, ajoutant que le recours à cette décision est prévu par l'article 99 du code de l'information lorsqu'il s'agit seulement de violation des dispositions pénales prévues par ce code. « Or, dans le procès opposant le quotidien Le Soir d'Algérie à la BDL, il s'agit d'une affaire de diffamation et la mesure de fermeture du journal n'est pas justifiée », a-t-il souligné. Par ailleurs, trois autres affaires ont été également jugées hier, l'une a opposé le directeur d'El Khabar, au ministère de l'Agriculture. M. Djerri a été condamné à 2 mois de prison avec sursis et au payement d'une amende de 50 000 DA. L'autre affaire a concerné le directeur du Soir d'Algérie, Fouad Boughanem, et le chroniqueur Rédha Belhadjoudja ainsi que Farid Alilat, ex-responsable de la rédaction du quotidien Liberté. Ils sont accusés d'offense au chef de l'Etat suite à la publication d'un article dans Liberté qui avait ouvert ses colonnes aux journalistes du Soir d'Algérie alors frappé d'une suspension. Le tribunal a relaxé Fouad Boughanem et condamné les deux autres journalistes à 6 mois de prison avec sursis et à une amende ferme de 2,5 millions de dinars. Liberté a été condamné à verser une amende ferme de 250 millions de centimes. L'ex-directeur du Soir d'Algérie, M. Souissi, a été condamné dans une affaire l'opposant à la BDL à une amende ferme de 50 000 DA et à 200 000 DA de dommages et intérêts.