Genève. De notre correspondant Selon les dernières projections, le parti de Christoph Blocher a obtenu près de 29% des voix. Du jamais vu depuis les années 1920. La vague nationaliste déferle même en Suisse romande, où l'UDC était moins présente. A Genève, ville internationale, le parti nationaliste ravit la première place aux socialistes avec plus de 20% des voix. Dans le canton de Vaud, ses thèses ont également convaincu plus de 20% de l'électorat. L'UDC est là aussi le premier parti cantonal. Dans le reste du pays, c'est la même tendance. Là où l'UDC est forte, elle s'est renforcée. Au détriment de la gauche qui, comme sa cousine française, est en pleine débâcle. Les socialistes ont perdu plus de quatre points au niveau national (19,3 %), soit leur niveau le plus faible depuis 1991. Il sauve de justesse leur deuxième place alors que les Verts ont nettement progressé (+1,8 point à 9,5%). Les deux autres partis gouvernementaux, le Parti radical démocratique (15,8 %, – 1,5%) et le parti démocrate chrétien (14,7 %, + 0,3%) limitent eux la casse. Comment expliquer qu'un pays bascule pareillement à droite alors que son taux de chômage est quasi nul et que l'économie tourne à plein régime ? La réponse est simple : la Suisse a peur de l'étranger et l'UDC a surfé sur cette vague en menant une campagne très dure avec des actions jugées xénophobes et islamophobes par beaucoup d'observateurs de la scène politique helvétique. A commencer par les affiches de l'UDC, qui montrent trois moutons blancs poussant un congénère noir hors du drapeau suisse. Elles n'ont pas manqué de faire réagir l'ONU qui a regretté ce dérapage raciste. Le parti nationaliste s'est attaqué également à la présence des minarets sur le territoire suisse. L'UDC n'aime pas non plus l'Europe. Et elle combat l'idée d'une adhésion de la Suisse dans l'Union européenne de toutes ses forces. «L'adhésion de la Suisse à l'UE devra disparaître de la tête des derniers politiciens europhiles», a d'ailleurs martelé hier soir le président de l'UDC Ueli Maurer qui s'est dit satisfait de la progression électorale de son parti. «Notre rôle de leader est incontestable», a-t-il déclaré. «La population a soutenu la politique de l'UDC.» Bref, la Suisse n'a pas fini d'être une île au cœur même de l'Europe. D'autant que son système politique bâti sur le consensus, le dialogue et une répartition proportionnelle des forces en présence au gouvernement va en prendre un coup. L'UDC a averti hier soir : elle veut la tête de trois ministres sortants afin d'étancher sa soif de puissance et elle pourrait demander le départ des socialistes du gouvernement. Le temps de la formule magique, qui a permis à la Suisse de faire une place au soleil, est bien révolu. Le coucou politique sonne l'heure du putsch politique. Et Blocher, que les autres partis voulaient chasser du gouvernement, est aujourd'hui vissé à son siège de conseiller fédéral. La fin des illusions pour beaucoup. La belle helvétie, terre d'asile, berceau de la Croix-Rouge en prend pour son grade.