Repeinte à neuf, la silhouette élancée, inscrite dans le ciel parisien depuis le 15 mai 1889 pour l'Exposition universelle, elle domine toujours la ville du haut de ses 300m, accueille près de 7 millions de visiteurs par an et a assuré la postérité à son constructeur, Gustave Eiffel. S'illuminant la nuit et scintillant de ses 20 000 ampoules, elle a retrouvé son éclairage habituel après s'être parée d'un bleu nuit pendant les six mois, en 2008, de la présidence française de l'Union européenne. Mais elle n'a pas toujours fait cette unanimité. En 1887, la « pétition des artistes » dont Guy de Maupassant, Charles Garnier et Charles Gounod vilipendait le projet de « l'inutile et monstrueuse tour Eiffel ». Et Gustave Eiffel fut, lui-même, au début réticent à ce projet de pylône métallique de deux de ses ingénieurs, Maurice Koechlin et Emile Nougier, ne reprenant l'idée à son compte qu'après embellissement de l'architecte Stephen Sauvestre. L'inventeur génial avait vu juste mais n'imaginait peut-être pas à quel point sa tour allait devenir une star internationale. Une exposition-parcours retracera du 15 mai au 31 décembre « l'épopée de la tour Eiffel », au 1er étage et dans les escaliers du monument. Des maquettes de la tour, en métal,et en albâtre orné d'émaux, accueillent le visiteur. Photos du « montage », tel un mecano géant, avec des échafaudages jusqu'au premier étage et le Trocadéro en toile de fond, alors que côté Seine, il a fallu installer des caissons à air comprimé pour stabiliser le sol : une série de photos et de documents de travail composent un pupitre d'architecte. Les pièces de fer puddlé (à basse teneur en carbone, plus souple que la fonte) arrivaient en partie montées et étaient rivetées sur place. C'est la même technique déjà éprouvée par l'ingénieur Eiffel sur le pont du Douro en 1877, projet d'une totale simplicité dont un cliché montre l'arc en voie d'achèvement, fixé par des câbles, les piliers seuls nécessitant de échafaudages. Eiffel a aussi construit le viaduc de Garabit (122m au-dessus d'un torrent), la structure interne de la statue de la Liberté de Bartholdi qui trône à New York, l'Observatoire de Nice... Sa réputation entachée par le scandale de corruption lors de la création du canal de Panama, Eiffel entame une seconde carrière scientifique à 70 ans, en lançant un laboratoire d'aérodynamique sous sa tour, puis rue Boileau (XVIe) où il travaille pour Bréguet ou Blériot, inventant en 1917 un avion de chasse rapide. Visionnaire à la Jules Verne, il avait dès 1890 un projet de « ligne métropolitaine centrale avec des gares souterraines et aériennes » ainsi qu'un « projet de pont sous-marin pour la traversée de la Manche entre Folkestone et le cap Gris-Nez »... Une partie de l'exposition (gratuite) fait aussi revivre un Eiffel intime, bourgeois, père de cinq enfants et infatigable entrepreneur, qui s'éteindra à 91 ans.