Tout est démesuré, comme la ville hôte avec ses gratte-ciel qui se perdent dans les nuages et qui narguent la voisine Hong Kong, un peu jalouse avec ses vieux buildings. Le message est clair : tout se passe désormais en Chine. Shanghai. De notre envoyé spécial Croissance insolente malgré la crise, modernisation galopante, consommation effrénée, la nouvelle Chine fait dans le gigantisme. Les superlatifs s'enchaînent comme des perles. La ville de Shanghai ne cherche pas à raconter une histoire aux dizaines de milliers de touristes mais à les épater, les éblouir. Arrogante par son appétit de toujours plus de gigantisme. elle entend faire de l'Exposition universelle une olympiade, avec tous les records mondiaux à la clé : plus de visiteurs (plus de 100 millions attendus, à plus 90% de Chinois), plus grand stand, plus étendu espace… Et semble en voie d'y parvenir. Deux semaines après l'ouverture, il faut toujours s'armer de patience pour entrer dans le site de l'expo. La sécurité est à son maximum : rayons X, fouille au corps, boissons et briquets interdits, sacs présentés ouverts… Cela ne décourage pas les visiteurs. Une fois à l'intérieur, ça recommence devant les pavillons de certains pays. A la tête du palmarès, en dehors du pavillon chinois inaccessible dès le matin, noyé par la foule, l'Arabie Saoudite avec le budget le plus conséquent (146 millions de dollars) et son écran 4 D d'une surface de près de 1600 m2, record en la matière. Le spectateur a l'impression d'être dans le film, de fouler le sable saoudien, vertige assuré. L'émotion est au rendez-vous lorsque apparaissent des images du pèlerinage de La Mecque et de La Kaâba avec des milliers de personnes en train de psalmodier avec un fond musical oriental. Le pavillon reçoit en moyenne 25 000 visiteurs par jour, attirés par cette nouvelle technologie. Des chiffres et des records 189 pays et une cinquantaine d'organisations participent à la manifestation qui fermera ses portes le 31 octobre. Le jour de l'ouverture, 500 000 billets ont été écoulés. Shanghai se fixe comme objectif de dépasser le chiffre des 64 millions de visiteurs de l'Expo d'Osaka en 1970 et s'est fixé le seuil symbolique des 70 millions d'entrées. Le pavillon français est en tête du podium, Chine hors concours, avec une moyenne de 60 000 visiteurs quotidiens et détient le record de 100 000 visiteurs pour la seule journée du 1er mai. Le coût du site de l'Exposition universelle inaugurée vendredi 30 avril est estimé à 4,2 milliards de dollars. En incluant les dépenses pour la construction d'infrastructures dans la ville, le budget avoisinerait les 43 milliards. Le matraquage publicitaire est à la mesure de l'Expo : impossible de prendre un bus, de faire plus de deux pas sans tomber sur un message enthousiaste vous invitant à vous rendre illico sur les lieux, un espace de 5,2 km2. Toutes les stars chinoises sont appelées en renfort. A la télé, comme sur les affiches géantes, Jackie Chan, l'acteur hongkongais, appelle ses compatriotes à faire de cet événement une réussite en insistant sur la protection de l'environnement. Les organisateurs ont opté pour l'urbanisation et l'écologie avec pour thème « Meilleure ville, meilleure vie ». Ces manifestations sont également considérées comme « des olympiades des sciences, des technologies et des créations et inventions », puisque les pays participants ne ménagent aucun effort pour mettre en relief les différents aspects de leurs cultures et civilisations. Différentes initiatives sont mises en avant pour souligner l'urgence à mieux gérer les énergies, en faisant la part belle à celles renouvelables et naturelles, et au vivre ensemble dans les grandes métropoles. Comment concilier l'espace et la nature ? Comment garder son humanité dans un milieu forcément agressif ? Les urbanistes traquent le vert, imaginent une cité dense qui allie confort et environnement. Un pari difficile.