Comme un cancer, le terrorisme, qui a frappé des pays d'Afrique du Nord, étend ses manifestations métastasiques dans les pays limitrophes, transformant la zone sahélo-saharienne, autrefois prisée pour la fierté et l'hospitalité de ses habitants et la beauté de ses paysages, en un vaste territoire où s'étendent d'étranges pratiques», a indiqué hier Boubacar Gaoussou Diarra, directeur du Caert, à l'ouverture à Alger des travaux du séminaire de formation des experts du contre-terrorisme des six pays de l'Afrique du Nord : Algérie, Mauritanie, Tunisie, Sahara occidental, Libye et Egypte. M. Boubacar a mis l'accent sur le lien entre terrorisme et la traite des êtres humains, la contrebande de cigarettes et le trafic de drogue, en passant par la circulation et la prolifération des armes légères, qui, selon lui, constituent autant de «sources de financement pour le terrorisme qui en contrepartie assure la liberté de circulation et la sécurité aux bandits et aux trafiquants d'un pays à un autre, du golfe de Guinée à la rive sud de la Méditerranée, avant d'aller constituer autant de menaces dans les pays de la rive nord de la Méditerranée». Boubacar Gaoussou Diarra a mis l'accent sur le danger du terrorisme en disant : «Il ne faut pas se voiler la face, il y a des régions africaines qui sont plus en contact avec les manifestations terroristes que d'autres. L'Afrique du Nord, la Corne de l'Afrique sont particulièrement concernées.» A ce titre, Boubacar Gaoussou Diarra a précisé que ce séminaire, le quatrième du genre, va contribuer à l'émergence d'une expertise éclairée en matière de lutte contre ces menaces. «Il est question de renforcer les actions dans notre continent à travers le réseau des points focaux et le Caert qui ambitionne d'être un centre d'information pour la prévention et la lutte contre le terrorisme», a-t-il indiqué en expliquant qu'il faut assécher les sources du terrorisme à travers une lutte contre la pauvreté et l'extrémisme. Les Etats africains, a-t-il noté, sont conscients de ce péril et ont de ce fait décidé de le combattre et faire tout pour protéger la vie des citoyens de manière efficace. «La lutte contre ce fléau nécessite donc l'identification des différentes menaces, la priorisation de celles-ci afin que les solutions de sortie de crise soient trouvées. Ce séminaire est donc un bon exercice pour tous les points focaux africains, mais également à leurs partenaires occidentaux des communautés régionales économiques, aux chercheurs des centres de recherche africains, institutions régionales et organismes des Nations unies», a-t-il indiqué. Intervenant en qualité de représentant d'un pays qui a participé au financement de ce séminaire, l'ambassadeur d'Espagne à Alger a, pour sa part, mis l'accent sur le caractère mondial du terrorisme en expliquant que l'Espagne, qui a beaucoup souffert du phénomène, partage les préoccupations des Etats africains et soutient l'action du Caert. «Nous faisons face à la même menace qui appelle une meilleure formation, une prévention et une lutte (…). Nous espérons que le séminaire aboutisse à une connaissance de la menace terroriste afin de pouvoir la combattre efficacement», a déclaré l'ambassadeur en exprimant la disponibilité du gouvernement et de la Guardia civile de son pays à «aider et soutenir» les actions des points focaux, ces spécialistes de chacune des menaces répertoriées, dans chacun des pays africains afin qu'ils servent d'intermédiaires dans les débats et les discussions autour de ces sujets. De son côté, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, a déclaré que la lutte contre le terrorisme «exige une détermination sans faille à quelque niveau que ce soit et une mobilisation de tous les instants». Selon lui, le séminaire constitue le prolongement naturel de ceux qui l'ont précédé, tels que ceux consacrés au problème des explosifs en Afrique, tout en annonçant d'autres rencontres similaires axées sur la formation des formateurs, la protection des sites sensibles et la lutte contre la falsification des documents. Pour M. Messahel, l'Afrique «a déjà identifié la menace terroriste comme étant parmi les plus graves qui constituent des défis majeurs, et c'est pourquoi l'UA a intégré la lutte antiterroriste dans l'architecture africaine de paix et de sécurité». Le ministre délégué a affirmé que que «plus que toute autre, la région nord-africaine a été concernée par les exactions terroristes et ce douloureux vécu rend impérative une approche qui puisse participer au renforcement des capacités contre-terroristes des pays africains concernés». D'autre part, M. Messahel a appelé les experts «à garder à l'esprit» que ce fléau «particulièrement pervers est un phénomène global ne devant en aucun cas être rattaché ou confondu avec une aire géographique, une civilisation, une race ou une religion (…). Le terrorisme se joue des frontières et s'emploie de façon insensée à frapper de façon aveugle. Ses liens avec la criminalité transfrontalière sont par ailleurs dûment établis». Il a estimé «important» que les travaux prennent en compte la caractéristique de l'adaptation du terrorisme aux multiples mutations, dont celle technologique, enregistrées au cours des dernières années, qu'il s'agisse de la circulation des personnes, des biens et des capitaux, de la propagation des connaissances et des facilités de communication induites par les nouvelles technologies de communication. A signaler que le séminaire a regroupé une quarantaine d'experts nord-africains et occidentaux ainsi que les attachés militaires des ambassades à Alger. La première journée des travaux est consacrée aux évaluations des menaces et vulnérabilités liées au terrorisme présentées par les points focaux de l'Algérie, l'Egypte, la Libye, la Mauritanie, la Tunisie, la Rasd, le Mali et le Niger. Aujourd'hui, ce sera le tour du Niger et des experts de nombreux centres d'étude africains de faire part de leur évaluation. Les experts de l'Espagne, du Portugal, de l'Autriche et des Etats-Unis d'Amérique donneront chacun son avis sur la question. Les spécialistes de la Grande-Bretagne, de la Belgique, de la Suède et de l'Italie feront part de leur expérience dans le domaine, suivis des experts de l'Office des nations unies de lutte contre la drogue et la criminalité (ONODC) et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), pour terminer avec les conclusions et la voie à suivre.